Actualités :: Accession à l’Indépendance du Burkina : 54e après, les jeunes ont des regards (...)

Le 5 août 1960, la Haute-Volta, aujourd’hui, Burkina Faso, proclamait son accession à l’Indépendance sous le slogan « vive l’indépendance ! ». Une nouvelle ère venait de s’ouvrir pour le pays avec, en sus, la « liberté de pensée et d’actions ». En clair, cela signifie qu’à partir de cette date, les Burkinabè doivent se prendre en charge ; tout penser et tout construire (économiquement, financièrement, militairement, politiquement, etc.). Cela voudrait aussi dire que le pays et ses habitants doivent se porter encore plus mieux. Plus d’un demi-siècle après, quels regards les Burkinabè dans leur ensemble, les jeunes en particulier, ont de l’indépendance qui, à la proclamation, a suscité enthousiasme et espoir ? Analyses de jeunes burkinabè dans la capitale, en cette journée commémorative …

Aimé Ouédraogo : « Il nous appartient de travailler à nous libérer du joug colonial »

L’indépendance demeure, jusqu’à ce jour, formelle. Car, si sur le papier on est indépendant, ce n’est pas le cas dans la réalité. Un pays qui, chaque année, doit faire recours à l’extérieur pour le financement de son budget ne peut pas s’affirmer réellement indépendant. Et puis, la plupart des décisions politiques sont prises en fonction de la Métropole. Sur le plan de la production alimentaire, le Burkina continue toujours d’importer qu’il en exporte. On ne peut donc pas dire qu’on est indépendant. L’indépendance est donc donnée sur papier mais sur le terrain, il nous appartient de travailler à nous libérer du joug colonial. Jusqu’à ce jour, on traîne toujours les pas et l’Occident continue toujours à imprimer sa domination. Seulement, la domination a changé de forme ; on utilise des Burkinabè eux-mêmes pour assujettir des Burkinabè. L’indépendance reste donc à conquérir davantage, en éduquant la population ; lui faire comprendre que la vraie indépendance passe par le travail.

Robert Ringawendé : « C’est d’abord au niveau individuel »

Elle est simplement formelle au Burkina. Elle ne nous permet pas de nous réaliser. Parce que, lorsqu’on dit qu’un pays est indépendant, il doit être capable d’assumer certaines tâches. Même sans l’autonomie financière, on doit avoir l’autonomie de nos décisions. Actuellement où nous parlons, les Présidents africains sont aux Etats-Unis autour du Président américain. Cela montre, si besoin est encore, notre dépendance ; ce sont des signes que nous ne sommes pas indépendants. Si les pays africains étaient indépendants, ils n’auraient pas eu besoin de se lever pour y aller trouver des voies de la bonne marche de leur pays ; ils devraient être à mesure de prendre de grandes décisions à partir du continent. Les décisions politiques viennent d’ailleurs et même les discours importants sont dictés et suivis par le colonisateur. Il faut donc travailler à éduquer le peuple et lui faire savoir que c’est l’effort qui doit payer. Il faut le sensibiliser à s’auto prendre en charge et ne pas tout attendre de l’extérieur et de l’Etat. L’indépendance, c’est d’abord au niveau individuel. Si chacun arrive à s’auto suffire et à ne pas compter sur l’extérieur ou l’Etat, vous verrez que notre indépendance va être réelle.

Jean-Baptiste, étudiant : « Notre dépendance est palpable »

Pendant la proclamation des Indépendances, les Africains étaient contents. Ils ne savaient pas que cela allait être un ‘’folklore’’. Aujourd’hui, notre dépendance est palpable. Sur le plan économique, l’Afrique ne peut pas décoller, parce que les pays colonisateurs n’ont pas travaillé à créer les conditions même d’une Afrique véritablement indépendante. Ils ont fait de sorte à construire de véritables industries hors du continent, soumettant, du coup, les pays africains à une dépendance économique. Sur le plan politique, les décisions viennent toujours de la Métropole. Puisqu’aucun président ne peut accéder au pouvoir tant qu’il n’a pas l’aval de la Métropole. Et ce, en dépit du choix du peuple concerné. Donc, l’indépendance n’est qu’un leurre, jusqu’à ce jour.

Marie Ouédraogo, étudiante : « C’est l’occident qui finance nos élections »

Prenons simplement l’aspect des élections ; vous constaterez que l’Occident a toujours une influence sur les élections qui sont organisées sur le continent. C’est l’occident qui finance nos élections et nos budgets. Sur le plan de l’exploitation minière, on dit que le Burkina est un grand producteur d’or mais on ne voit pas les retombées. Les sociétés occidentales viennent exploiter et imposent leurs conditions aux dirigeants. Donc, les ressources que nous avons sous notre sous-sol et notre sol ne nous appartiennent même pas, puisqu’elles servent de richesses à l’Occident.

Fabrice Bako, étudiant en Anglais : « Toujours obligés de tendre la main à l’extérieur »

De mon point de vue, l’indépendance n’est pas une réalité. Je vous prends un exemple simple : aujourd’hui, c’est une date importante dans l’histoire de notre pays. Mais, depuis le matin, quand j’observe les gens, je constate qu’il n’y a rien d’exceptionnel. Chacun vaque à ses occupations et le 5 août ne semble intéresser personne. La commémoration semble ne pas être ancrée dans les mœurs. Or, c’est avant-tout un acte patriotique, je me dis. On peut mettre cette ‘’morosité’’ sur le fait que la fête elle-même a été ramenée au 11 décembre. Qu’à cela ne tienne, aujourd’hui, symboliquement, on devrait sentir la date. Notre indépendance n’est qu’un leurre, en ce sens que nous sommes toujours obligés de tendre la main à l’extérieur pour toutes nos initiatives ; même pour construire un goudron de 2 mètres. On dit aussi que le Burkina est un grand producteur d’or mais on ne voit pas les résultats, tout simplement parce que ce sont les sociétés occidentales qui exploitent et font une mainmise sur nos ressources. Résultat ? Ces sociétés ne nous laissent que des miettes. C’est vrai qu’on a un Président qui nous dirige mais a-t-il vraiment les mains libres pour diriger comme il le faut ? Il reste encore beaucoup à faire.

Mohamed Saré : « Les Burkinabè considèrent cette journée comme tous les autres »

Il n’y a pas eu de changement. Dans les normes, aujourd’hui, tout Burkinabè devait rester à la maison pour suivre la télévision ou célébrer un peu la date pour marquer l’indépendance. Mais on constate que les Burkinabè considèrent cette journée comme tous les autres. Dans certains pays, lorsqu’on dit indépendance, les populations célèbrent, chacun à sa manière. Parce qu’indépendance veut dire liberté individuelle. Tout Burkinabè devait se vêtir aujourd’hui des couleurs nationales. Je ne sais pas si ce sont les autorités qui ne mettent pas l’accent pour sensibiliser les populations mais je pense qu’avant la célébration, il devait y avoir des publicités dans la presse, à la télé et pour rappeler aux populations que nous sommes à l’approche d’une grande date. Ce sont des Burkinabè qui ont bataillé dur pour obtenir cette indépendance et il faut faire en sorte qu’elle soit une date qui apporte quelque chose au pays. Mais hélas, jusque-là, ce n’est pas le cas. L’indépendance n’existe pas. Sur plusieurs plans, cela se vit. Je prends l’exemple du crash d’Air Algérie survenu le 24 juillet dernier (paix à l’âme des disparus). Je ne sais pas si ce sont les militaires burkinabè qui ont fait la découverte de l’épave, mais vers la fin on a vu que l’affaire a été confiée aux Français qui ont même envoyé des experts sur le terrain pour faire des analyses et ramener des éléments en Europe, etc. Encore, on nous dit qu’on est indépendant alors qu’ils ont toujours des bases militaires chez nous ; cela veut dire quoi ? Aussi, je constate que lorsqu’un président est élu dans un pays de l’Afrique francophone, il doit toujours se rendre à l’Elysée. Pourquoi même ? Je ne comprends pas pourquoi il doit se rendre là-bas. Il va faire quoi là-bas ? Ils n’ont qu’à laisser nos présidents nous diriger. La Patrie ou la mort, nous vaincrons !

Jean Michel Tion, étudiant en droit : « Nous devons regarder les autres fêter leur indépendance »

Indépendance. Notre indépendance. Dans notre dictionnaire, le mot « indépendance » ne devrait pas exister. Qui dit indépendance implique indépendances économique, politique, sociale etc. Or, avec ce qu’on voit de nos jours dans nos pays, surtout dans les pays dit francophones, nous ne sommes vraiment pas indépendants. Normalement, nous devons regarder les autres fêter leur indépendance et nous, à côté, en train de constater les faits, parce que nous ne sommes pas indépendants. L’indépendance ne s’obtient pas en étant couché sur un canapé. Or, nous avons acquis notre indépendance sur un canapé. L’indépendance s’acquiert de force en étant indépendant économiquement. Aujourd’hui, nous citons avec plaisir les pays asiatiques comme modèles de développement. Mais on oublie qu’ils ont arraché leur indépendance. A partir du moment où nous n’avons pas arraché la nôtre, nous ne devons pas, normalement, décréter le 5 août comme chômé ; on devrait prendre ce jour pour encore travailler plus pour acquérir l’indépendance qu’il nous faut.

Réalisé par Oumar L. OUEDRAOGO

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