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Violences Xénophobes en Afrique du Sud : La face hideuse de la Nation arc-en-ciel

Publié le mardi 21 avril 2015 à 03h01min

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Violences Xénophobes en Afrique du Sud : La face hideuse de la Nation arc-en-ciel

L’Afrique du Sud a mal à son hospitalité. Depuis près de trois semaines, la nation arc en ciel est plutôt à la double couleur du feu et du sang. On découpe, on frappe, on brule ses semblables qu’on traite d’étrangers et qu’on tient pour responsables de sa situation de précarité. Le spectacle est triste. Sept morts, près de 500 déplacés. Comment est-on arrivé à ce niveau de barbarie à répétition ?

Les images sont insoutenables et on se convainc de jusqu’où la bêtise humaine peut conduire. Cet homme qui se débat dans les flammes, sans issu, avec ses bourreaux qui l’encerclent. Ce couple pourchassé par ces manifestants machettes à la main. Ce môme, le visage désemparé qui cherche à se sauver au milieu des flammes. L’image de l’Afrique du Sud écornée depuis un certain temps, a encore pris une couche de laideur.

La grande Afrique du Sud, qui proclame très haut sa place de leader sur le continent. L’Afrique du Sud de Madiba qui doit certainement se retourner dans sa tombe. Cette Afrique du Sud qui a fait l’objet d’une sympathie presqu’universelle quand elle se battait contre le régime de l’apartheid, fait simplement honte. Ces chasseurs d’étrangers savent-ils que c’est souvent depuis l’étranger que les freedom figthers, politiques ou artistes, se sont réfugiés pour combattre et terrasser le régime de la discrimination raciale ? Aujourd’hui, ce sont les fils et filles de la nouvelle Afrique du sud, qui refusent des frères africains. Pis, les brûlent au pneu, vifs ! Avec ces malheureux événements, les héritiers non légitimes de Nelson Mandela finissent par convaincre que la « peau blanche » n’a pas le monopole du racisme.

Comme d’habitude, c’est le même alibi qui est usité. Les victimes dont le seul crime est d’être des Zimbabwéens, Malawites, Mozambicains, Somaliens ou Congolais, venus dans la nation arc-en-ciel à la recherche du bonheur. Ils sont alors accusés de « voler le job des autochtones » et d’être à l’origine de la criminalité grandissante dans le pays.

La situation est d’autant plus triste que cette fois, c’est un leader d’opinion qui a mis le feu aux poudres. En début mars, Goodwill Zwelithini, chef traditionnel Zoulous, avait demandé aux « étrangers de faire leurs bagages et de retourner dans leurs pays ». Des jours plus tard, c’est le fils du président sud-africain, Edwards Zuma, qui déclarait sa solidarité avec les propos haineux du chef qui entre-temps, a déclaré s’être fait mal comprendre. C’était trop tard. Les courses poursuites suivies de lynchages dans les townships et les rues, ainsi que les pillages des commerces des étrangers avaient déjà eu lieu. Plus de 5.000 déplacés selon le Haut-commissariat des Nations-Unies pour les réfugiés.
Pour calmer la furie meurtrière de ses compatriotes, le président Jacob Zuma, qui a annulé son voyage en Indonésie, était à Durban ce samedi pour y rencontrer des étrangers regroupés dans un camp après avoir fui leurs quartiers pour échapper aux agressions. Ce week-end également, des Sud-Africains ont marché pour désapprouver les actes xénophobes. Le gouvernement a quant à lui, promis dimanche, de punir les auteurs des violences xénophobes, et selon le ministre sud-africain de l’intérieur, au moins 300 présumés participants aux exactions, ont été arrêtés. Une mesure intervenue alors que certains pays ont déjà commencé à rapatrier leurs ressortissants.
Les violences contre les communautés étrangères sont devenues cycliques en Afrique du sud. En début d’année, une demi-dizaine d’étrangers avait aussi trouvé la mort. En 2008, c’étaient 62 africains qui étaient froidement assassinés dans des violences.

Au-delà de ces mesures sporadiques qui s’apparentent à du sparadrap placé sur une plaie béante sans pansement, Jacob Zuma devrait administrer une thérapie de choc en œuvrant à corriger les inégalités sociales qui semblent se creuser davantage, tout en agissant fermement contre ces actes barbares d’un autre âge. Les barbares se plaignent de ne pas avoir du travail, de s’appauvrir davantage. Mais comme le dit le premier des Sud-africains, Jacob Zuma, « Aucun degré de frustration ou de colère ne peut justifier des attaques contre des ressortissants étrangers ou le pillage de leurs magasins ». La voix du président sera-telle entendue dans cette horde d’assassins, de pilleurs et de brûleurs ?

Tiga Cheick Sawadogo
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