Parfois, on a l’impression que les choses vont enfin mieux aller surtout avec tous les efforts déployés sur le plan national et international pour ramener les frères ennemis à la raison, et que les Ivoiriens vont retrouver la quiétude si nécessaire au développement de leur pays et à la stabilité de la région.

Mais, aussitôt après, c’est un formidable coup de pied qui est donné dans cet édifice fissuré que les uns et les autres peinent à rafistoler. C’est pourquoi rien ne nous étonne lorsque, il y a deux jours, les autorités de ce pays ont annoncé au monde entier qu’un coup d’Etat visant à éliminer le chef de l’Etat et le chef d’état-major de l’armée était en préparation.

Tentative ou pas, la question est assez sérieuse pour qu’on s’y attarde quelque peu. On pourrait croire en cette tentative si elle constituait un fait sans précédent dans ce pays. En effet, ce n’est pas la première fois que de telles tentatives de destabilisations sont annoncées avec battage médiatique, et très souvent, à l’approche de certaines échéances.

En effet, dans quelques mois, le 31 octobre 2007 plus précisément, le président Laurent Gbagbo devrait endosser le costume de candidat à la magistrature suprême avec tous les autres aspirants. La compétition, si elle a lieu, sera bien évidemment rude pour le président sortant. Alors, lorsque l’on sait que ce dernier aurait dû quitter le pouvoir depuis fin octobre dernier, on peut aisément comprendre qu’il s’emploie à torpiller toute initiative de reconstruction de la paix en Côte d’Ivoire et choisisse de préparer son coup d’Etat pour mieux s’enfoncer dans son fauteuil.

A qui profite un coup d’Etat en ce moment en Côte d’Ivoire ? Sûrement pas au peuple ivoirien traumatisé par le bruit des bottes et le sifflement strident des balles aveugles. Sûrement pas au citoyen lambda fatigué de vivre, la peur au ventre, dans un présent inquiétant, hanté par le spectre d’un avenir hypothétique.

Sûrement pas à ces hommes, femmes et enfants fatigués de voir leur pays aller mal, coupé en deux parties jusque-là irréconciliables, et exploité sans vergogne par des assoiffés de pouvoir. Sûrement pas à ces victimes de dirigeants incapables de ranger un tant soit peu leurs ambitions personnelles démesurées au placard et placer au centre de leurs préoccupations le destin de leur peuple.

Mais hélàs, l’histoire nous enseigne que parfois, pour rétablir la justice, remettre un pays sur les rails du développement et de la paix, il a été nécessaire de recourir à la méthode forte. La Mauritanie qui l’a exprimentée en août 2005, ne s’en porte pas plus mal. Bien au contraire.

Troublante coïncidence donc que l’évocation d’un coup d’Etat corresponde à un moment capital où des mesures étaient en train d’être prises pour relancer les audiences foraines en vue des prochaines élections. N’est-ce pas en réalité un faux complot destiné à préparer et à justifier certaines mesures de répression, à chasser ou à arrêter des opposants ? Mais aussi à exacerber le nationalisme du peuple ivoirien, le dresser contre la France accusée d’être la cause de tous leurs malheurs ?

A mieux préparer l’opinion internationale si le 31 octobre prochain, rien ne se passait exactement comme prévu ? Cette énième "tentative de coup d’Etat" pourrait s’avérer en réalité un tour de passe-passe pour régler des comptes avec l’extérieur, mais aussi en interne, surtout que le Premier ministre ivoirien est traité de valet de la France.

Tout ceci pourrait donc être prémédité, savamment orchestré et, tant que cette situation intenable qui prévaut en Eburnie n’évoluera pas positivement, il n’est pas exclu que de vrais faux coups d’Etat continuent d’alimenter l’actualité en Côte d’Ivoire.

Le Pays