Actualités :: Affaire de fétiches : Essai de clarification

Sur mon ancien profil Facebook, actuellement désactivé par Facebook, dans un post du 26 février passé, je disais "On ne peut pas faire Nation à partir de "traditions" et des fétiches, tous pluriels, sans les avoir clarifiés d’une manière ou d’une autre".

Le 12 mars passé, je faisais un autre post intitulé "Chacun en est libre, mais pas l’État". Un commentateur avait trouvé que ce post présentait les choses comme si l’État alignait les soldats et leur distribuait des gris-gris ; il m’a demandé (ironiquement) si j’en connaissais des cas. Ma réponse était "comment le saurais-je ?", avant de lui expliquer que j’étais simplement intrigué ou alerté par le cérémonial des enterrements des restes de Sankara et de 12 autres et d’un débat qui s’en était suivi sur une de nos stations télé.

Voilà que, quelques mois après (le 4 mai 2023), un ministre d’État nous fait savoir, avec beaucoup de conviction apparente, que certains terroristes sont wackés-blindés. Et lui-même attend et espère des chefs coutumiers et religieux que, pour "aider nos FDS", ils lui proposent, à lui, qui des "canaris de protection", qui une "sourate" ou des "queues" et pourquoi pas des "portefeuilles magiques" (ça, c’est moi qui ajoute).

Avant de continuer, il faut le rappeler haut et fort : LA PAROLE D’UN MINISTRE D’ETAT EN SERVICE EST D’ETAT, COMME CELLE D’UN MAGISTRAT EN SERVICE EST DE JUSTICE (institution).

Cela étant, sur la question des fétiches comme pouvoirs mystiques ou techniques particulières ou exceptionnelles (je m’en tiens à ce contenu, uniquement), la question est et demeure comment les clarifier ?

En d’autres termes, comment débusquer les imposteurs qui rusent d’une croyance (ou d’une crédulité) répandue mais qui, fondamentalement, relève de l’espace privé. Et elle devrait rester privée (au plus locale), si ce n’est le fait d’un parasitisme social, financier-économique, et politique qu’elle génère.

Moi gouvernement, pour clarifier les choses, voici le Projet de loi que je soumettrai à l’ALT. Oubliez la forme !

Contexte et motivation : le Burkina est en lutte, devenue guerre anti-terroriste (une "guerre introduite" est une "guerre commencée"). Des milliers (8 000 à plus de 10 000, selon les sources) de civils, VDP et soldats sont tués, des centaines d’autres, mutilés (même si on n’en donne jamais les statistiques) ; des populations de localités entières sont déplacées de force (plus de 1,9 millions), l’administration est déguerpie dans les mêmes termes et, sur une bonne partie du territoire national, les services sociaux ne peuvent plus se déployer, etc. Cela dure depuis plus de 7 ans, et deux coups d’État espacés de 8 mois.

Article 1er : Vu le contexte ci-dessus rappelé, tout fétiche (pouvoir mystique ou technique particulière exceptionnelle) pouvant influencer favorablement l’issue de cette guerre anti-terroriste, mettre fin ou raccourcir les souffrances des populations, est déclaré d’UTILITÉ PUBLIQUE.

Article 2 : Pour cause d’UTILITÉ PUBLIQUE, l’État est preneur-acheteur de tout pouvoir mystique, toute technique particulière exceptionnelle ou assimilée (ci-devant appelé "produit") que détiendrait tout citoyen burkinabè, ou tout résident au Burkina Faso (ci-devant appelé "propriétaire vendeur").

Article 3 : Sans être limitatif, il s’agirait des pouvoirs, des techniques particulières exceptionnelles et assimilées pour :

- confectionner des habits, bonnets, ceintures, breuvage, bain, "maaba" et "sɛba"*, anti-balle, pare-balle, amortit-balle, dévie-balle et assimilés ; tout comme les bagues, bracelets et colliers "abreuvés" (trempés dans des mixtures liquides spéciales) ;
- confectionner des calebasses et liquides d’où l’on pourrait lire les intentions de l’ennemi, en temps réel, ou échanger avec un soldat se trouvant sur un terrain lointain des opérations ;
- envoyer des colis (munitions, rations, équipements divers, etc.) aux combattants par la pluie et les éclairs, par le vent et les tourbillons, etc. ;

- faire disparaître un soldat pris dans les griffes de l’ennemi pour lui permettre de s’en échapper ;
- déplacer les arbres et les maisons pour laisser voir les terroristes dans leurs bases ;
- produire des queues, des portefeuilles, et des canaris magiques destinés à protéger les soldats sur le terrain des opérations ;
- etc.

Article 4 : Exceptionnellement, les conditions financières du "propriétaire vendeur" sont d’office acceptées par l’Etat.

Article 5 : Pour chaque "produit", un protocole sera convenu pour la vérification de son authenticité et la véracité des spécifications techniques, telles que décrites par le "propriétaire vendeur". Un décret viendra préciser les procédures d’authentification et de vérification.

Article 6 : Si les vérifications sont concluantes, l’État achète et prend en charge les frais de brevetage du "produit" au profit exclusif du "propriétaire vendeur".

Youssoufou OUÉDRAOGO
https://a-yissfu.blog4ever.com/affaire-de-fetiches-essai-de-clarification


* Termes Mooré. Maaba, "maabre" au singulier : ceinture confectionnée en cuir, avec un "ventre" renfermant des gris-gris ou des versets magiques inscrits sur papier.
Sɛba, "sebre" au singulier : une plaquette en cuire confectionnée dans les mêmes conditions que le maabre, auquel il est parfois adjoint ; littéralement, "sebre" signifie papier.

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