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Affaire Brafaso : « Passage en force » ou « excès de pouvoir » ?

Publié le mercredi 26 octobre 2011 à 01h52min

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Le feuilleton judiciaire entre la société Brafaso et ses créanciers qui avaient obtenu sa mise en liquidation judiciaire s’est poursuivi ce mardi 25 octobre 2011 devant le Premier Président de la Cour de cassation. En effet, la Société Brafaso a saisi cette juridiction pour obtenir le sursis à l’exécution de l’arrêt qui a prononcé sa liquidation. En attendant le verdict prévu pour le lundi 1er août prochain, Me Jean Charles Tougma dénonce entre autres, « des excès de pouvoir », alors qu’en face, Me Guy Hervé Kam crie à la « tentative de passage en force ».

Après l’audience, nous avons eu au téléphone les avocats des deux parties. Jean Charles Tougma, avocat de Brafaso, a lui également confiance en la justice. Il s’explique : « Juridiquement, les textes et la jurisprudence, permettent au premier président de rendre la décision, vu que c’est une mesure conservatoire qui est sollicitée pour éviter des conséquences irréversibles. Naturellement, le premier président, sur la base de l’article 607 nouveau du Code de procédure civile est compétent pour connaître des sursis à exécution des arrêts et jugements rendus en dernier ressort, dans le cas où le pourvoi n’a pas un effet suspensif.

Du reste, les 4 conditions prévues par l’article 606 nouveau pour obtenir le sursis ne sont pas cumulatives et nous les remplissons. Dans notre cas il existe bien des risques de conséquences irréversibles alors que la partie adverse ne court aucun danger, vu que les investissements de mon client sont immobilisés et dépassent 35 milliards de francs CFA, pour une créance d’environ14 milliards. Deuxièmement il y a eu violation flagrante des droits de la défense. Troisièmement, on note des excès de pouvoir. Enfin, on relève des erreurs grossières de droit ».

Un des conseils des créanciers, Me Guy Hervé Kam, se dit confiant pour la suite. Pour lui, « la procédure engagée est une tentative de passage en force dans la mesure où la seule juridiction compétente en cette matière est la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage d’Abidjan. A l’occasion de la rentrée judiciaire, j’avais retenu les propos du Président du Conseil Supérieur de la Magistrature qui avait dit en substance que pour être respectée, la Justice doit rendre des décisions crédibles. Nous inscrivant dans cette logique, nous faisons confiance, a priori, à la Cour et nous attendons sereinement la décision, car en réalité cette affaire est très simple en droit et les textes y relatifs sont d’une rare clarté. Son envergure est simplement liée à la personnalité du promoteur et des montants en jeu.

Nous avons assisté à un procès qui ne devrait pas exister. En effet, Brafaso, se fondant sur une disposition procédurale de droit burkinabè a demandé le sursis à l’exécution de l’arrêt qui a prononcé sa liquidation. Comme tous les juristes le savent, l’acte uniforme sur les procédures collectives contient des dispositions d’ordre procédural qui sont contraires aux dispositions de notre code de procédure civile. Et à ce titre, l’article 10 du traité OHADA prévoit que toutes dispositions contraires de droit interne, antérieures ou postérieures sont abrogées. Précisant le sens et la portée de cette disposition, la Cour Commune de Justice et d’arbitrage a, dans un avis, affirmé sans équivoque, en ce qui concerne précisément les procédures collectives, que les dispositions concernées sont celles qui sont contraires dans la forme, le fond ou l’esprit.

Dans le même temps, il y a un article, celui 607 du code de procédure civile burkinabè, qui donne le pouvoir au premier Président de la Cour de cassation de suspendre l’exécution. Au vu des dispositions de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage, cet article 607 est contraire aux articles 217 et 221 de l’acte uniforme en ce que ceux-ci prévoient que ni la loi nationale, ni aucune juridiction ne peut arrêter l’exécution provisoire qui les caractérise.

L’essentiel des moyens développés par Brafaso est tiré du droit national. Par exemple, elle demande la nullité de la décision parce que le ministère public n’était pas présent à l’audience, alors que la communication du dossier au ministère public résulte du droit national et non de l’acte uniforme. L’autre partie, au cours de l’audience a cité plein de dispositions de loi dont on sait ou en tout cas on doit savoir qu’elles ne s’appliquent pas. A quelles fins ?

En droit, le dossier de Brafaso est bâti sur des monstruosités juridiques. Ce qui nous fait penser que par cette procédure, Brafaso ne souhaite pas que le juge dise le droit. Mais, force doit rester à la loi ».

En rappel, c’est depuis le vendredi 12 août 2011, que les Brasseries du Faso (Brafaso), propriété de l’opérateur économique burkinabè, Mohamed Panguéba Sogli, sont en liquidation judiciaire. Le 5 juillet 2011, la société créée en 2003 et dont les boissons en bouteille en plastique avaient disparu de la circulation depuis un certain temps, avait été mise en redressement judiciaire, décision reformée par la Cour d’appel le 12 août dernier. La structure, dans cette affaire, fait l’objet de poursuites judiciaires, de la part de 3 de ses ex partenaires, à qui elle doit une vingtaine de milliards de francs CFA.

Morin Yamongbè

Fasozine

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