Actualités :: Anciens d’Etat du Burkina : Quelle utilité pour la République ?
S.Lamizana, S. Zerbo
et J-B. Ouédraogo

Me Appolinaire J. Kyélem, avocat au barreau du Burkina, fait une halte sur le rôle que doivent jouer les anciens chefs d’Etat dans
la République.

De l’indépendance à nos jours, la Haute-Volta et le Burkina
Faso ont connu six présidents de la République. Le premier
d’entre eux, Maurice Yaméogo, est décédé et le cinquième,
Thomas Sankara, a été assassiné.

Pour des futilités Thomas Sankara a été assassiné car, comme
le disait Jean-Jacques Rousseau, rien ici bas ne vaut d’être
acheté au prix du sang humain. Pour paraphraser les artisans
de la Révolution française, on pourrait dire que toute société
dans laquelle le droit à la vie n’est pas reconnu, garanti et
respecté n’a pas de civilisation.

Il reste donc au Burkina Faso trois anciens chefs d’Etat. Quel
rôle peuvent-ils jouer dans la société ? A l’heure actuelle ils font
plutôt de la figuration. Certes, sur le plan financier ils bénéficient
d’un certain traitement et sont dotés d’une liste civile. Pendant la
crise consécutive à l’assassinat du journaliste Norbert Zongo,
ils ont fait partie du Collège de Sages. Depuis, ils sont retombés
dans l’oubli. Pour des personnalités qui ont eu à conduire la
destinée d’un pays, le rôle dans lequel ils sont actuellement
confinés est sans doute regrettable. Leurs compétences et
leurs expériences peuvent être d’un apport considérable pour
une évolution harmonieuse du pays.

Le président Lamizana a pris la direction du pays à un moment
difficile, à l’issue de la crise du 3 janvier 1966. Pendant près de
quinze ans il a présidé aux destinées du pays avec tolérance et
sagesse. C’est sous sa gouvernance que la santé financière du
pays s’est rétablie et les différentes sensibilités politiques se
sont développées pour permettre le foisonnement des idées et
l’effervescence de la période révolutionnaire.

Le président Saye Zerbo est arrivé au pouvoir par un coup d’Etat
militaire, donc de façon contestable. Cependant son bref séjour
d’à peine deux années à la tête de l’ Etat a marqué une rupture
avec le passé et entamé un nouveau départ. Il a été sauf erreur,
le premier chef d’Etat à rejeter officiellement et publiquement la
qualificatif de pays pauvre sans ressource que l’on collait
volontiers à la Haute-Volta. Sauf erreur, il a aussi été le premier
chef d’Etat à parcourir le pays à travers les campagnes et les
brousses, non pas pour des fins électoralistes, mais pour
toucher du doigt les réalités des citoyens. C’est sous le régime
de Saye Zerbo que la déconcentration administrative a
réellement commencé. Le mot d’ordre était " rapprocher
l’administration de l’administré."

Un vivier de candidatures de poids

Le président Jean-Baptiste Ouédraogo a effectué un passage
éclair à la tête de l’Etat. Huit mois environ. On pourrait dire qu’il a
été chef d’Etat par hasard. La période trouble pendant laquelle il
a présidé aux destinées du pays a révélé ses qualités
d’humaniste visionnaire.

Il est regrettable que des personnalités dotées de talents et d’
expériences diverses se retrouvent hors des institutions et des
circuits de la République. Ne serait-il pas opportun d’imaginer
un cadre dans lequel leurs talents et leurs expériences
pourraient s’épanouir au bénéfice de la nation ? Par la suite, l’on
pourrait éventuellement puiser dans ce vivier des candidatures
de poids pour de hautes fonctions internationales. A cet égard,
les exemples de l’ancien président Omar Konaré du Mali
actuellement président de l’Union Africaine et de l’ancien
président Abdou Diouf du Sénégal actuellement secrétaire
général de la Francophonie sont assez édifiants.

En France, les anciens chefs d’Etat sont membres de droit du
Conseil constitutionnel même s’il est vrai qu’aucun n’ y a jamais
siégé. Après avoir été garant de l’application de la constitution, il
semble logique qu’ils fassent partie de l’équipe chargée de
veiller à la constitutionnalité des lois et à la régularité des
élections. Il conviendrait donc de conférer aux anciens chefs
d’Etat la qualité de membres de droit du Conseil constitutionnel.
N’ayant sans doute plus rien à prouver et n’attendant
pratiquement plus rien de personne, on peut penser qu’ils
seront plus indépendants et suffiamment lucides pour être
parmi les membres les plus avisés de cette institution.

Il serait peut-être intéressant de mettre également en place un
bureau pour chaque ancien chef d’Etat. Pour des raisons
économiques, le personnel pourrait, dans un premier temps,
être réduit au minimum. Ce bureau permettait un meilleur suivi
de leurs correspondances et serait un levier important dans la
perspective de la rédaction de leurs mémoires. Il leur
permettrait également d’émettre éventuellement des avis sur la
gestion des affaires de l’Etat et leur servirait aussi de
permanence pour la réception et l’écoute de tous ceux qui
désireront requérir leur avis ou s’entretenir avec eux...

A moins que cela ne soit prévu dans le cadre du Mémorial aux
héros nationaux, on pourrait aussi penser à l’érection d’un
musée des anciens chefs dans lequel seraient exposés les
principaux faits ayant marqué le passage de chacun à la tête de
l’Etat. Un tel musée serait en lui-même une école de science
politique pour les générations actuelles et futures.

Pour évoluer progressivement et sereinement, la recherche et
la cueillette des imaginations, des compétences et des
expériences sont plus que nécessaires.

Me Appolinaire J. Kyelem, avocat au barreau du Burkina

NDLR : Le titre et l’intertitre sont de la Rédaction

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