Le président Kais Saied a procédé par décret au remplacement de Najla Bouden par Ahmed Hachani. Une décision qui ne fera l’objet d’aucune justification quant à ce choix brutal, de quoi susciter quelques interrogations au sujet de la politique réelle du président pour son pays. En effet, ce dernier est à son troisième Premier ministre en quatre années de gestion. Et pas plus tard qu’en février 2023, c’est son ministre des affaires étrangères Othman Jerandi, qui quittait l’équipe gouvernementale sous ordre du président, encore sans justification.

Aussi, on se rappelle qu’en 2022, Kais Saied procédait à une modification de la constitution par référendum, gelant le parlement tunisien et formant par la même occasion, un système où il possède désormais les pleins pouvoirs. Le pays est depuis lors dirigé par décret présidentiel et la Tunisie a de plus en plus mal à sa démocratie. Depuis février par exemple, une vingtaine d’opposants et personnalités ont été mis aux arrêts sous ordres de Kais Saied. Qualifiés de terroristes par ce dernier, ils sont accusés pour "complot contre la sûreté de l’Etat".

Le nouveau Premier ministre Ahmed Hachani arrive donc dans un contexte où la Tunisie est à la croisée des chemins car, en plus de devoir trouver urgemment une solution à la pénurie de pain (ligne rouge pour les tunisiens car ayant déjà provoqué des émeutes occasionnant 150 morts), il devra travailler à rehausser l’économie du pays qui est loin d’être reluisante (endettement profond du pays à 80% du produit intérieur brut, problème de chômage touchant 15% de la population, taux de pauvreté qui va grandissant affectant 4 millions de tunisiens sur 12).

C’est fort de ce constat que le président souhaitera au nouveau chef de gouvernement "bonne chance dans sa nouvelle fonction" qui, sans doute sera jalonnée de "défis colossaux."

Erwan Compaoré
Lefaso.net

Sources : Tribune de Genève, Jeune Afrique, RFI, Le Monde