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MADAGASCAR : Fin tragique d’une success story tropicale

Publié le mercredi 18 mars 2009 à 01h39min

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La pression était devenue trop forte. Et comme un guerrier jetant ses dernières énergies dans une bataille, le président malgache avait tout fait pour résister à l’étau qui l’enserrait. Sa dernière carte, axée sur la conciliation, n’a pas réussi à le préserver de la chute. Marc Ravalomanana avait en effet proposé d’organiser un référendum sur le destin du pays. Mais son projet fut balayé du revers de la main par ses adversaires.

En désespoir de cause, il a finalement accepté de lâcher prise, mais en remettant le pouvoir à l’Armée, quitte à elle d’organiser des assises nationales. Une façon de partir en donnant l’impression d’avoir géré sa succession, tout en évitant que le pouvoir ne tombe entre les mains de celui par qui tous ses malheurs sont arrivés. Car on sentait que le président, assiégé de toutes parts, vouloir partir, mais avec une certaine dignité. Son ennemi intime, Andry Rajoelina, n’est pas prêt à lui faire ce cadeau. Il livre une bataille sourde avec l’Armée, pour contrôler la suite du processus. Ravalomanana part donc comme il est venu. C’est le dénouement tragique d’une success story tropicale. Mais le drame malgache est-il pour autant un triste souvenir ?

La Grande Ile se remettra, pour sûr, difficilement de sa longue crise. On ne sort pas indemne d’un tel chaos. D’abord parce que le successeur potentiel de Ravalomanana lui ressemble trait pour trait. Golden boy assoiffé, dit-il, de justice pour son peuple, mais en réalité intéressé par le pouvoir, il n’inspire pas confiance. S’il prenait les destinées de Madagascar, TGV serait donc en quelque sorte une continuité de Ravalomanana. Mais il a un boulet à son pied, c’est son mode d’accession au pouvoir. Aussi légitime soit-elle, sa lutte demeure cependant irrémédiablement ternie par son caractère anti-démocratique. Comment diriger alors un pays convenablement quand on est parvenu au sommet de l’Etat par des méthodes aux antipodes de la dévolution démocratique du pouvoir ? Troisième crainte pour l’avenir de Madagascar, c’est le retour de l’armée sur la scène politique.

Tout régime civil devrait désormais composer avec les généraux, ragaillardis par leur expédition victorieuse contre un président élu. La Grande Ile, comme bien des pays africains, devra donc apprendre à vivre sous la férule discrète ou bruyante de l’armée. Et surtout, les Malgaches auront la hantise du putsch parce que cela a pu se produire sans difficulté. Abandonnés à eux-mêmes au cours de ces longues semaines difficiles, ils n’ont jamais vu s’exercer une influence quelconque de la communauté africaine (l’Union africaine) et internationale (OIF, UE, ONU) dans la crise. Ces organisations n’ont été d’aucun secours à la démocratie malgache. Quel crédit auront-elles désormais dans la gestion de l’après-crise ? Au total, c’est à une remise en cause profonde du système démocratique malgache, que les uns et les autres sont invités. Les expériences ratées, de Didier Ratsiraka à Marc Ravalomanana, devront servir de socle pour un nouveau départ.

Par Mahorou KANAZOE

Le Pays

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