Procès dit Charbon fin : "Il y aurait eu des dessous de tables pour que IAMGOLD Essakane SA puisse exporter plus que ce qu’elle a déclaré", insinue M. Nana
L’audience du procès dit "Charbon fin" a repris ce, jeudi 30 novembre 2023, au tribunal de grande instance (TGI) Ouaga1 par la suite de la présentation de l’expert douanier, Aimé Nana.
M. Nana a fait savoir lors de sa présentation que la motivation pour laquelle IAMGOLD Essakane SA a eu l’autorisation d’exportation du charbon fin est de financer la construction d’une usine de traitement de charbon fin au Burkina Faso.
Cependant, le poids de l’exportation du charbon fin déclaré par la société minière est passé de 223t à près de 300t. "Nous n’avons pas vu de documents qui montrent que Essakane SA a fait la demande d’exporter plus que ce qu’elle avait demandé", fait savoir l’expert douanier et de confirmer : " l’autorisation d’exportation, dont le coût était estimé à près d’un milliard de francs CFA a permis effectivement de mettre en place l’usine en juin 2016. Mais il se trouve que Essakane SA a continué d’exporter le charbon fin".
Il poursuit en faisant observer qu’un milliard d’investissements n’est rien pour Essakane SA. Elle n’avait donc pas besoin d’exporter du charbon fin pour financer l’implantation de cette usine.
Pour la directrice pays de IAMGOLD Essakane SA, Mme Blandine Kaboré, effectivement nous avons demandé à exporter la moitié de plus de 400t. "Entre juin 2015 et septembre 2016, la quantité que nous avons communiquée au ministère a effectivement évolué. Nous l’avons signifié au ministère pour lequel on a eu l’autorisation. Les documents sont là", précise-t-elle.
"Quand il dit qu’on a évoqué le motif de la mise en place de l’incinération pour exporter, il ne mentionne pas des dividendes pour l’État du Burkina Faso, puisqu’elles font partie de nos ventes annuelles. Il y a tout le traitement fiscal, le traitement des salaires des employés, etc.", relève-t-elle comme deuxième observation.
Elle soutient aussi que même le surplus qui a été exporté IAMGOLD Essakane SA a reçu l’autorisation d’exporter. D’après Mme Kaboré, il n’y a pas de différence entre ce qu’on a déclaré et ce qu’on a exporté.
Me Coulibaly, conseil de la défense, soutient sans surprise les propos de la directrice pays de IAMGOLD Essakane SA. Elle ajoute que la société minière a bel et bien obtenu une autorisation d’exportation d’une quantité et au moment de l’exportation, elle a reçu l’autorisation de la quantité qu’elle a exportée. "Où est la fraude ? On nous accuse de fraude, moi je veux qu’on nous démontre à quel niveau il y a eu fraude", lance-t-elle.
M. Nana a dans ses propos, insinué des dessous de tables qui ont permis a IAMGOLD Essakane SA d’exporter plus qu’elle n’a exporté. A cette insinuation, Me Yanogo s’est indigné. "Ce qu’il a dit est très grave. Est-ce qu’il a les preuves de ce qu’il dit ? Nous n’allons pas laisser cela passer et nous donnerons une suite à cela", informe Me Yanogo.
L’avocat de l’État, Me André Ouédraogo, pour sa part, précise que jusqu’à preuve du contraire, il n’y a pas de base légale d’exportation du charbon fin. C’est un épiphénomène. Ce que nous on veut savoir, c’est à quel moment, le ministre a donné l’autorisation spéciale d’exporter plus que ce que Essakane SA a déclaré exporter quoi que cette autorisation n’est pas légale. Parce que, dit-il, l’autorisation spéciale du directeur général des Mines n’est pas valable sauf si celui-ci a reçu un agrément du ministre.
Et le parquet d’ajouter :
"Ce n’est pas parce qu’une autorisation quelconque a été donnée par une autorité que le débat ne peut pas se poser ici. Le juge pénal a la plénitude des prérogatives pour apprécier la légalité des décisions administratives".
La directrice pays de IAMGOLD Essakane se dit embêtée, même si elle promet de les reverser au tribunal, que l’État lui demande aujourd’hui de fournir des documents qui ont permis à IAMGOLD Essakane SA d’exporter du charbon fin.
À cette déclaration, le parquet précise que les intérêts de L’État peuvent différer d’un instant T à un autre. "Comprenez que les intérêts de L’État doivent être prévalus pour satisfaire l’intérêt général. Ne soyez pas étonné qu’on revienne sur la légalité des actes posés. "Moi je suis embêté que vous soyez embêté. Vous qui êtes exploitant d’or, vous êtes censé savoir que vous ne pouvez pas exporter du charbon fin. L’autorité en question peut être poursuivie, de même que vous", ajoute le parquet.
Me Yanogo revient à la charge : "Pourquoi l’État lui-même vient nous demander des preuves. Pourquoi les autorités avec qui le processus d’exportation a été fait ne sont pas inquiétées. Je dit, jusqu’à preuve du contraire, l’exportation du charbon fin est légale au Burkina Faso. Il y a des bases juridiques pour cela".
L’audience se poursuit...
Obissa Juste Mien
Lefas.net