Actualités :: Présidentielle 2005 : "L’esprit de l’article 37 violé"

A travers l’article ci-dessous, Abdramane Cissé, étudiant en sciences juridiques et politiques à l’université de Ouaga, répond aux propos de Salif Kaboré parus dans "Le Pays" sous le titre "l’opposition veut prendre la Constitution en otage".

J’ai lu dans la presse, notamment dans le journal "Le Pays" n°3456 du 9 septembre 2005 à la page 3, les propos d’un certain Salif Kaboré, président de l’Association des jeunes pour la candidature de Blaise Compaoré (AJCBC).
L’article de monsieur Kaboré qui suscite ma réaction a pour thème "L’opposition veut prendre la Constitution en otage".

Je me fais le devoir de réagir parce que les propos de M. Kaboré souffrent de criardes imprécisions et ne convainquent pas. De prime abord, M. Kaboré affirme que "L’opposition elle-même a voulu prendre la Constitution du Burkina Faso en otage en disant que Blaise Compaoré ne peut pas se présenter à l’élection de 2005".
La question que je pose à M. Kaboré, c’est de savoir si affirmer que le chef de l’Etat actuel ne peut pas briguer un troisième mandat, c’est prendre la constitution burkinabè en otage.

Sans prendre faits et cause pour l’opposition, que M. Kaboré sache que s’il y a un individu ou un groupe d’individus qui a pris la Constitution du Burkina en otage, ce sont bien les tenants actuels de la IVe République.

A titre illustratif, le régime actuel n’a-t-il pas travaillé à saper l’un des quatre piliers majeurs de notre Constitution qui est précisément l’alternance (article 37 de la Constitution) ?

Aussi, plus loin, M. Kaboré écrit : "Il s’agit d’un nouveau mandat qui n’a rien à voir avec le précédent, tant du point de vue de sa durée (5 ans) que de ses possibilités de renouvellement (une fois)".
Je conviens avec M. Kaboré qu’il s’agit bien d’un nouveau mandat, au double plan de sa durée et de ses possibilités de renouvellement. Mais, il y a un fait qui vient contrecarrer ce qu’avance M. Kaboré. C’est que l’esprit de l’article 37 originel (article avant toutes les modifications) de la Constitution du 11 juin 1991 veut que tout Burkinabè, qui qu’il soit, une fois qu’il accède à la magistrature suprême, n’excède pas quatorze ans, soit deux fois le septennat, à la tête de l’Etat.

D’où le libellé de l’article 37 ainsi qu’il suit :
"Le président du Faso est élu pour sept ans au suffrage universel direct égal et secret. Il est rééligible une fois". D’aucuns me rétorqueront que le contenu de l’article sus-cité n’est plus le même actuellement. Qu’à cela ne tienne ! Sachez tout de même qu’une loi ne s’interprète et/ou ne s’appréhende pas stricto sensu par sa lettre, mais l’esprit de la loi compte également dans son interprétation.

Donc, M. Kaboré, le candidat que vous soutenez a déjà totalisé quatorze ans à la tête de l’Etat (sans inclure son règne sous l’Etat d’exception) et par conséquent, en se présentant, il viole l’esprit de l’article 37 tel que libellé en 1991.

En outre, M. Kaboré écrit : "Le mandat est de nouveau fermé. Avec ça, une minorité ose dire le contraire ?".
Si le mandat est de nouveau fermé, cela signifie-t-il pour autant que le chef de l’Etat actuel peut rebelloter en 2005 ? Je n’en suis pas si sûr. Essayez d’être on ne peut plus clair, M. Kaboré, lorsque vous parlez de mandat fermé. Enfin, vous affirmez, M. Kaboré, que "heureusement, le peuple a compris le jeu et s’est mobilisé pour dire non à l’opposition".

De quel peuple parle M. Kaboré ? Ce n’est pas du peuple burkinabè en tout cas. Je vous prie, en passant, de ne pas embarquer le peuple dans vos manoeuvres politiciennes. Tout compte fait, le peuple burkinabè suit avec un oeil attentif l’évolution du débat démocratique au Burkina et se fait une opinion de ses leaders politiques.
Ce même peuple ne s’est jamais mobilisé pour dire non à l’opposition. Le peuple suit plutôt le comportement de celle-ci face aux agissements de la majorité au pouvoir.
Démocratiquement.

Abdramane CISSE
Etudiant en sciences juridiques et politiques à l’université de Ouagadougou

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