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Ces paresseux de l’Etat !

Publié le lundi 14 août 2006 à 07h13min

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La Fonction publique burkinabè emploie environ une soixantaine de milliers d’agents. Tout fonctionnaire est recruté et affecté à une tâche spécifique, en vue du bon fonctionnement de l’Etat et du progrès de la Nation toute entière.

Mais combien d’entre eux remplissent réellement leur contrat vis-à-vis de l’Etat ? Cette question gêne certainement plus d’un fonctionnaire. Car, elle suppose une introspection et interpelle la conscience de chaque agent de l’Etat. Une fois engagé, le fonctionnaire est sûr de ne pas être inquiété.

A moins d’être coupable d’une faute grave, avoir un poste à la Fonction publique est devenu une assurance vie pour prévaloir son capital décès ou sa pension à la retraite. Forts de cet acquis, des fonctionnaires se plaisent à vaquer prioritairement et en toute quiétude à d’autres occupations pour compléter leur « Nansongo ». S’il leur reste du temps, ils iront faire un tour au bureau.

Les affaires de l’Etat viennent après. Pourtant, les fonctionnaires burkinabè aiment afficher en toute hypocrisie dans leur bureau : « Le seigneur regarda notre travail et se réjouit. Quand il vit notre salaire, il pleura ». A cette complainte, ils doivent avoir l’honnêteté d’ajouter : « Petit boulot, petit argent ». Bien que les huit (8) heures de travail journalier soient arrachées de haute lutte, des agents de l’Etat, et même des services les réduisent à leur guise. Bien qu’un décret du ministère du Travail précise au Burkina Faso les horaires : 7h à 12 h 30 mn pour la matinée et 15h à 17h 30 mn pour la soirée.

Les bureaux deviennent des galeries marchandes ou des hauts-lieux de causerie-débat. Quand ils ne passent pas leur temps à consulter les magazines du PMU’B, la présence de certains agents au service n’est indiquée que par le sac posé sur leur chaise. Il est plus facile de les retrouver dans un bar ou sur le lieu de leur propre « deal ». Pourtant, les Burkinabè sont convaincus que les Asiatiques ne dorment pas. Qu’en Europe et en Amérique, tout bouge.

Ils oublient de s’expliquer à eux-mêmes que le développement de ces continents repose aussi sur l’ardeur au travail de leurs populations. Un pays « paresseux » ne saurait avancer. La Fonction publique burkinabè ne souffre pas fondamentalement d’une insuffisance de ressources humaines, ni véritablement d’une question de qualité des agents. Elle est confrontée en premier lieu à un problème de gestion efficace et efficiente de son personnel.

Des Inspections générales de service (IGS) meublent l’organigramme des ministères. Celles-ci ont en réalité sombré dans le laxisme. Il n’est donc pas étonnant de voir des services où certains agents n’apparaissent que chez le billeteur à la fin du mois. Fiers de percevoir un salaire sans avoir travaillé. L’esprit de fonctionnariat devient au Burkina Faso une sorte de gangrène qui entrave peu à peu les initiatives de développement de l’Etat.

Les agents publics en sont responsables et les organes de contrôles coupables. La lenteur administrative entretenue souvent par la paresse de certains agents, cause bien de mal à la Nation. Que ce soit pour les entreprises privées que pour le service public. A cause d’un seul agent, tout s’arrête. Pour un simple arrêté de mise à disposition, des agents en fin de formation vont chômer pendant des mois. Des fonctionnaires se tapent tout le boulot, tandis que d’autres se tournent les pouces. Il faut aussi avouer que des agents, parfois affectés à des tâches auxquelles ils ne sont destinés, restent sans bureau.

A Ouagadougou comme à Bobo-Dioulasso, des classes à l’école primaire ont chacune plus d’un enseignant. Dans d’autres localités cependant, il en manque. Il y a des écoles même où les cours s’arrêtent à la récréation à 10h. Pendant ce temps, les travailleurs relevant des forces de l’ordre, de la santé, des médias... sont sans répit. A la volonté du président du Faso de « valoriser le capital humain » au cours de son quinquennat (2005-2010), il faut adjoindre « une action de conscientisation du personnel de l’Etat ». Si le gouvernement s’est résolu à faire jouer au secteur privé le rôle de moteur du développement, il doit s’assurer que la Fonction publique soit l’expression collective du progrès de la Nation.

La Fonction publique doit être le reflet de la politique gouvernementale. Elle existe certes au Burkina Faso car, l’Etat remplit sa part de contrat vis-à-vis de ses employés, avec un salaire garanti pour chaque fonctionnaire (gros travailleur, paresseux, absentéïste,...) à chaque fin du mois. Toutefois, la Reforme de l’Etat tarde à produire ses effets pour mettre les paresseux au pas et amener chaque fonctionnaire à tenir ses engagements vis-à-vis de la Nation. Il faut bien accepter de payer le prix du développement pour ressembler aux Asiatiques, aux Européens, aux Américains : travailler en toute âme et conscience pour la Nation.

Jolivet Emmaüs (joliv_et@yahoo.fr)

Sidwaya

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