Actualités :: Le Plateau du week-end… : Le port du casque

Qualifiés de « problème de santé publique », les accidents de circulation constituent un véritable casse-tête chinois, tant pour les structures publiques que les organisations privées qui ont placé au cœur de leur existence, le combat contre les ingrédients de ce « phénomène ». Parmi les cas d’accidents, ceux impliquant des motocyclettes sont assez élevés, surtout dans les grandes villes, avec des conséquences souvent regrettables. Ce qui a certainement inspiré les autorités à lancer, entre autres mesures, l’idée du « port obligatoire du casque » en 2008. La réaction des populations ne s’est pas fait attendre…

Aujourd’hui, les motos connaissent leur traite avec en sus, un risque encore élevé d’accidents. Pourtant, il faut trouver des solutions pour minimiser cette situation. Quelle mesure idoine faut-il adopter pour minimiser ces cas d’accidents malheureux ? Des Burkinabè répondent…

Hamadou B., technicien électrique : « Un pays ne se gère pas avec les humeurs… »

Force doit rester à l’Etat qui doit conduire ses populations vers le bien-être, même s’il faut user de la force. C’est à l’Etat de mesurer l’impact de ne pas porter le casque, sur la vie des populations et de prendre les mesures idoines. Dans beaucoup de pays de la sous-région, tu n’es pas fou pour ne pas porter un casque en circulation ! C’est une volonté et on ne fait pas le bonheur des populations toujours avec leur volonté ; souvent, il faut les forcer pour leur bien. L’Etat doit prendre ses responsabilités à chaque fois que la situation l’impose. Mais si au moindre mouvement hostile des populations l’Etat doit reculer, c’est qu’il n’était pas sûr de la pertinence de son projet ou ne veut tout simplement pas le bien de celles-ci (populations, ndlr). Quand il y a de telles mesures, il faut d’abord beaucoup communiquer, montrer les enjeux pour sensibiliser. Passée cette étape, il faut sévir. Un pays ne se gère pas avec les humeurs des uns et des autres ; il faut obliger, lorsqu’on pense que ça va faire du bien à tout le monde.

Aboubacar Bélem, commerçant : « On a voulu faire du business avec les casques »

Je crois qu’on a un problème de voies au Burkina. Prenez la circulation, vous constaterez que les motos, vélos et automobilistes circulent au même endroit. Les engins à deux roues sont obligés d’emprunter la même voie que les voitures. Pourtant, dans les normes, à part les motos d’un certain gabarit, aucune moto ne doit quitter la piste cyclable pour aller sur celle réservée aux automobiles. Le deuxième élément qui fait que le port du casque n’est pas effectif est qu’on a voulu faire du business avec les casques ; ce qui fait que les gens sont devenus réticents parce qu’ils pensent que l’argent va aller dans les poches de gens tapis dans l’ombre plutôt que de servir à payer de vrais casques. Voyez-vous en 2008, c’est parce que les gens ont senti que c’était du business de certains commerçants qui avaient eu le monopole que ça n’a pas marché. Je crois que l’une des solutions, c’est d’imposer le port du casque mais laisser les commerçants vendre librement sans donner le monopole à qui que ce soit. La vente doit viser à protéger les populations et non pour faire du business.

Valéry R. Koussoubé, artisan : « Il fallait combattre le mal à la racine… »

Il faut d’abord importer des casques de bonne qualité et laisser le choix à chaque usager de porter ou non un casque. Il ne faut pas forcer les choses. Actuellement, nous voyons des casques qui ne servent même pas, parce qu’ils se cassent au contact du sol. Aussi, le port du casque doit être un processus. Les pays qui ont réussi à imposer le port du casque, à l’image du Bénin, ont sensibilisé les populations et ont construit des infrastructures routières. Dans les autres pays, ils ont des voies à double sens. Il fallait combattre le mal à la racine en construisant des infrastructures adéquates et sensibiliser les gens. Chaque jour, les populations augmentent en nombre mais les infrastructures ne suivent pas ; ça ne peut pas aller. Vous verrez dans 5 à 10 ans, la circulation sera intenable. Nos dirigeants ont travaillé sans prévoyance ; c’est comme s’ils n’avaient pas de techniciens autour d’eux. La police municipale devrait s’investir dans la sensibilisation au lieu d’attraper les gens aux feux tricolores. Prenons l’exemple du grand marché ; les gens circulent avec leurs motos, véhicules et ça crée un désordre. Normalement, aux alentours du grand marché, voire le centre-ville, il devait y avoir des parkings et chacun gare son engin avant d’accéder au centre-ville ou au marché. On a laissé vraiment faire les choses….Sinon, chacun sait bien que porter un casque protège en quelque sorte la vie mais ça dépend vraiment de beaucoup de facteurs pour que les gens arrivent à l’intégrer dans leur vie. Au Bénin par exemple, malgré le grand nombre de taxis motos, de motos et de voitures, vous pouvez passer un mois sans voir un accident. Parce que les gens sont sensibilisés, les routes sont bien faites et larges. Sinon, de nombreux gens ont des casques à la maison mais ils ne portent pas. Si les autorités étaient de bonne foi, elles allaient poursuivre depuis 2008 l’idée du port de casque progressivement. Mais hélas, elles ont relâché et tout est remis à zéro et on voit maintenant que c’est trop tard.

Jacqueline Ouédraogo, agent de santé : « On a failli au niveau de la base »

Le pire, c’est qu’il y a beaucoup de personnes qui conduisent des véhicules sans même avoir de permis de conduire. On a l’impression que c’est devenu un vrai désordre et que l’Etat a démissionné à ce niveau. On regarde chacun faire comme il veut. L’importance du port du casque ne devrait plus être à prouver. C’est une question d’éducation des populations et il faut prendre le taureau par les cornes. On a failli au niveau de la base, parce qu’on a ignoré certains aspects fondamentaux de la vie de la nation. Dans les pays où la discipline est observée, vous constaterez qu’au niveau de leur enseignement, dès le primaire, des modules sur la circulation routière et le civisme sont instaurés. C’est impensable qu’au Burkina, jusqu’au lycée, l’on ne puisse pas chanter l’hymne national de son pays. Il faut apprendre aux gens à aimer leur pays ; si on n’aime pas son pays, on ne peut pas respecter ses règles. Mais quand on aime, toute règle qui tend à aller dans le sens de l’intérêt général est acceptée et respectée facilement.

Alassane Sanfo, commerçant : « Chacun sait comment protéger sa vie… »

Je pense que c’est la pauvreté qui amène les gens à être hostiles vis-à-vis au port du casque. C’est difficile pour un père de famille de considérer le casque comme une priorité alors que des besoins familiaux attendent d’être satisfaits. Sinon, chacun sait comment protéger sa vie et l’Etat n’avait même pas besoin de s’échiner pour dire aux gens de porter des casques. C’est la pauvreté qui fait qu’on pense que les usagers sont réfractaires.
Aussi, il y a de nombreuses personnes qui circulent sur des engins mais qui, en réalité, ne l’ont pas payé de leur propre poche ; ils se débrouillent avec. Donc, quand vous dites à quelqu’un à qui on a donné une moto pour se débrouiller de payer un casque, ça devient difficile. Je pense qu’il faut poursuivre la sensibilisation pour que celui qui veut, et qui peut, paie et celui qui ne peut ou ne veut pas aussi circule librement.

J. Yves Kouassi, courtier : « Sensibiliser les gens à bien circuler »

Personnellement, je n’aime pas le casque, parce que ça m’empêche d’entendre lorsque quelqu’un m’appelle en circulation. Aussi, il faut remarquer que ça peut déséquilibrer en circulation et conduire à une chute ou à un accident. Le casque ne protège même pas, parce qu’on a vu des casques irrésistibles au moindre choc. Et puis, le casque joue sur le cou ; la plupart des gens qui ont été atteints par le cou sont ceux qui ont porté un casque. Or, lorsque le cou est atteint, c’est aussi grave que la tête. La meilleure solution, pour moi, c’est de sensibiliser les gens à bien circuler.

Cécile N. Oubda, ménagère : « On voit souvent des décideurs qui circulent mal… »

Il faut laisser les gens faire leur choix. Pourquoi forcer les gens à porter un casque ? Personnellement, ça m’empêche de bien circuler, car ça réduit mon champ de visibilité. Et puis, le danger dans la circulation vient des autorités elles-mêmes qui achètent des motos de grands gabarits pour leurs enfants. Il faut commencer par sanctionner ceux-là qui se croient puissants en circulation et qui ne respectent aucune règle. On voit souvent des décideurs qui circulent mal mais rien ne leur arrive.

Propos recueillis par Le Facilitateur

Lefaso.net

Burkina/Santé : Le long combat des malades du lupus qui (...)
Aéroport de Donsin : Les infrastructures sous maîtrise (...)
Burkina/Réponse humanitaire : Le SPONG et ses (...)
Burkina : Le ministère en charge des transports ouvre un (...)
Ministère de l’Agriculture : Deux projets visant (...)
Dédougou : La stigmatisation, une autre cause du (...)
Ouagadougou : Braquage d’un véhicule de transport de (...)
Crise alimentaire dans la Tapoa : Des personnes (...)
Burkina : Un réseau de présumés auteurs de vol organisé (...)
Ouagadougou : Deux présumés arnaqueurs via WhatsApp dans (...)
Burkina Faso : La crèche maternelle bilingue Notre-Dame (...)
Burkina/“Prix de la Lutte anti-corruption” : La date (...)
Burkina/Recherche scientifique : Maud Saint Larry Maïga (...)
Jubilé d’albâtre des Frères des écoles chrétiennes : Une (...)
Gaoua : Le gouvernement burkinabè et ses partenaires (...)
Plan d’action pour la stabilisation et le développement (...)
Burkina : La Jeune chambre internationale Ouaga Étoile (...)
Burkina : Un individu tentant de s’en prendre à une (...)
Burkina/Eau et assainissement : Démarrage officiel de (...)
Burkina/Enseignement supérieur : L’université Aube (...)
Université Joseph Ki-Zerbo : L’autonomisation des (...)

Pages : 0 | 21 | 42 | 63 | 84 | 105 | 126 | 147 | 168 | ... | 36708


LeFaso.net
LeFaso.net © 2003-2023 LeFaso.net ne saurait être tenu responsable des contenus "articles" provenant des sites externes partenaires.
Droits de reproduction et de diffusion réservés