:: Education : Paul Taryam Ilboudo a soutenu sa thèse de doctorat unique en (...)

A plus de 70 ans, Paul Taryam Ilboudo ne finit pas de surprendre sa génération et les jeunes générations. Plusieurs personnes de sa génération pensaient qu’il avait déjà son doctorat et les plus jeunes ne se doutaient pas qu’il ne l’avait pas. Oui, il vient de soutenir mercredi 28 février sa thèse de doctorat unique à l’école doctorale lettres et sciences humaines, laboratoire de psychopédagogie, d’andragogie, de politiques éducatives et de mesure et évaluation (LAPAME) de l’Université Norbert ZONGO de Koudougou.

C’est dans un des amphithéâtres de l’épicentre du savoir de Koudougou, qu’une foule nombreuse constituée de parents, amis, collègues, et étudiants s’est retrouvée pour soutenir et encourager l’étudiant d’un autre âge. En face de lui, un jury de 6 membres composé de 5 professeurs titulaires et d’un maître de conférences venu de l’Université d’Abomey-Calavi.

Il est 9h30 lorsque le président du jury, le professeur Aliou Keita annonce le début des hostilités par la présentation de l’ordre du jour. Lui-même visiblement heureux de recevoir un étudiant pas comme les autres. Il s’est d’abord félicité d’avoir à ses côtés d’imminents professeurs pour juger le travail de Paul T. Ilboudo. Il a ensuite félicité le nouvel impétrant, qui, malgré un âge avancé se présente pour soutenir sa thèse de doctorat.

« Impact du bilinguisme scolaire sur l’efficacité des écoles primaires bilingues au Burkina Faso » tel est le titre de la présente soutenance. Il s’est agi pour M. Paul Taryam Ilboudo de soulever et de répondre à la question des langues nationales dans le système éducatif et dans quelle mesure elles contribuent à améliorer sa qualité. En d’autres termes, quel est l’impact du bilinguisme scolaire langue nationale-français sur l’efficacité interne des écoles primaires bilingues au Burkina Faso ?

Il faut rappeler que Paul Taryam Ilboudo a été l’un des concepteurs de ce qu’on appelle l’éducation bilingue au Burkina Faso. A la tête de l’ONG « Œuvre Suisse d’Entraide Ouvrière », aujourd’hui « Solidar Suisse », il a initié et conduit dans les années 90, l’expérimentation de l’éducation bilingue dans le cadre de l’éducation non formelle, puis dans le cadre de l’éducation formelle en ouvrant des écoles bilingues à travers le pays. Au cours de toutes ces années, alors qu’il était toujours en fonction à la tête de Solidar Suisse il a fait du plaidoyer pour le passage à l’échelle de l’éducation bilingue. De nombreuses évaluations nationales et internationales ont validé et recommandé après les phases pilotes la généralisation de l’éducation bilingue dans tout le pays.

L’objectif de sa recherche a été de montrer après 30 ans d’investissement personnel, dans quelle mesure le bilinguisme scolaire du Burkina Faso, qui utilise comme médium d’enseignement, la langue nationale que l’élève maîtrise bien, en complémentarité avec le français, améliore les indicateurs d’efficacité interne des écoles primaires bilingues, sur une période de 10 années scolaires (2005-2006 à 2014-2015).
En suivant une méthodologie rigoureuse, Paul Taryam Ilboudo a présenté les résultats de sa recherche en faisant ressortir des indicateurs qui montrent que « Le bilinguisme scolaire langue nationale-français améliore significativement les indicateurs de l’efficacité interne dans les écoles primaires bilingues au Burkina Faso ». Par exemple, le coût unitaire, d’un diplômé au Certificat d’Etudes Primaires des écoles bilingue, est de 311 728 F. CFA. Alors que le coût unitaire, d’un diplômé au CEP de l’école classique, est de 479 185 F. CFA.On note une économie de 167 457FCFA, par diplômé du CEP des écoles bilingues. Avec cette économie de 167 457 FCFA, sur les 227 497 admis au CEP 2017, le Burkina Faso, aurait pu économiser plus de 38 milliards de F.CFA (38. 095. 965. 129 FCFA), sur le coût de formation des cohortes qui ont obtenu le CEP en 2017.

Les résultats de la thèse de monsieur ILBOUDO, nous apprennent également, entre autres, que :
-  les élèves des écoles bilingues ont 70,10 % de chance de finir leurs études sans jamais redoubler contre une chance de 46, 80 pour les écoles classiques.
-  les taux d’abandons se situent ente 0, 24% et 0, 79% ans les écoles bilingues, alors qu’ils vacillent entre 2, 24% et 11,94% pour les écoles classiques ;
-  Le coefficient d’efficacité, au niveau des écoles bilingues, est de 0,79096, donc un taux de rendement interne de 79,10% ;
-  Le coefficient d’efficacité, au niveau des écoles classiques est de 0,61728, donc un taux de rendement interne de 61,73%.
-  sur 1000 élèves des écoles bilingues inscrits en 1ère année, 953 arrivent en fin de cycle en 5ème année, (soit un taux de survie de 95,30 %) dont 871 obtiennent le CEP (87,1%) alors que sur 1000 élèves des écoles classiques inscrits en 1ère année, 678 arrivent en fin de cycle en 6ème année (soit un taux de survie de 67,8 %.) dont 575 obtiennent le CEP (57,5%).

Après 3h30 d’horloge, Monsieur Ilboudo s’est prêté aux questions réponses du jury, défendant sa thèse avec des arguments bien choisis. L’homme visiblement passionné et très engagé n’a pas démordu malgré les questions délicates que lui ont posées les membres du jury. L’une des questions qui revenait est pourquoi au regard des résultats positifs de l’éducation bilingue, les autorités ne passent pas à l’échelle ou encore celle de la résistance dans les milieux d’intellectuels ? Au regard de ces questions, le jury avant de délibérer, a recommandé la publication des résultats de ses travaux, et que Paul Taryam Ilboudo mène une étude sur les critiques et résistances contre l’éducation bilingue, car les résultats, auxquels il est parvenu, sont assez convaincants et suffisent pour qu’on adopte l’éducation bilingue. Tout cela devrait s’accompagner d’un plaidoyer auprès des autorités.

A la fin de la soutenance et après délibération le jury a accordé la mention très honorable à Paul Taryam Ilboudo. Il s’est félicité de la qualité de son travail, de sa persévérance et de ses convictions qui sont la recherche de l’amélioration du système éducatifburkinabè.

Aujourd’hui, à la retraite, maire de la commune de Loumbila, pour laquelle il se dévoue, que fera Paul T. Ilboudo doté d’un si « gros diplôme » qu’est le doctorat ? A cette question il répond que pour lui c’était un défi en tant que homme de terrain et d’action, d’apporter sa contribution par la recherche à l’amélioration de la qualité de l’éducation. C’est aussi le couronnement de nombreuses années de travail et d’engagement et un exemple pour les jeunes générations, car la valeur n’attend point le nombre d’années. Il a dédié son travail à son épouse Virginie qui l’a soutenu au cours de ces longues années, à ses enfants, beau-fils et belle-fille et à ses petits-enfants.

Evariste ZONGO

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