LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Vous n’empêcherez pas les oiseaux de malheur de survoler votre têtе, mаis vοus рοuvеz lеs еmрêсhеz dе niсhеr dаns vοs сhеvеux.” Proverbe chinois

Rencontre gouvernement-secteur privé : Au delà du folklore, l’avenir de l’économie nationale

Publié le vendredi 7 juillet 2006 à 08h19min

PARTAGER :                          

Le dialogue annuel 2006 entre le gouvernement burkinabè et le secteur privé doit se distinguer des précédents et aller au-delà des résolutions et recommandations pour prendre les mesures qui s’imposent afin d’assainir le paysage économique national et booster les investissements.

Fraude, contrefaçon, corruption. Ces maux de l’économie burkinabè prennent de l’ampleur et inquiètent les acteurs. Gouvernement et secteur privé semblent conscients du phénomène et veulent prendre le taureau par les cornes. Déjà confrontés aux coûts élevés des facteurs de production (eau, téléphone, électricité...), la fraude et la contrefaçon sont en passe de briser l’élan des hommes d’affaires et limiter les éventuels investissements.

Or, le gouvernement burkinabè affirme placer le secteur privé au cœur du développement. « Aux grands maux, les grands remèdes », dit-on. « Commission nationale de la consommation et de la concurrence » (CNCC), « Coordination nationale de lutte contre la fraude » (CNLCF), « Haute autorité de coordination de la lutte contre la corruption » (HACLC)...

Les pouvoirs publics ont mis en place des structures en vue de lutter contre les maux actuels de l’économie nationale. Toutefois, force est de reconnaître que les actions de celles-ci ne sont pas toujours perceptibles : soit les rapports sont entourés du culte du secret, soit leurs contenus ne sont pas vulgarisés. « Le Burkina Faso est beau dans l’adoption des textes mais laid dans leur application », ironise un chef d’entreprise. Ce faisant, les mêmes préoccupations sont encore à l’ordre du jour.

Les rencontres gouvernement-secteur privé semblent ainsi satisfaire à une tradition plutôt qu’à une réelle volonté d’aller de l’avant en diagnostiquant et en « soignant » les maux énumérés. Il y a certes eu la fermeture et le démantèlement des huileries clandestines au sortir de l’édition de l’année dernière. Mais ces mesures se sont avérées insuffisantes car elles n’ont pas été permanentes.

Celles-ci n’ont perturbé les activités des fraudeurs et des contrefacteurs que l’espace de quelques mois. En dépit de ce jugement peu reluisant, pouvoirs publics et acteurs du secteur privé sont unanimes sur le bien fondé du dialogue annuel de Bobo-Dioulasso. Il reste à ce jour la seule tribune privilégiée pour débattre « sans langue de bois » de certaines questions.

Les deux parties s’accordent pour reconnaître le danger qui plane sur le monde des affaires. « La fraude entraînera une catastrophe sociale », préviennent les travailleurs des industries de Bobo-Dioulasso. « La corruption n’est pas une fatalité. Il faut seulement éviter de donner l’impression qu’on n’entreprend rien pour la combattre », souligne Lassiné Diawara, président du syndicat des commerçants importateurs et exportateurs (SCIMPEX). « L’Etat ne réprime pas assez la fraude », reconnaît Dieudonné Marie Compaoré, coordonnateur national de la lutte contre la fraude. Des propos qui montrent que beaucoup reste à faire pour assainir le paysage économique et encourager les investissements.

La fiscalité, une préoccupation

Car au delà de la fraude, de la contrefaçon et de la corruption, des problèmes liés à la fiscalité, aux paiements des factures et aux procédures douanières subsistent. Une relecture du code des investissements s’impose également. Le ministère des Finances et du Budget a commencé à jouer sa partition du 10 au 17 juin 2006 à Ouagadougou bien avant le rendez-vous de Bobo-Dioulasso.

Sous le thème « L’administration financière à l’écoute de ses partenaires pour une efficacité de ses prestations », il a rencontré les principaux secteurs d’activités : finances et assurances, industrie, services, agriculture et élevage, transports, bâtiments et travaux publics, professions libérales et spécifiques, secteur informel. Au menu des échanges, « la réglementation générale des marchés publics », « les axes majeurs de la fiscalité au Burkina Faso », « l’exécution de la dépense publique ».

Le gouvernement a le souci d’accroître ses recettes pour faire face aux besoins de fonctionnement et aux chantiers de développement. Et le secteur privé attend des mesures incitatives et un code des investissements attractif pour jouer pleinement le rôle qui doit être le sien dans le développement.

« Le Burkina Faso ne peut survivre sans impôts », a avoué Paténema Kalmogo, ex-directeur général des Impôts. « Si notre pays arrive toujours à payer ses fonctionnaires et à honorer ses factures, c’est en partie grâce à ses recettes fiscales et douanières », a ajouté Jean Baptiste Compaoré, l’argentier du Faso. « Le Burkina Faso veut-il une fiscalité de recettes ou de développement ? », se demande Lassiné Diawara.

Il faut donc trouver le juste milieu. Et c’est lors de la sixième rencontre gouvernement-secteur privé du 7 juillet à Bobo-Dioulasso qu’il faut nécessairement accorder les violons. La loi de finances, 2006, a certes résolu certains problèmes à travers l’élargissement de l’assiette fiscale, l’institution d’un nouveau numéro IFU, la fiscalisation du secteur informel ...

Mais les opérateurs économiques réclament une relecture globale du code des impôts et l’allégement des procédures douanières. « Quelle adéquation entre l’impératif d’accroissement des recettes de l’Etat et l’incitation à l’investissement par une fiscalité attractive ». Les deux cents délégués aux assises économiques 2006 doivent impérativement traiter ce thème évocateur avec toute la diligence et l’intelligence requises.

Cette fois-ci, la tribune doit aller au delà de l’enregistrement des préoccupations et des doléances pour définir séance tenante une ligne sûre, prometteuse et incitative pour l’économie nationale : enrayer les maux (fraude, contrefaçon, corruption), bâtir un code des investissements attractif et établir une relation de « gagnant-gagnant » entre l’Etat et le secteur privé. C’est à ce prix que le Burkina Faso va confirmer ses ambitions économiques de « pays émergent en Afrique de l’Ouest ».

Jolivet Emmaüs (joliv_et@yahoo.fr)


Soutenir les investisseurs vrais

« Un bon dirigeant, c’est comme un éléphant. C’est impossible à définir en théorie mais, quand vous en rencontrez un, l’évidence s’impose à vous ». Ainsi, Martial Massala, un consultant en entreprise donne sa vision du bon dirigeant. Etre chef d’entreprise selon cette approche est d’abord une affaire de motivation et ensuite de personnalité.

Les gros boubous brillants, les costumes de plusieurs centaines d’euros et les grosses cylindrées rutilantes aux vitres fumées ne suffisent pas pour être un chef d’entreprise. Il existe de bons et de mauvais dirigeants certes, mais il n’y a pas en retour, de chef d’entreprise modèle. De l’analphabète autodidacte qui a su bâtir son affaire avec persévérance, rigueur et détermination, au diplômé des grandes écoles commerciales ou de management, chacun, selon son style, conduit ou gère son entreprise à bon escient.

Au Burkina Faso, le constat est qu’une bonne part des opérateurs économiques se « débrouillent » !. On y rencontre toutes sortes d’organisations : des entreprises modernes gérées par des personnes dotées d’un solide bagage intellectuel, des personnes averties et informées sur les subtilités de l’économie, aux entreprises dont la seule volonté de modernisation se limite à la présence d’ordinateurs parfois vétustes et à une connexion à l’Internet ; pis encore des entreprises gérées comme un étal d’arachides. Ces dernières fonctionnent dans une pagaille indescriptible sans feuille de route.

On oublie très souvent que la stratégie d’entreprise consiste à avoir une vision prospective à moyen et long terme de son entreprise. Il faut projeter l’entreprise dans l’avenir, savoir anticiper, tenir compte de l’évolution du marché, s’intéresser à la concurrence, savoir innover, connaître les forces et les faiblesses de son entreprise, etc.

Au lieu de rentrer dans « la république du modernisme » et d’exprimer leurs compétences, des opérateurs économiques préfèrent troquer leurs bureaux quand il y en a, contre les salons douillets des autorités politiques ou gouvernementales en quête d’intervention pour l’obtention de marché, ou pire, pour que leurs marchandises puissent contourner la réglementation douanière et leur chiffre d’affaires échapper au fisc.

Ce type d’hommes d’affaires est nuisible à l’économie et à la société. Ils doivent être extirpés du milieu des affaires afin que les investisseurs honnêtes, nationaux et étrangers aient plus confiance au marché burkinabè. Car la rencontre du possible, dans sa platitude et du nécessaire, dans son intransigeance, donne rarement des résultats heureux.

Rabankhi Abou-Bâkr ZIDA (rabankhi@yahoo.fr)

Sidwaya

PARTAGER :                              

Vos commentaires

 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique
Burkina : Une économie en hausse en février 2024 (Rapport)