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Association des investisseurs en trading : Les membres lancent un SOS pour le dégel de leurs comptes

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Publié le dimanche 20 octobre 2019 à 23h14min

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Association des investisseurs en trading : Les membres lancent un SOS pour le dégel de  leurs comptes

L’Association des investisseurs en trading n’est pas une société de trading, mais une association d’individus qui ont investi au sein des sociétés de trading. Le blocage des comptes des sociétés de trading pour « non-conformité à la règlementation », a touché plus de 50 000 investisseurs au Burkina Faso, selon cette association. Au cours d’une conférence de presse organisée le samedi 19 octobre 2019, l’Association des investisseurs en trading appelle à la raison les autorités et les personnalités auteurs de ce blocage de leurs dus. Ils menacent aussi d’user de tous les moyens possibles pour obtenir gain de cause.

A la Bourse du travail ce 19 octobre 2019, la salle de conférence était pleine de jeunes, de femmes et de retraités. La conférence de presse suscite apparemment un engouement, signe que le nombre de personnes concernées n’est pas peu. Le cri de cœur des organisateurs de cette conférence de presse, c’est le dégel des comptes des sociétés de trading, bloqués en banque depuis un peu plus d’une demi-année.

« Mesdames et messieurs les journalistes, la jeunesse consciente et éclairée entend s’entretenir avec vous sur un complot honteusement orchestré par les forces du mal que sont le monde de la finance, notamment les banques, les politiciens ; et le tout exécuté par une justice aux ordres qui a encore du mal à se débarrasser de ses anciens vices pour défendre les intérêts du pauvre et se mettre au service de la vérité », ont vigoureusement introduit les membres de l’Association des investisseurs en trading. Puis de marteler : « Si les fonds ne sont pas disponibilisés dans de meilleurs délais, la jeunesse est prête à se battre jusqu’à la dernière goutte de son sang. Nous avons déjà tout perdu à travers cette crise et nous n’avons plus peur de mourir ».

En effet, Pascal Tondé, investisseur retraité, déclare : « Une porte s’est fermée et une autre s’est ouverte. Malheureusement, cette nouvelle porte s’est aussi refermée ». C’est à la limite un drame humanitaire, dit-il. « Aujourd’hui, il y a des familles qui ne peuvent pas s’offrir deux repas par jour, des enfants qui n’iront pas à l’école et des étudiants qui ne vont pas pouvoir payer leur scolarité », ajoute Roger Barry, un autre investisseur à la retraite. C’est pourquoi, dit-il, avant de poser un acte, il faut connaître la mesure de l’acte au préalable. Le but de la conférence, selon lui, n’est rien d’autre que de montrer à l’opinion publique qu’il y a un drame au Burkina Faso.

Prenant la parole, madame Saré s’est fait l’avocate des investisseurs à la retraite : « Vous savez à combien est payé un retraité ? Des miettes et par trimestre. Si vous investissez ces miettes et on les bloque, qu’est-ce que vous devenez, surtout avec les maladies que connaissent les retraités ? ». Elle poursuit : « A partir de 60 ans, on ne vous accorde plus de crédit en banque. On vous dit non, vous êtes trop âgé pour qu’on prenne le risque de vous accorder du crédit. Comment une personne âgée peut-elle s’en sortir dans de telles conditions ? » C’est dans le trading que madame Saré dit avoir trouvé une opportunité. « Maintenant, notre plaidoyer est que l’Etat débloque tous les comptes », résume-t-elle.

Pour la petite histoire, les conférenciers, avec à leur tête Souleymane Gorou, ont rappelé que courant l’année 2016, des jeunes ayant appris à l’étranger le métier de trading, ont décidé de porter au grand jour ce métier. Un art qui consiste, selon eux, à spéculer sur des valeurs et indices boursiers sur les différentes places financières internationales. Cette activité a été longtemps pratiquée par les banques, qu’elles soient centrales, commerciales, et les fonds d’investissement. C’est ainsi que ces jeunes ont créé des sociétés en 2016, informent-ils, dans le but de permettre à toutes les couches de la société de faire des investissements selon des modalités de temps et suivant la consistance du portefeuille de tout un chacun.

« Toutes les catégories socio-professionnelles du pays y ont investi, étudiants comme élèves, hommes politiques, magistrats, militaires, policiers, commerçants, retraités, veuves et chômeurs ; et même des banquiers, des ménagères ou nos mères qui s’occupent de la salubrité de la ville », ajoute-t-ils. « Seulement, comme un coup de massue, une série d’événements intrigants sont venus guillotiner l’espoir de toute une jeunesse », ont-ils déploré.

En effet, rappelle l’Association des investisseurs en trading, courant mai 2019, le Conseil régional de l’épargne publique et des marchés financiers de l’UEMOA (CREPMF), devenu Autorité des marchés financiers (AMF), invitait les populations à se méfier des maisons de trading qui seraient en réalité des « arnaqueuses » et mettait en garde lesdites maisons sur la nécessité d’arrêter leurs activités pour se conformer à la loi.

Selon elle, cette note serait une main « mesquine » visant à discréditer les sociétés de trading. « Croyant à la fin de nos surprises, les maisons de trading apprenaient l’embrigadement, la séquestration de leurs comptes bancaires par une mesure judiciaire inique de gel de leurs avoirs au niveau des différentes institutions bancaires », se sont-ils indignés.

S’en est suivie, le 14 juin 2019, une note « économicide » et « révoltante » du ministère de l’Economie, par laquelle son premier responsable invitait les sociétés à mettre immédiatement fin à leurs activités. Les membres de l’association précisent que le caractère délibérément large de cette prohibition administrative sonnait le glas des paiements des retours sur investissement qui n’avaient jusqu’alors rencontré aucune difficulté.

Les investisseurs, dont le nombre dépasse 50 000, auraient entamé une série de plaidoyers et sont entrés en contact avec certaines autorités, sans succès. « Nous sommes entrés en contact avec certaines autorités et les acteurs de cette crise ; et cela est resté jusque-là sans suite », ont déploré les conférenciers. Ils accusent anonymement un banquier de ramer à contre-courant d’une solution rapide à la crise et les politiques de mépris total à l’endroit de la jeunesse. Ils estiment aussi qu’il ne s’agit pas d’arnaque, comme le prétendait une autorité du CREPMF à l’issue de sa rencontre avec le chef du gouvernement burkinabè. Et ce, d’autant plus qu’aucun investisseur n’a jamais porté plainte contre ces sociétés depuis 2016, explique Souleymane Gorou.

Pour les membres de l’association, c’est l’Etat qui serait à l’origine de leur problème, en mettant confiance ces sociétés de trading en 2016 à travers les récépissés qu’il leur a livrés, les reconnaissant comme sociétés opérant dans le trading. C’est pourquoi, ils déclarent ne pas comprendre comment une activité qui fonctionne légalement et qui paye des impôts à l’Etat depuis 2016, peut être qualifiée d’arnaque sans que les premiers concernés ne s’en plaignent. « Pourquoi l’activité est autorisée ailleurs, sauf au Burkina Faso seulement ? », s’interrogent-ils.

Le dossier est manifestement vide. Il s’agit d’un complot dirigé contre la jeunesse, ont-ils déduit. Ils ont condamné avec la dernière énergie cette action « déshumanisante » et ont appelé les autorités et personnalités à se ressaisir pendant qu’il est encore temps. « Nous avons décidé, à partir de cet instant, de prendre notre destin en main en vue d’obtenir le paiement sans délai de nos sous séquestrés par l’autorité judiciaire aux ordres. Notre jeunesse est intrépide et ne se laissera pas marcher dessus », ont-ils averti.

Les mots de conclusion des conférenciers furent à l’adresse du chef de l’Etat, pour qu’il diligente cette affaire pour une issue heureuse. Selon eux, des magistrats, des policiers, des cultivateurs et toutes les couches de la société ont investi dans le trading. Cela voudrait dire que s’il y a eu des erreurs, tout le monde, y compris les autorités, a failli. Il y a des personnes qui sont tapies dans l’ombre et qui veulent créer des problèmes au chef de l’Etat, disent-ils. Mais, conclut Souleymane Gorou, « le jour où nous allons sortir, tant que les comptes ne sont pas dégelés, nous ne rentrerons pas ».

E.L.
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