- Joseph Ki-Zerbo
Lentement mais sûrement, les dinosaures de la scène politique nationale prennent leur retraite, du moins, certains d’entre eux, et ce, après presque plus d’un demi-siècle de joutes oratoires et de promesses électorales.
Ainsi donc après le Duc du Yatenga, le truculent Gérard Kango Ouédraogo, qui s’est retiré en prenant soin de placer sur bonne orbite son fils Gilbert, voici sonnée l’heure du Pr Ki-Zerbo qui, après un retrait des instances du parti qu’il créa et dirigea jusqu’alors, le PDP/PS, fait valoir ses droits à la retraite...politique.
Après avoir légué la Présidence du PDP à cet autre "professeur", Ali Lankoandé celui-là, le voilà "sortant" de l’Assemblée pour ne pas dire tout simplement de la scène politique. Avec le départ à la retraite d’un certain G.K.O. et de Ki-Zerbo, c’est le verbe, les joutes oratoires, qui vont aussi nous manquer, car, quoi qu’on dise, ces politiques d’avant avaient le verve et le sens de la formule.
Pendant que l’ami personnel de Bersany était tout à fait dans son élément quand il s’agissait d’électriser, de chauffer à blanc les militants lors des meetings, lui, Ki-Zerbo, avec son débit lent, presque chantonnant, excellait dans les jeux de mots et les formules chocs. Et l’on se souvient, d’ailleurs, comme hier, que lors de son départ de la tête du PDP/PS, il n’avait pas hésité à se qualifier de "Président sorti" et non sortant, car, effectivement, nuance il y avait en son temps. Preuve que le vieux prof n’était aucunement prêt à abandonner de bon cœur le navire battant pavillon PDP/PS.
Mais, pourquoi Ki-Zerbo laisse-t-il le siège à son suppléant, Etienne Traoré, à seulement quelque huit mois de la fin de la législature ? Difficile d’y trouver une réponse toute faite si l’on sait que depuis la moitié de la législature, bien d’observateurs avisés du landerneau politique s’étaient fourvoyés à ce sujet en pronostiquant en vain cette probable démission de l’Assemblée. Même Etienne Traoré, après maints appels du pied, s’était rendu à l’évidence que le vieux n’entendait pas lâcher son morceau. Et beaucoup estiment que le départ du célèbre historien de l’Assemblée a été dicté par son fragile état de santé.
En effet, à plus de 85 ans, avec en sus une intense activité intellectuelle et politique, Ki-Zerbo n’en peut vraiment plus. D’ailleurs, depuis un certain temps, il était plus absent que présent à l’Hémicycle et dans les débats parlementaires. Mais, cela n’enlève rien à son mérite de partir ainsi, car on en connaît qui sont pires que des carpes à l’Hémicycle, n’y apportant presque rien en termes de débats et qui, même grabataires, s’y se seraient faits transporter... pour émarger.
Et le départ de Ki-Zerbo de l’Assemblée a cela de salvateur qu’il permet à une "grande gueule" d’apporter du sang neuf en termes de débats parlementaires. En effet, qu’on l’aime ou pas, Etienne Traoré, enseignant de philosophie politique à l’université de Ouagadougou, reste un débatteur hors pair qui pourra, sans conteste, apporter sa touche à cette Assemblée où le "commerce d’idées" avait sérieusement décliné. Ainsi investi, notre nouveau député pourrait conséquemment contribuer à réveiller le PDP/PS, qui ne finit pas de sombrer dans les profondeurs du classement des formations politiques qui comptent... pour un sursaut démocratique au Burkina.
Rabi Mitibkèta
Observateur Paalga
