Actualités :: Burkina/ An 1 du MPSR II : « Le bout du tunnel peut être proche si la (...)

Il est connu pour son franc-parler. Le journaliste d’investigation, Ladji Bama, a accordé une interview à Lefaso.net. Les échanges ont porté sur le bilan de l’an 1 au pouvoir du MPSR II (30 septembre 2022-30 septembre 2023). Il a parlé sans langue de bois, comme il fallait s’y attendre concernant le bilan du mouvement, un an après le coup d’Etat.

Lefaso.net : Qu’avez-vous retenu de positif durant les « un an » de magistère du capitaine Ibrahim Traoré ?

Ladji Bama : Il y a cette volonté de vouloir restaurer la souveraineté de ce pays à travers un certain nombre d’actes parmi lesquels on peut retenir la rupture d’un certain nombre d’accords jugés indignes. Ces accords économiques nous liaient à l’ancienne puissance coloniale. On enregistre aussi une rupture au niveau des relations diplomatiques, notamment avec le renvoi de l’ambassadeur de France et de la responsable des nations unies. Elle avait des attitudes qui n’étaient pas de nature à garantir la souveraineté du Burkina Faso. Il y a eu également la suspension de certains médias qui n’avaient pas des attitudes recommandables, notamment RFI et France 24.

Quels sont les aspects de cette gouvernance qu’il faut améliorer ?

C’est certainement au niveau des questions de liberté ou il y a beaucoup de choses à dire. Plus haut, j’ai parlé de la suspension de certains médias. Mais cela ne signifie pas qu’il faut forcement venir à annihiler tous les médias. J’aime quand on parle de chaque cas dans son contexte. Avec RFI par exemple, il a été reproché à la radio d’avoir voulu faire de l’instrumentalisation concernant la mobilisation des Volontaires pour la défense de la patrie (VDP). Elle a dit que le recrutement était fait selon les ethnies alors que ce n’est pas du tout vrai.

Dans ce pays, on n’a jamais vu que les VDP étaient recrutés sur la base ethnique, ni que les djihadistes enrôlaient sur la base ethnique également. Les djihadistes et les VDP sont dans toutes les ethnies. Voilà pourquoi j’ai approuvé la suspension de RFI. Par rapport à la suspension de France 24, j’avais salué, mais j’avais aussi déploré le fait que donner la parole à un djihadiste n’était pas un motif valable. Dans ce pays, ce n’était pas la première fois qu’on le voyait.

Même le porte-parole du gouvernement qui a signé le communiqué qui suspendait France 24 a eu à le faire lui-même. Il faut étudier les cas de manière spécifique. J’ai condamné le fait qu’on ait voulu restreindre les libertés de certains médias, notamment avec la radio Oméga. De la même façon que j’avais émis des réserves sur la suspension de France 24, ce qu’on reprochait à Oméga était contestable.

Donner la parole à un opposant politique d’un pays, soit disant qu’il est un rebelle ou tout ce qu’on peut lui reprocher n’est pas un motif valable pour suspendre un média. Voilà ce que j’ai eu à dire en son temps, même si de nombreuses personnes ne l’ont pas compris. Actuellement au Burkina Faso, les médias sont beaucoup dans le collimateur des autorités. C’est un sérieux problème, vous avez remarqué que présentement tous les journalistes, avant d’écrire ont la plume qui tremble. La parole est vraiment embastillée aujourd’hui dans le pays. Sur ce plan, il y a un gros travail à faire.

En plus de cela, il faut que les autorités du pays se concentrent sur ce pourquoi elles sont venues, notamment les questions de sécurisation du territoire. Sur ce plan, il y a beaucoup de travail à faire. On constate qu’elles sont beaucoup plus dans un certain jeu, notamment, de préservation du pouvoir et des soupçons beaucoup trop complaisants qui peuvent prêter à croire qu’ils ne sont plus présents pour ce pourquoi ils ont pris le pouvoir (lutte contre le terrorisme).

C’est un pouvoir qu’ils entendent installer dans la durée y compris par tous les moyens. Cela n’est pas acceptable. Depuis un certain temps, on remarque des accusations de complots. S’il y a des complots, il faut que la justice se mette au travail. Mais tout le temps à accuser les gens à tort et à travers d’être derrière des complots, procéder à des enlèvements à partir de soupçons, c’est déplorable.

Concernant la liberté d’expression et de presse, ne pensez-vous pas qu’elles doivent être réduites en temps de guerre ?

Elle peut être régulée. Cela ne doit pas se faire seulement en temps de guerre. En tout temps, la liberté de presse est régulée. C’est ce que j’ai toujours défendu, cette liberté doit être régulée par ceux qui sont commis à cette tâche.
Il y a des institutions qui sont sur pied pour réguler les libertés de presse et d’expression dans ce pays. Elles ne peuvent pas être en fonction et des individus vont se permettre de prendre des décisions à leur place.

Je n’ai jamais dit qu’il faut que tout le monde fasse les choses à sa tête. Même en temps de paix, on ne peut pas laisser passer le libertinage. La régulation des médias doit se faire en tout temps. La dictature n’est pas faite pour arranger les choses dans un tel contexte.

Quels conseils pouvez-vous donner à cette transition pour le bien de tous ?

Il faut revenir aux fondamentaux de la gouvernance, notamment garantir les libertés. Il faut éviter de tomber dans l’arbitraire et se concentrer sur ce pourquoi on est venu au pouvoir. Je veux parler de la sécurisation du territoire et de la survie des populations, notamment, les personnes déplacées internes.

Selon vous, le bout du tunnel est-il proche en ce qui concerne la crise sécuritaire ?

Il peut être proche s’ils reviennent à l’essentiel. Mais tant qu’on va ouvrir des fronts inutiles, le bout du tunnel peut être très loin.

Samirah Bationo
Lefaso.net

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