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Municipalités du Burkina : Une gouvernance du porte-monnaie

Publié le mardi 26 avril 2005 à 06h49min

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La mairie de Ouagadougou vient d’instaurer des zones de collecte des déchets solides ménagers dont le marché est attribué à des entreprises dûment agréées. Cette réorganisation, selon les autorités municipales, procède de la mise en oeuvre du schéma directeur de gestion des déchets. En d’autres termes, il s’agit de mieux organiser ce secteur qui prend de plus en plus de l’importance, en raison du volume de déchets que la ville produit chaque jour.

Mais la formule est-elle la meilleure ? Visiblement, l’ordre que veut instaurer la mairie pourrait faire des laissés-pour-compte, à savoir ces femmes et jeunes, organisés dans des associations ou non, qui étaient sur le front de la collecte depuis belle lurette. C’est à eux que les habitants, à défaut de voir la voirie faire son travail, ont toujours confié le ramassage de leurs ordures ménagères. Et cela se passe très bien, tant que chaque partie respecte son contrat.

C’est dire à quel point ce secteur fut porté par des pionniers, avant que, devenu juteux, il ne soit lorgné par des groupes d’intérêts puissants. Alors, se pose la survie des petites gens qui gagnaient leur pain à jouer les éboueurs. Apparemment, ni la mairie, ni les nouveaux concessionnaires (nouveaux rois) ne les ont intégrées dans leur démarche professionnelle.

Certains ramasseurs d’ordures, pour preuve, passent de cour en cour, pour faire leurs adieux à des clients avec qui ils avaient noué des relations de proximité. Si cela n’est donc pas fait, il est important que la mairie songe aux pionniers du ramassage des déchets. Dans le cas contraire, ce sont des centaines (voire des milliers) de personnes qui se retrouveront sans emploi.
La nouvelle règlementation de la mairie ne pose pas que le problème des emplois.

Elle accentue le questionnement sur le rôle social de la mairie, et surtout de sa responsabilité dans l’évacuation des déchets de la ville. Car, à la lumière des agréments octroyés, il semble bien que la collecte des ordures soit désormais officiellement privatisée (ne serait qu’en partie).

Les concessionnaires feront payer leurs prestations aux populations et, sans doute, s’acquitteront de certaines taxes vis-à-vis de la mairie qui, en définitive, fera un triple profit : la mairie se débarrasse du ramassage des ordures devant les concessions, perçoit des taxes chez les entreprises agréées et des taxes de résidence chez les populations. Au total, elle réalise une bonne opération financière à moindres frais.

Comme si le rôle d’une entité municipale était seulement de renflouer ses caisses. Dans toutes les villes du monde, la prérogative de l’assainissement et de l’embellissement revient à l’autorité municipale qui perçoit des taxes à cette fin.

Au Burkina, on cherche plutôt à se faire de l’argent dans le secteur. Et puis, second souci des responsables municipaux, faire plaisir aux visiteurs étrangers de passage dans la capitale, en leur montrant ce qu’ils considèrent comme un succès urbanistique. Sinon, pourquoi bichonner le centre-ville (quelques kilomètres carrés) et abandonner les autres quartiers à leur sort.

On a l’impression d’une ville trop gourmande et insatiable, mais incapable de générer des ressources propres. D’où le recours à l’étranger ou aux populations à travers diverses taxes. On en veut pour preuve, le passage en force qu’ont voulu opérer les maires, en tentant d’instaurer les vignettes et les plaques communales à partir de cette année. Une tentative qui a échoué, in extremis, à l’Assemblée nationale car rejetée par les députés.

Ce fiasco devrait servir de signe d’alerte aux autorités des communes burkinabè sur leur boulimie des rentrées fiscales. A force d’élargir l’assiette des impôts et d’accentuer la pression fiscale, tout en ne développant pas le même enthousiasme à servir les populations, elles risquent de jeter le discrédit sur la gouvernance locale.

Le Pays

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