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FADA N’GOURMA : A qui profitent les infrastructures du 11-Décembre ?

Publié le vendredi 18 septembre 2009 à 04h02min

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Fada N’Gourma, capitale de la région de l’Est, a abrité, on se rappelle, les festivités nationales de la fête de l’Indépendance, le 11 décembre 2008. A cette occasion, de grands chantiers avaient été ouverts. Ce qui a abouti à la construction de plusieurs infrastructures immobilières qui étaient censées donner un coup d’accélérateur au développement de la ville. Que sont-elles devenues, 9 mois après ?

9 mois après, les routes bitumées à l’intérieur de la ville sont restées intactes. Et c’est tout Fada qui en profite. Surtout en ces temps de pluie qui courent, on se plaît à circuler sur ces bitumes fraîchement hérités du 11-Décembre 2008, sans plus craindre la boue. A quelques pas du marché central de Fada N’Gourma, la place de l’Unité spécialement aménagée pour accueillir la fête nationale, fait aujourd’hui office de principale place publique où se tiennent la plupart des cérémonies officielles.

A la sortie sud de la ville, l’aérodrome construit pour permettre l’atterrissage et le décollage des avions militaires a vu son tarmac reverdi à la faveur de la saison des pluies. Aujourd’hui, ce sont peut-être les avions qui vont hésiter à s’y aventurer. Sinon l’aérodrome de Fada N’Gourma demeure accueillant et fonctionne comme tous les aérodromes aménagés dans les villes secondaires du Burkina.

A la faveur du 11-Décembre, la circulation au niveau de 3 carrefours de la cité de Yendabili est aujourd’hui réglementée par des feux tricolores. Ces signaux qui fonctionnent toujours – en dépit de pannes répétitives – sont gérés par la commune de Fada. La mairie a aussi hérité du nouveau stade omnisports. Mais c’est un joyau qui, selon le maire Moumouni Cokti est présentement inexploitable du fait d’un problème de nivellement de la pelouse qui a besoin d’être décapée et remblayée. Des travaux, rassure l’édile de la cité, sont en cours pour refaire le rectangle vert et remettre le stade en bon état de fonctionnement pour le rayonnement du sport dans la commune.

Toujours dans le domaine de l’immobilier, la Caisse nationale de sécurité sociale avait été sollicitée par le gouvernement pour la réalisation d’une cité de 65 villas F3 et d’une auberge dans la ville de Fada N’Gourma. L’auberge du 11-Décembre, c’est son nom, située sur la route du Niger force l’admiration du passant. C’est un complexe hôtelier constitué essentiellement de 36 mini villas (doungalos), d’un restaurant bar, de bâtiments administratifs, etc. Elle a été construite par la CNSS et demeure la propriété exclusive de la Caisse qui l’a louée à un particulier, suite à un appel à concurrence. "Il s’agit d’une location-gérance" déclare Alfred Nébié, directeur régional de la CNSS/Fada, qui précise que le loyer mensuel forfaitaire de 600 000 F CFA a jusque-là été régulièrement versé à la CNSS. L’on suppose donc que l’exploitation de l’infrastructure ne souffre pas de difficultés majeures.

Le plus gros investissement dans la ville de Fada N’Gourma à l’occasion du 11-Décembre 2008 est sans doute la cité des Régions, située au secteur 6, à la sortie nord de la ville, sur la route menant à Bogandé. La cité des Régions de Fada N’Gourma est accessible par deux routes bitumées et éclairées. Chacune des 65 villas qui la constituent est du type F3, extensible en F4. Elles sont compartimentées en une chambre principale de 14 m2 avec une salle d’eau attenante de 4,42 m2 plus un dressing ; une chambre secondaire de 13,05 m2, une salle d’eau, un salon, une salle à manger, une cuisine, une terrasse, etc. Elles sont toutes équipées de chaises, de lits, de guéridons, de rideaux etc.

Comme l’Auberge du 11-Décembre, les villas de la cité des Régions appartiennent à la Caisse nationale de sécurité sociale qui a opté de les vendre à des "conditions exceptionnelles et avantageuses", selon les termes du DR de la Caisse. Les prix de cession qui correspondraient à peu près au coût de réalisation varient entre 46 295 896 F CFA et 50 098 341 F CFA pour les paiements au comptant. Et, pour les paiements à tempérament, les prix de revient des villas oscillent entre 48 111 422 F CFA et 52 062 982 F CFA. Ces variations, toujours selon M. Nébié sont fonction de la superficie des parcelles et de l’emplacement de la villa.

Pour le paiement à tempérament, la remise effective des clefs est subordonnée au versement d’un acompte au moins égal à 30 % du prix de cession. Le reliquat est payable dans un délai maximal de 10 ans… Mais les postulants ne se bousculent pas. Jusqu’à la date du 4 septembre dernier, seulement quelques villas avaient été cédées. Et les clients seraient le ministère de la Culture, du Tourisme et de la Communication, la Centrale d’achat des médicaments essentiels génériques (CAMEG) et quelques 3 ou 4 particuliers, tous résidant à l’étranger. Ainsi donc, plus d’une quarantaine de villas cherchent toujours preneurs, désespérément. Sans doute parce que les coûts et les modalités de paiement jugés "avantageux" par la CNSS, sont aux antipodes du pouvoir d’achat du Burkinabè moyen.

Car pour devenir propriétaire de la villa la moins chère, d’après un calcul rapide, le postulant ne disposant pas des 48 millions au comptant devrait d’abord verser un acompte d’au moins 14 443 426 F CFA. Ensuite, il doit se tenir prêt à payer une somme de 280 567 F CFA par mois et ce, pendant 10 ans ! En attendant de trouver preneurs, les villas sont quotidiennement entretenues à hauteur de plus de 2 millions de F CFA par mois, selon le directeur régional de la CNSS. Cette dépense qui correspond aux frais d’électricité, d’eau, de gardiennage, de nettoyage, etc. pèse lourd sur la Caisse qui a fini par suspendre la fourniture en électricité, quoiqu’elle redoute les vols. Et en dépit de cet entretien courant, certaines villas ont malheureusement commencé à céder aux menaces du temps. Nous avons en effet fait le constat de plafonds abîmés (voir notre photo) et de peinture murale en dégradation.

Pourquoi ne pas opter pour la location simple à loyer modéré de ces villas restées inhabitées depuis plus de 9 mois ? Nous avons posé la question au DR de la CNSS de Fada qui nous rejette implicitement la responsabilité de cette situation : "Vous (entendez les journalistes) avez tellement écrit sur les villas de la CNSS ces derniers temps que nous sommes maintenant extrêmement prudents dans nos démarches", a dit le DR Alfred Nébié.

Le Nord à l’école de l’Est

Un autre héritage du 11-Décembre, et pas des moindres : l’expérience. La région de l’Est qui a organisé et réussi (selon l’opinion la plus répandue) le 11-Décembre 2008 se doit aujourd’hui de partager son expérience avec celle du Nord qui détient le flambeau de la 49e fête de l’indépendance du Burkina qu’elle abrite le 11-Décembre 2009. Alors, que fait Fada pour aider Ouahigouya à relever "son" défi ? Nous avons posé la question au gouverneur de l’Est qui indique que des séances de travail ont déjà eu lieu entre les deux régions dans ce sens. "Ils sont venus ici, nous les avons reçus dans l’esprit de leur donner toutes les chances de faire mieux que nous" a dit Kilimité Théodore Hien. Au-delà des questions de structuration, des commissions, et de l’organisation pratique de la fête nationale, les échanges, a dit le gouverneur, ont surtout porté sur les ‘’échecs’’ de Fada. "Nous leur avons dit tout ce qui n’a pas bien marché chez nous, afin qu’ils prennent soin de les corriger et d’éviter de tomber dans les mêmes erreurs", a dit le gouverneur de l’Est, qui reconnaît que les deux régions n’ont pas forcément les mêmes réalités.

Par Paul-Miki ROAMBA

Le Pays

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