Actualités :: Fraudes au BEPC : Il faut bien que des têtes tombent !

L’éducation est-elle vraiment une priorité au Burkina ? Tel était le titre du "Regard sur l’actualité" de l’édition du jeudi 14 juin 2007 de votre quotidien. Cette interrogation est liée, entre autres, à la baisse du niveau de l’enseignement, due à plusieurs facteurs au nombre desquels "l’usage excessif de la courte échelle par de plus en plus d’élèves aidés, comble du scandale, par leurs parents ou même des enseignants".

Comme si l’on sentait venir la chose cette année encore, le "pétrole" a coulé au BEPC, c’est-à-dire, pour ceux qui ne sont pas familiers de cette expression, que les sujets ont été étudiés de fond en comble, lus, relus, bref divulgués avant l’examen.

N’eût- été la vigilance de certains surveillants, cette fraude serait passée inaperçue et rangée dans les tiroirs des rumeurs, qui sont monnaie courante au Faso. A ce jour, on parle d’une quarantaine d’élèves pris en flagrant délit, et interpellés par les forces de l’ordre. Les épreuves de mathématiques et de physique-chimie, sujets les plus déversés sur la place du marché, ont été annulées dans les centres de Ouagadougou et de Bobo-Dioulasso.

Et hier matin, les candidats de ces deux grandes villes où les fraudes auraient été massives ont repris le chemin des classes pour recomposer dans ces deux matières considérées comme leur bête noire.

En réalité, ce n’est que la partie visible de l’iceberg tant au niveau des fraudeurs qui ont commis la bêtise de se faire prendre en apportant les sujets ou les corrigés en classe qu’au niveau de l’ampleur de la triche. Avec les technologies de l’information et de la communication (e-mail, téléphone portable) sans préjuger des résultats de l’enquête si jamais elle aboutissait, il est clair que ce ne sont pas les centres d’examen de Ouaga et Bobo seuls qui ont été arrosés par le "pétrole".

Et les autorités compétentes devraient avoir le courage de reprendre tout l’examen sur l’ensemble du territoire national. Cela a un coût, mais la reprise vaut son pesant d’or dans la mesure où c’est l’image de notre système éducatif et, partant, du pays qui est durablement et sévèrement ternie.

Si on continue dans la fraude, inutile de dire que les parchemins de notre pays, qui passent pour être une référence dans la sous-région, seront moins chers que la peau d’un bouc.

Le temps presse, et il faut quelque chose pour inverser cette tendance. Et c’est le moment idoine pour le tout nouveau PM, Tertius Zongo, d’entrer dans la danse pour atténuer pour longtemps, à défaut d’arrêter, cette terrible spirale de la fraude aux examens.

Vraiment Tertius Zongo, qui tient tant à l’image de son pays, a là une première épreuve sur sa table, et l’on attend de le voir à l’œuvre. Le plus grave et le plus écœurant dans cette affaire est la banalisation du phénomène de la fraude dans notre pays.

Pendant que des surveillants et des présidents de jury soutiennent que les sujets et leurs corrigés ont été retrouvés entre les mains des élèves, les responsables de l’OCECOS reconnaissent du bout des lèvres que le pétrole a coulé. Son directeur général, Didace Gampiné, est même affirmatif à ce sujet mais minimise cette fraude : "Nous n’avons pas encore sous nos yeux des documents qui font référence ni en maths ni en PC à l’épreuve type qui a été proposée. Mais il faut avouer que des exercices présentent des similitudes".

On peut le comprendre dans la mesure où il a une grande responsabilité dans cette histoire, puisque sa structure, chargée de l’organisation des examens du secondaire (conception, confection et ventilation des sujets), est la principale responsable de ce pétrole qui a coulé à flots sur presque l’ensemble du pays. Le patron de l’OCECOS, avec un soupçon de flegme, ne semble pas à nos yeux avoir pris la pleine mesure de cette épidémie de fraudes. Et pourtant, la structure qu’il dirige est interpellée au premier chef.

A y voir de près, c’est le dilettantisme au sein de l’équipe dirigeante de l’OCECOS, sinon comment comprendre que de manière itérative on parle de fraudes au BEPC, au BAC, etc.

Pas plus tard qu’en 2004, grâce à la perspicacité de la presse, des fraudeurs et leurs commanditaires avaient été envoyés devant les tribunaux. On se souvient d’ailleurs que cette année, une fondatrice d’établissement et des élèves souhaitant acquérir un diplôme à peu de frais avaient été écroués.

Etait-ce pour contenter la presse et l’opinion publique qui criaient à tout rompre leur ras-le-bol contre le flegme avec lequel nos autorités abordent certaines délicates questions nationales ?

Toujours est-il que les personnes qui avaient été écrouées se sont retrouvées quelque temps après en liberté : renseignement pris, elles auraient été graciées par le chef de l’Etat. Passe encore que le magistrat suprême graciât les mis en cause ... C’est dans ses cordes.

Mais qu’après avoir été libérées, ces personnes se voient gratifier d’une décoration pour services rendus à la Nation, c’est tout de même grave et révoltant. C’est même de la provocation.

Ce n’est pas seulement au CEP, au BEPC, au BAC et à d’autres examens que l’on triche. Aux différents concours de la Fonction publique, la fraude est également un sport favori. A défaut d’avoir les sujets, on paye le prix fort certaines personnes de l’administration pour voir son nom figurer sur la liste des nouveaux fonctionnaires de l’Etat. Aujourd’hui, il suffit d’avoir un parent haut placé ou de l’argent pour atteindre son but.

Tout cela participe d’un environnement où la culture du raccourci, l’impunité et la corruption sont érigées en système de gouvernement. Ce n’est pas étonnant dans un pays où le président libère par décret des gens condamnés pour faute grave, dans un pays où l’on falsifie le Journal officiel, dans un pays où l’on trompe même le Conseil des ministres. Il y a dix ans, Bongnessan Arsène Yé affirmait que la morale agonisait au Pays des hommes intègres. Présentement, sous réserve d’un diagnostic complet on peut dire que la morale et entérée est morte. Et la mal gouvernance, qui est d’abord cultivée au sommet de l’Etat, souille inexorablement la base.

Cela se manifeste au quotidien à travers des actes flagrants face auxquels nos responsables, au lieu de sanctionner sévèrement et exemplairement se font parfois complices de par leur silence ou la légèreté avec laquelle les problèmes sont gérés. Espérons que pour cette fois, des mesures disciplinaires seront prises pour que plus jamais l’on ne vive pareille situation de fraude massive et que le diplôme burkinabè ne devienne pas un parchemin au rabais. Il faut donc que des têtes tombent ! A défaut, il ne resterait plus qu’à mettre les corrigés des sujets sur le net !

Adama Ouédraogo Damiss


Fraude à Koudougou : Le cercle des "pétroliers" s’est élargi

Evoquant dans notre édition d’hier le cas de fraude détecté à Koudougou, nous ne pensions pas si bien dire quand nous faisions remarquer que le sieur Semdé Manguezanga Sébastien n’était peut-être pas le seul à être trempé dans cette fraude. En effet, ils sont pour le moment dix personnes à être identifiées comme de potentiels fraudeurs ; deux étant déjà entre les mains de la police.

En rappel, c’est le deuxième jour du déroulement du BEPC, soit le vendredi 15 juin, dans la soirée que Semdé Manguezanga Sébastien a été pris avec le “pétrole’’ dans sa poche, en l’occurrence le corrigé de l’épreuve de chimie qu’il était en train de traiter à l’instar des autres candidats. Confondu pour fraude, il sera remis entre les mains de la police qui ouvrira une enquête.

Cela a abouti à la dénonciation de neuf autres candidats ayant trempé dans cette fraude et l’arrestation de Semdé Moussa. Les huit autres étant pistés au moment où nous glanions ces informations auprès du Directeur régional de la police du Centre-Ouest, le commissaire Abdoul Karim Bélemviré. Peut-être qu’à l’heure où vous parcourez ces lignes on a déjà mis le grappin sur ces fraudeurs ou tout au plus sur une bonne majorité.

Selon le commissaire Abdoul Karim Bélemviré, ces dix jeunes appartenaient au même groupe de travail. Le premier fautif a déclaré qu’il aurait reçu la matière frauduleuse d’un autre élève inscrit en classe de terminale, résidant à Ouagadougou. Les fuites ou le pétrole comme cela s’appelle dans les milieux scolaires, concernaient les sujets corrigés de math, de SVT et de physique-chimie de cette session du BEPC.

Pour Bélemviré, il appartiendra à la justice de décider du sort de ces "pétroliers". En attendant, hier, il était outré, voire ulcéré par le niveau linguistique des deux fraudeurs, incapables de formuler une bonne phrase en français. Le deuxième s’offrant même le luxe de répondre en mooré quand on lui parlait dans la langue de Molière. On comprend qu’ils aient préféré recourir à la courte échelle pour décrocher leur BEPC.

Cyrille Zoma

L’Observateur

Maladie de l’hypertension : « Ne faites pas un régime (...)
Soutenance de master : David Ouango analyse les (...)
Burkina/Hygiène et assainissement : L’ONG Suplamar offre (...)
Certification de l’aéroport de Bobo-Dioulasso : Les (...)
Burkina/Journée scientifique : Des chercheurs poussent (...)
Journalisme en période de guerre : « Rechercher la vérité (...)
Liberté de la presse : Le Burkina Faso obtient la note (...)
Burkina : Suspension des travaux "clandestins" à la (...)
Burkina/Accusations de massacre de civils par l’armée : (...)
Burkina/Foncier rural : La promotion « Burkindi (...)
Burkina/Droits des défenseurs des droits humains : La (...)
Burkina/Projet d’insertion socioéconomique des enfants et (...)
Mécanismes de suivi des politiques publiques : Des (...)
Initiative « Résilience par l’artisanat » : Vingt jeunes (...)
Ouagadougou : Une importante quantité de viande (...)
Affaire Lionel Kaboui : Le dossier en appel renvoyé au (...)
Burkina/Sciences : « Les enjeux de la recherche sont (...)
Burkina/Littérature : Dr Adama Sow présente « Une vie très (...)
Dédougou : L’éducation, la santé et l’économie dans le (...)
Burkina : Plus de 393 000 personnes touchées par le (...)
Burkina/Lutte contre le terrorisme : Un couvre-feu (...)

Pages : 0 | 21 | 42 | 63 | 84 | 105 | 126 | 147 | 168 | ... | 36582


LeFaso.net
LeFaso.net © 2003-2023 LeFaso.net ne saurait être tenu responsable des contenus "articles" provenant des sites externes partenaires.
Droits de reproduction et de diffusion réservés