ActualitésDOSSIERS :: CRISE IVOIRIENNE : Quand l’UA tacle la CEDEAO

"L’éviction des despotes ne peut qu’enchanter des hommes libres". Ainsi écrivait Claude Imbert (1), à propos du printemps arabe qui se déroule en temps réel sous nos yeux. Mais son affirmation peut s’appliquer aussi au cas ivoirien. Quand les élections ne sont plus capables de réguler la vie politique, de donner aux populations les dirigeants de leur choix et d’imprimer une dynamique de paix, de stabilité et de progrès, par la faute d’un illuminé assoiffé de pouvoir, il ne reste qu’une alternative : le faire dégager.

Dans la crise post-électorale ivoirienne, bien que ce postulat ait été arrêté, depuis la CEDEAO (Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest) jusqu’à l’ONU (Organisation des Nations unies) en passant par l’UA (Union africaine), rien ne semble bouger. Au contraire, il y a une stagnation, voire un recul, après les premières heures d’indignation et de fermeté. Le groupe de haut niveau (communément appelé panel) mis en place par l’UA pour rediscuter avec le perdant et le gagnant de l’élection présidentielle ivoirienne, est le symbole même de ces hésitations sur l’application stricte des principes démocratiques en Côte d’Ivoire.

Car le Conseil de paix et de sécurité de l’UA, qui a mandaté le groupe de haut niveau, est clair. Son postulat de base est que Alassane Dramane Ouattara est le président élu de Côte d’Ivoire. D’où vient-il alors que des scénarios aux antipodes de cette vérité, circulent, et soient mis sur le compte du panel, amputé d’un membre influent, à savoir le représentant de la CEDEAO ? Il est en effet surprenant que l’idée même d’un partage du pouvoir, ou d’une reprise de la présidentielle, effleure les esprits, du moins ceux respectueux de l’expression démocratique d’un peuple. Si tant est que les présidents mauritanien, sud-africain, tanzanien et tchadien soient attachés au caractère inaliénable des résultats d’un scrutin transparent, ils ne peuvent tergiverser sur la solution de sortie de crise.

De ce fait, le panel devrait avoir pour mission essentielle de tendre à l’usurpateur, Laurent Gbagbo, la liste des "propositions contraignantes" auxquelles il serait soumis, s’il ne restituait pas le pouvoir au président légitime. Car, que faut-il négocier avec le perdant d’une élection juste et crédible ? C’est seulement en Afrique que ce phénomène de remise en cause d’élections propres a cours. Et la voie prise par le panel des « quatre » serait dangereuse pour les processus démocratiques en Afrique, si elle octroyait un blanc-seing à Laurent Gbagbo.

Or, visiblement, sous l’instigation de l’Afrique du Sud, ce panel désavoué par la CEDEAO, veut ménager le président sortant pour des raisons totalement subjectives. Dans le rôle qu’elle joue, l’Afrique du Sud apparaît de plus en plus comme l’élément perturbateur dans le règlement rapide de la crise ivoirienne. Loin de sa sphère d’influence qu’est l’Afrique australe, le président sud-africain, Jacob Zuma, veut prendre les devants dans une crise dont les vrais enjeux lui échappent. La crise de 2002 à laquelle son prédécesseur a participé à la résolution, n’a rien à voir avec celle de 2010. On peut concéder, à l’époque, à Laurent Gbagbo, d’avoir été victime d’une tentative de renversement par les armes. Mais il n’en est rien cette fois-ci.

On se rend compte que l’Afrique du Sud continue de traîner les vieux clichés que Gbagbo lui avait fait avaler. Ici, il ne s’agit pas d’une prétendue lutte de libération contre des forces de domination –thème très sensible pour le pays de Mandela- mais, tout simplement, du respect des résultats d’une compétition électorale. Tant que l’Afrique du Sud n’intègrera pas cette donne, elle se laissera mener en bateau par son cher protégé, au risque de perdre le crédit qu’elle avait auprès des peuples ouest-africains. Du reste, récusation pour récusation, Jacob Zuma devait tout aussi être persona non grata à Abidjan, car les partisans de Alassane Dramane Ouattara ont émis des doutes sur son impartialité. Mais cela, le quatuor du panel n’en a eu cure.

Ce n’est donc pas en réalité l’UA qui vient de faire un tacle (2) à la CEDEAO à travers cette expédition hasardeuse du panel en Côte d’Ivoire, mais de quelques pays en qui la communauté africaine a porté sa confiance, pour un mandat précis. Les désaccords survenus avec la CEDEAO devraient donc, tôt ou tard, se dissiper, étant entendu que sans l’organisation ouest-africaine, rien de durable ne peut être entrepris en Côte d’Ivoire. Si avant la fin de son mandat, le panel ne parvient pas à recoller les morceaux cassés, il va sans dire que le Conseil de paix et de sécurité de l’UA devra en tirer toutes les conséquences.

En tout état de cause, aux yeux de la CEDEAO, le panel actuel ne doit sans doute plus inspirer une totale confiance. C’est dire qu’en définitive, l’UA a commis une erreur en croyant que des pays géographiquement lointains de la Côte d’Ivoire, sont potentiellement neutres. La crise au sein du panel montre qu’il n’en est rien. Le panel devrait se réunir le 28 février prochain à Nouakchott. Le représentant de la CEDEAO, le président Blaise Compaoré, s’y associera-t-il ? Sauf à vouloir tester jusqu’au bout la volonté des autres membres du panel à faire appliquer le verdict des urnes en Côte d’Ivoire, on ne voit pas ce qu’il ira faire à Nouakchott.

"Le Pays"

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