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Système “D” : Le granit du pain quotidien à la carrière de Boulmiougou

Publié le vendredi 12 mai 2006 à 07h28min

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Entre fumée, odeur, coups de marteau, des affaires se font autour de la carrière du secteur n°18, derrière le siège de la SONABHY, arrondissement de Boulmiougou.

Plus de 2000 personnes, (hommes, femmes et enfants) s’affairent quotidiennement dans le ravin, sous des hangars de fortune ou à l’entrée du site à côté de tas de gravier. En réalité, la position géographique de chacun détermine son statut : ils sont concasseurs, détaillants, grossistes. Ils poursuivent le même objectif : la lutte pour la survie. Ils ont une « chance », la matière première est gratuite, disponible à ciel ouvert.

Le capital c’est la force physique, l’abnégation, l’ingéniosité. Pour cette première catégorie d’exploitants, c’est l’endurance qui paie. Elle est constituée de femmes et de jeunes ne possédant pas de fonds de commerce et qui sont dans un besoin immédiat. Très tôt le matin, ils prennent d’assaut le site. c’est un travail à la chaîne qui commence. Solidaires, ils ont trouvé des formules qui permettent à chacun de trouver son compte.

Des blocs de granit, précédemment enveloppés de vieux pneus enflammés et couverts de boue, attendent d’être concassés selon Souley Porgo. Sous l’effet du feu, ils deviennent moins durs. Des jeunes vigoureux les concassent en grosses plaques revendues à 2000 F la charrettée généralement aux femmes. Un charretier transporte hors du ravin à 250 F le chargement. Les plaques sont ensuite réduites en morceaux intermédiaires par des hommes, moyennant 600 F la charretée.

C’est là que commence le travail des femmes. Elles les mettent en menus morceaux. Ce résidu est passé au tamis et le sable fin recueilli se vend à 250 et 300 F l’assiéttée (unité de mesure convenue). Selon Mme Mariam Sawadogo, exploitante, ce sable s’écoule rapidement sur le marché et permet de faire face aux dépenses quotidiennes. Quant au gravier lui-même, il coûte actuellement 1000 F la brouettée. Lorsque les femmes n’ont pas les moyens de se procurer les plaques du granite, un arrangement est conclu avec les concasseurs.

Les plaques sont cédées aux femmes pour être cassée. En retour, elle doivent partager les menus morceaux obtenus avec les concasseurs. Il existe également sur le site, des exploitants qui possèdent des blocs de granite mais qui n’ont pas les moyens physiques pour les concasser en plaques. Ils s’entendent alors avec un concasseur qui va débiter les plaques et ils procèdent par la suite à un partage équitable du produit obtenu. Les grossistes, installés aux abords de la voie, achètent quotidiennement le gravier qu’ils revendent aux entrepreneurs. Le prix varie désormais en fonction de la taille du produit. Le sable vaut 80 000 F le chargement, le 5-15 à 75 000 F, le 15-25 à 65 000 F et le 1 à 60 000 F. Les plaques utiliséés à des fins ornementales sont les plus chères : 100 000 F le chargement. Elles sont plus difficiles à extraire.

Avec l’affluence, d’autres activités commerciales prospèrent sur le site : le transport, la restauration, la coiffure, les démarcheurs... Selon M. Edouard Sawadogo, responsable de la cellule sociale, le travail est pénible. C’est un combat pour la survie, une lutte acharnée contre la pauvreté. La survie a un prix et gagner dignement sa vie est leur leitmotiv.

Accès libre au site

L’accès au site est ouvert à tout le monde. « N’importe qui peut venir s’installer ici pour exploiter la carrière », a affirmé le représentant des exploitants, Edouard Sawadogo. Il suffit pour la personne de connaître quelqu’un sur le site qui accepte la prendre sous sa coupe pour l’initier au travail. Généralement, poursuit M. Sawadogo, ce sont les personnes déshéritées, sans ressources financières, notamment les femmes, qui viennent demander à travailler ici. Il y a actuellement sur le site, des rapatriés de la Côte d’Ivoire qui y trouvent eux aussi leur pitance. Les exploitants de la carrière du secteur n°18 ne sont pas organisés en association. Ils ont mis en place une structure sociale qui s’occupe de la mobilisation et de l’information en cas d’événement heureux ou malheureux.

Les exploitants émettent le souhait de s’organiser en association, mais ils craignent d’être soumis à des taxes sur le peu qu’ils gagnent. Le site, situé sur le terrain du camp militaire Sangoulé Lamizana, permet aux exploitants, de bénéficier de la protection des militaires.

A. BADOH,
Gladys OUEDRAOGO

Sidwaya

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