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Tolérance interreligieuse : Abbé Souleymane Prosper, le fils de El Hadj Boukary Ouédraogo…

31 juillet 2012, 23:33, par Souly N. Stéphane

Suite de mon aventure !
Quand je suis sorti du magasin, j´ai pris le bus et me suis rendu dans le quartier St Eugène où je passais mes vacances chez un prêtre père Jean Marie Lancelot, lequel avait servi au Burkina auparavant avant de se retrouver en Algérie. Paix á son âme car il est décédé depuis environ une dizaine d´années. Je lui ai raconté l´histoire. Et il m´a dit, « il arrive que dans un désert on y trouve une fleur, et tout le monde peut se demander qui a pu bien planter cette fleur ici et qui l´arrose de sorte que cette fleur résiste á la sécheresse ! » Sœur Renée Corneille, qui était aussi présente à la paroisse avec moi ce jour était tellement impressionnée par mon histoire qu´elle promit de rendre visite á ce vendeur. Le même jour je leur ai raconté l´histoire du pain pendant le ramadan.
De retour à Médéa j´ai de nouveau raconté mes aventures aux moines de Tibhirine, lesquels aussi seront malheureusement sauvagement assassinés quelques années plus tard (Mai 1996) par des islamistes intégristes ! Il en en fut de même pour l´évêque d´Oran Monseigneur Pierre Claverie que j´ai connu personnellement et qui a été assassiné quelques mois plus tard le 1 Août 1996. (Pour ceux qui douteraient de mon récit je laisserai mon mail à la fin de mon écrit afin qu´ils aient la possibilité de vérifier ce que j´ai écrit. Que mon histoire est réelle car je leur donnerai les noms des témoins vivants !)
Quand pendant les vacances universitaires je voulus me rendre au Burkina, l´homme de peu de foi que j´étais trouva moyen de laisser le gros coran dans sa chambre. La raison j´avais un excédent de bagages et je ne me voyais pas payer quelques centaines de francs français pour un coran. Tant pis pour l´ami de mon père ! Je fis mes bagages et pris la route de l´Aéroport. Quelle ne fut pas ma surprise, je n´avais pas confirmé ma réservation. Alors je ne pouvais pas voyager. Je devais donc attendre une semaine. En effet à l´époque Air Algérie avait un seul vol dans la semaine en direction du Burkina. C´était chaque jeudi. J´ai dû patienter, et puis vint le jour j, je fis de nouveau mes bagages et décidai encore de laisser le coran dans ma chambre. Nissubiré Fréderic mon ami, étudiant en pharmacie comme moi me conseilla de le prendre, et que si á l´Aéroport mon excédent de bagages était tel que je ne pouvais pas payer, hé bien lui il le ramènera avec lui. Je fis donc deux valises de 40 kg chacune. Plus un sac de voyage ! En tout environ 120kg. Je mis le coran dans une de ces valises et gardai la mallette comme bagage de main. À l´Aéroport au contrôle on ouvrit ma première valise, celle dans laquelle il y avait le coran ! Le policier ou le douanier ne vit d´abord que le coran, il le prit, prononça quelques mots en Arabe et le montra á tous ceux qui étaient avec lui. Hommes et femmes tous regardèrent le coran, puis me demandèrent de refermer ma valise. Quand je voulus ouvrir la deuxième, puis le sac de voyage, je m´entendis dire c´est bon. On fit passer tous mes trois bagages, après bien sûr les avoir pesés. Je m´attendais á payer environ 80 kg d´excédent de bagages, mais il n´en fut pas ainsi. Je ne payai aucun centime. Mes cheveux se mirent á danser sur ma tête, je frémissais de presque tout mon corps. Je pris place dans l´avion et commençai à réciter le chapelet que j´avais toujours dans ma poche. Au Burkina j´ai remis à cet ami de mon père le coran et la mallette qui contenait les cassettes, lesquelles étaient en fait une version audio du coran. Mon père est décédé le 23 juillet 2003, mais son ami l´imam doit toujours être en vie ! Je ne suis pas sûr. Cet imam m´a demandé combien j´avais acheté tout cela. Je lui ai dit tout simplement qu´on me les avait donnés ! Il ne me croyait pas. J´ai juré comme je pouvais mais il ne me croyait pas toujours, car pour lui ce coran et ses cassettes sont trop chers pour être donnés gratuitement ! Pourtant c´est la vérité lui ai-je de nouveau juré !
Me voici de retour en Algérie j´avais pris soin d´acheter du café et des bananes pour ces deux Messieurs. Je les ai fréquentés jusqu´à la fin de mes études. Puis entre temps éclata la guerre du FIS. Un jour alors que je me rendais á l´hôpital je fus agressé par un islamiste. Il menaça de m´égorger. Il m´accusait d´être entré dans une mosquée, avec mes chaussures et en plus j´étais en culotte ! Ceci était un crime puni par le coran et l´islam. Et que lui devait me tuer pour laver ce péché très grave ! Une histoire banale. Face à cette situation, je me rendis directement dans le bureau du directeur de l´hôpital et fis part de ses menaces. Tout de suite, la police fut informée et on me pria de leur montrer la personne qui me menaçait ! Ce que je fis sans hésiter. Il fut embarqué sur le champ et on fixa un rendez-vous pour nous écouter ! Je l´identifiai de nouveau et la police me remercia. C´était une scène pénible. En effet quelqu´un était entré dans la mosquée en culotte avec ses chaussures, mais il ne s´agissait pas de moi ! Alors, la situation de l´Algérie de l´époque était telle que tout islamiste pris était plus ou moins au pire des cas condamné á mort ou au moins…à passer le restant de sa vie en prison quelque part dans le désert ! Le jour du procès, le wali me demanda si je voulais poser une plainte contre cet islamiste. Je répondis que non ! On me pria de bien réfléchir, et je leur fis comprendre que ma décision était prise. Je ne porterai pas plainte. Je veux pouvoir seulement aller en ville comme je le souhaite sans avoir peur ! Oui sans être dans la crainte que quelqu´un veuille me trancher la gorge ! La famille du malheureux était en larmes dans les couloirs de la Wilaya ! Son père, sa mère et sa grand-mère, toute sa famille était là et avaient les yeux fixés sur moi ! Je vous assure que je souhaite á personne de vivre ce que j´ai vécu dans cette salle ! Je regardai de nouveau cette famille et leur fit comprendre que chez moi au Burkina, mes meilleurs amis se nommaient Rasmané, Ousmane ou Karim. Et que tout le monde pouvait se tromper, que je n´étais pas la personne qui était entrée dans la mosquée. Mieux le directeur de la citée et quelques étudiants sont venus témoigner en ma faveur ! « Stéphane n´est pas celui qui était entré dans la mosquée, mais il s´agissait bel et bien d´une autre personne ». Quand j´ai décidé de ne pas porter plainte, j´ai pu lire la déception dans les yeux des policiers. On m´ordonna de repartir, et je ne sus pas tout de suite ce qui s´était passé après moi. Un mois plus tard, alors que j´étais devant la cour de la citée universitaire, un Monsieur m´aborda, et me pria de venir avec lui. Je lui fis comprendre que je ne pouvais pas le suivre. Il insista, me dit qu´un Imam voulait me parler. Je refusai catégoriquement et lui fis savoir que cet imam pouvait aussi se déplacer et venir á la citée me voir ! Alors un soir, mon accusateur, son père, et un barbu, vinrent me voire à la citée. Ils me parlèrent sagement, me demandèrent pardon pour ce qui était arrivé. Par la même occasion, ils m´invitèrent chez eux à prendre un repas ! J´avoue avoir mis du temps avant d´accepter. Quand je me rendis dans cette famille, tout le monde m´a embrassé. Les enfants voulaient me toucher, la grand-mère et la mère de mon accusateur pleuraient. À la fin du repas, on me raccompagna à la citée, puis l´Imam me dit : « Monsieur Stéphane, est-ce que vous savez que vous avez sauvé la vie de notre fils en décidant de pas porter plainte » ! Je lui répondis que non ! Ce qui était en fait un mensonge, car à la police, j´ai vu dans les yeux de la police militaire la haine que ces derniers avaient á l´égard des islamistes. Quant à ce dernier, il est devenu un de mes meilleurs amis ! Il venait dans ma chambre autant qu´il pouvait. Tenez il a même essayé de convertir. Quand il vit que cela n´était pas possible, il lâcha : « Stéphane, je sais que dans ta tête tu es un musulman, même si tu te nommes Stéphane. Tu as un bon cœur pour être un chrétien ! Tu es un musulman »
Jusqu´à présent je me demande ce qu´aurait pu me répondre mon ami vendeur de pain, si je lui avais dit qu´il était trop bon pour être un musulman ! Souvent quand j´y pense je rigole ! Libre aux lecteurs d´interpréter, de croire ou de ne pas croire ! Pourtant c´est vrai. J´ai même des photos de cet islamiste avec moi ici, dans mon album ! Bonne nuit !
N. Stéphane Souly snssouly@hotmail.com


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