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BONNE GOUVERNANCE : La révolution copernicienne de ADO

Publié le jeudi 11 août 2011 à 01h46min

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Alassane Ouattara a ses 10 commandements. Sans être Moïse, il ne demeure pas moins une sorte de prophète de la bonne gouvernance. En tout cas, la Charte d’éthique du gouvernement en 10 points, qu’il vient de faire signer à ses ministres, est le bréviaire moral de l’équipe de Guillaume Soro. Le président ivoirien veut faire passer plusieurs messages à travers cette quasi-prestation de serment gouvernementale.

Le premier signal fort donné, c’est de montrer que la rigueur qui se veut la marque du nouveau pouvoir doit provenir du sommet. Les en-haut-de-en-haut, comme on appelle l’élite dirigeante sur les bords de la lagune Ebrié, sont appelés à donner l’exemple. Le reste, à savoir l’ensemble des agents de la Fonction publique, est dès lors gérable. C’est à une véritable révolution des mentalités que ADO invite les Ivoiriens. Il a mis encore plus haut la barre des exigences en matière de gestion des deniers publics. Avec lui, la bonne vieille lettre de mission est devenue obsolète.

Croyant bien faire, avant lui, certains avaient imaginé la déclaration publique des biens des ministres, comme garde-fou à l’enrichissement illicite. D’autres, comme au Niger, ont institué l’enquête de moralité. Tout cela, c’est bien beau. Mais un texte écrit au bas duquel chaque ministre appose sa signature et prend l’engagement devant le chef de l’Etat et le peuple de le respecter, ce n’était pas arrivé souvent sur le continent. Certes, on pourra toujours rétorquer que le phénomène de la corruption et du détournement est si ancré dans les mœurs ivoiriennes qu’il serait naïf de croire en l’application stricte de la Charte d’éthique. Car en Afrique, être ministre, pour beaucoup, c’est comme diriger une PME dont on use et abuse des usufruits, sans avoir de comptes à rendre.

Cette habitude de l’enrichissement illicite sera sans doute difficile à extirper de la conscience collective. Mais au moins, ADO dispose d’un instrument qui lui sert de boussole. Aucun ministre ne pourra dire un jour qu’il n’était pas au courant. Bien sûr, il faudra tout de même au chef de l’Etat allier à cette vigilance personnelle, d’autres outils de contrôle de l’action gouvernementale dans un Etat de droit comme le Parlement, les institutions de contrôle des finances publiques, les médias, la société civile, etc. La lutte contre la mal gouvernance est donc transversale en raison de la complexité du phénomène. C’est pourquoi d’ailleurs, cette Charte d’éthique doit s’étendre à d’autres pôles du pouvoir, en particulier l’armée. Le pays en a besoin. La parenthèse de sang et de larmes, ouverte par Laurent Gbagbo, ne se refermera entièrement qu’avec une réconciliation entre le politique et son peuple.

En principe, une telle batterie de précautions n’est pas nécessaire dans un Etat où toutes les institutions jouent leur rôle. Mais on est en Afrique et de surcroît dans un pays en convalescence. Rien n’est donc de trop pour réfréner les appétits gloutons des uns et des autres. Alassane Ouattara ne doit pour autant pas dormir sur ses lauriers, croyant que la charte règlera tous les problèmes. Il s’est donné plutôt un supplément de responsabilité : être le premier à croire en sa révolution copernicienne et veiller à ne jamais trahir ce serment pris par son équipe.

Mahorou KANAZOE

Le Pays

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