« J’ai acheté un téléphone à Zogona et demandé à une connaissance d’y ouvrir un compte Google en mon nom. Il m’a dit plus tard qu’un compte avait déjà été créé sur le même téléphone. Je suis donc reparti chez l’acheteur pour savoir pourquoi le téléphone avait déjà un compte et je ne l’ai pas vu. J’ai pris peur et j’ai réalisé que c’était un téléphone volé. Et comme j’avais peur que des problèmes me tombent dessus, j’ai revendu le téléphone ». Ces mots du prévenu sont grosso modo, sa version des faits quant à sa responsabilité dans le cadre de cette affaire, où il lui est reproché des faits de vol aggravé.

Les confrontant avec ces déclarations faites devant le procureur, le tribunal soulignera qu’ils sont tout autre, et « comme par hasard », les mêmes que ceux exposés par la victime. « La victime dit qu’elle a oublié de fermer la porte une fois à la maison et que c’est plus tard qu’elle s’est rendue compte que ces affaires que sont ces téléphones et celui de sa femme ainsi que sa moto avaient disparu. Lorsque vous avez été entendu par le procureur, vous lui avez dit que vous passiez près de là et que vous vous êtes rendus compte que la porte n’était pas fermée. C’est là que vous êtes rentrés et avez pris les téléphones et la moto » a-t-il rappelé.

Des déclarations que le prévenu ne niera pas, soulignant toutefois au passage qu’il avait peur du procureur. « Le procureur a crié sur moi et il m’a dit de ne pas m’amuser avec lui. Comme c’était ma première fois, j’ai dit oui à sa question, sans me rendre compte. Je me suis accusé moi-même et c’est après que j’ai su que je l’ai fait. J’ai eu peur. Sinon, je n’ai rien volé et je ne suis au courant de rien. Tout ce que je sais c’est que j’ai acheté un téléphone Infinix et il s’est avéré plus tard que c’était un téléphone volé », a-t-il rétorqué.

A la question de savoir comment a-t-il su que AK était effectivement celui qui s’était introduit nuitamment dans sa demeure pour y soustraire tous les biens sus-cités, la victime répondra qu’elle n’a aucune certitude quant à l’identité de l’auteur de l’infraction. Seulement, il a pu entrer en possession des photos du prévenu après avoir restauré son compte Google. « Le vol est survenu dans le mois d’août. Et c’est en novembre, lorsque j’ai fait la restauration de mon compte Google, que je me suis rendu compte qu’il y avait des photos et des vidéos qui n’étaient pas les miennes dans mon téléphone. J’ai vu des photos du prévenu ici présent, et je les ai rapportés à la police. J’ai aussi constaté que le compte Google a tenté d’être changé mais sans succès. Même la photo du compte a été changé et c’est celle du prévenu, mais le nom du compte est resté inchangé, c’est toujours le mien. Mais personnellement, je ne le connais pas. Je ne l’avais jamais vu si ce n’est à travers ses photos qui se sont retrouvées dans mon téléphone » a-t-il expliqué.

Dans ses réquisitions, le procureur relèvera deux faits. D’une part, la mauvaise foi du prévenu. D’autre part, sa persistance dans l’erreur, toute chose qui, au lieu de le tirer d’affaire, contribue à l’enfoncer encore plus. « En bon citoyen, lorsque vous avez peur, vous le faites savoir à la police ou à la gendarmerie. Et pour le prévenu qui détenait par devers lui un téléphone dont lui-même doutait de la fiabilité de la provenance, je crois qu’il a été de mauvaise foi en le revendant. Il faut aussi relever les circonstances aggravantes dans le cadre de cette affaire. Faut-il le rappeler, il s’est introduit nuitamment par effraction chez la victime. Cela suppose même qu’il détenait des outils qui pourraient servir à faciliter la commission de l’infraction. Imaginons même que la victime s’était réveillée pendant qu’il était en train d’opérer...Tous ces éléments-là mis ensemble, en plus du fait que le prévenu persiste dans ces déclarations qui sont fausses, l’enfoncent encore plus. On peut commettre des fautes mais ne pas avoir un grain de repentance est encore plus grave », a-t-il regretté, avant de demander, à la suite du plaignant qui réclame 1 million FCFA pour sa moto et 340 000 FCFA pour les téléphones volés, une peine d’emprisonnement de 60 mois dont 36 fermes et une amende de 1 million FCFA.

La décision du juge pour cette affaire est attendue pour le 29 janvier 2024.

Erwan Compaoré
Lefaso.net