Actualités :: Présidentielle 2005 : Le silence olympien de Blaise Compaoré

Depuis son investiture le 19 juin dernier, en qualité de candidat du CDP à l’élection présidentielle de novembre 2005, Blaise Compaoré continue de garder un silence olympien sur ses vraies intentions. C’est vrai qu’il a été investi, si l’on peut se permettre cette expression, par contumace. En son temps, nous avions affirmé que la morale politique, s’il en existe, aurait voulu qu’il fût présent à cette grand-messe.

Certes, on ne saurait dire que le chef de l’Etat a été désigné à son corps défendant pour solliciter un autre mandat, sans avoir préalablement été consulté. Si tel était le cas, il faudrait reconnaître que ce rituel d’investiture ressemble à l’image que nous restituaient les anciennes républiques d’Europe de l’Est où les candidats, invariablement, se succédaient à eux-mêmes à l’issue de votes mécaniques.

Ou encore, plus près de nous, à l’image de ces grands timoniers africains qui se faisaient "prier" pour accéder aux supplications des citoyens qui exprimaient leur deuil de les voir quitter le pouvoir. Il est un fait que Blaise Compaoré aime cultiver le secret, ce qui lui a jusqu’à présent réussi. Peut-être reste-t-il attaché à cette tradition africaine qui voudrait que le chef soit moins bavard en donnant procuration à d’autres voix pour s’exprimer à sa place.

Sur ce point, Blaise Compaoré est bien servi par une garde rapprochée pléthorique, au spontanéisme débridé et qui n’attend même pas d’être légalement reconnue pour envahir les espaces de débats politiques en créant des structures informelles de soutien à sa candidature. Mais nous sommes en République, et comme telle, elle a ses exigences. Sans être dans le secret du CDP, on imagine l’impatience des militants du parti d’entendre de vive voix, le candidat de leur choix.

Il en est de même pour les autres citoyens qui, sans être forcément militants d’un parti, aimeraient être fixés.
En se montrant si détaché après le congrès, Blaise Compaoré veut-il signifier à ceux qui ont soif de l’entendre, qu’il n’est pas l’otage du CDP ? Cependant, le thème même du congrès d’investiture, "bilan du septennat", signifie que le CDP a été le bras séculier du président durant son mandat et que ce dernier n’aurait pas réussi son magistère sans lui.

Blaise Compaoré veut-il montrer qu’il est le président de tous les Burkinabè, au-dessus de la mêlée, se gardant de s’enfermer dans un carcan ? En fait, il est bien placé pour savoir que toutes ces nébuleuses qui soutiennent sa candidature ne sont pas forcément des militants du CDP. Nul ne conteste la puissance d’attraction du CDP, ni ses capacités d’allécher l’électorat. Cependant, ce parti peut être victime de son gigantisme et qu’on le veuille ou non, l’usure du pouvoir aidant, il ne peut à lui seul, venir à bout de certaines déceptions. Et ce ne sont pas les déceptions, malgré les hymnes à l’allégresse que brandit le CDP, qui manquent.

Même si l’opposition ne sait pas toujours saisir les opportunités pour tenter de combattre le CDP sur son propre terrain. Blaise Compaoré s’accorde-t-il un temps de réflexion pour être à l’écoute de tous ceux qui, se réclamant ou pas de lui, militants ou citoyens simples, pourraient constituer une valeur-refuge sûre au moment du scrutin ? Se réserve-t-il le droit de décliner l’offre généreuse du CDP de porter les couleurs du parti ? Le pourrait-il ? Cette éventualité relève peut-être de la politique fiction.

Mais la politique réserve parfois des surprises et sur ce point, on ne peut jurer de rien ? Juridiquement en tout cas, il peut accepter ou refuser cette offre, selon la tournure que prendront les événements. Il n’est pas évident qu’une candidature indépendante soit forcément fatale à Blaise Compaoré. Après plusieurs années de compagnonnage avec le CDP, Blaise Compaoré est-il lassé de l’épreuve d’un mariage qui n’a pas forcément réussi dans tous les domaines ? Caresse-t-il le secret désir de divorcer et de se laisser tenter par l’aventure de la candidature indépendante, comme Amadou Toumani Touré au Mali ?

Si l’article 123 du code électoral interdit les candidatures indépendantes au plan local, sur le plan national, notamment en ce qui concerne l’élection présidentielle, cette interdiction n’est pas de mise. L’on peut se demander aussi si le silence du chef de l’Etat, alors que les débats font rage autour de la Constitution, n’est pas destiné à lancer des ballons de sonde en direction des regards de l’extérieur ?

A un moment où à travers le monde, société civile, organisations de défense des droits de l’homme et de la démocratie, chancelleries occidentales et certains bailleurs de fonds s’élèvent contre ceux qui squattent les constitutions, Blaise Compaoré voudrait-il être attentif à ce regard extérieur avant de se déterminer ?

A ceux qui le soutiennent de savoir ruminer leur impatience. A l’inverse, l’on peut se demander si le CDP a une solution de rechange au cas où son candidat leur faussait compagnie. Un CDP sans Blaise Compaoré ne va-t-il pas s’écrouler comme un château de cartes ? L’avenir nous donnera certainement des réponses à toutes ces questions. En tous les cas, le Conseil constitutionnel chargé de se prononcer sur la constitutionnalité des candidatures ne tardera pas, le temps venu, d’éclairer notre lanterne.

Le Pays

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