Actualités :: Laurent Ghilat Paré : Un pionnier de l’église et de l’enseignement de la Haute (...)

Il fut l’un des personnages qui ont marqué l’histoire de notre pays, tant dans le domaine de l’enseignement que dans le domaine de la foi. Laurent Ghilat Paré, puisque c’est de lui qu’il s’agit, fait partie des premiers instituteurs de la Haute Volta. Il était aussi un croyant de première heure, l’une des personnalités qui ont marqué la mission catholique dans son pays. Mais d’où vient-il ? Quel a été son parcours scolaire ? Et quels ont été les faits qui ont marqué sa trajectoire d’instituteur et de catholique ?

Laurent Ghilat Paré est né le 4 octobre 1914 à Bilbalgo. Il était le fils de Michel Ghilat Paré, un San capturé par les Djermas et racheté par les prêtres à Gorée au Sénégal. Il serait par là l’un des premiers catholiques de la Haute Volta à l’instar de Alfred Diban Ki-Zerbo, le père de Joseph Ki-Zerbo. Sa femme, Anne Salga Doua, fut une princesse qui a fui un mariage forcé dans son village au Ghana pour suivre la mission catholique à Ouagadougou. Laurent Ghilat Paré était le fils unique de cette union.

Très tôt, son père qui a lui-même suivi les prêtres à Gorée, au Sénégal, et en Haute Volta, va l’inscrire à l’école de la mission catholique en 1920. En 1925, Laurent Ghilat Paré entre au petit séminaire de Pabré. En 1933, c’est le tour du grand séminaire qu’il fréquentera jusqu’en 1938 avec Paul Zoungrana, le célèbre cardinal de la mission catholique. Il va se marier en 1939 avec Élise Remen, l’une des premières femmes catéchistes. Lorsque Laurent Ghilat Paré quitte le grand séminaire de Koumi, c’est à l’école de la Mission catholique qu’il va déposer ses valises en tant que moniteur de l’enseignement catholique. Les séminaires de la mission catholique ne délivraient pas de diplômes à l’époque. Mais très dévoué pour la recherche du savoir, Laurent Ghilat Paré va reprendre des études. Il passa avec succès le Certificat d’études primaires élémentaires (CEPE) avec ses élèves. En 1942, il entre à l’école normale et en sort en 1944 avec son diplôme d’instituteur qu’il couronna enfin en 1953 par le CAP.

Tour à tour, il participe à des activités et occupe des postes de responsabilité importants dans l’église : maître de chapelle, ancien scout, jociste, logiste, catéchiste volontaire, président du Conseil national de la communauté chrétienne catholique, organisateur du premier pèlerinage des catholiques de Haute Volta en terre Sainte de Jérusalem (1978). L’un des faits marquants de sa contribution dans l’église est sans doute l’organisation des pèlerinages. Il fut l’un des initiateurs majeurs de Yagma qui rassemble chaque année des milliers de personnes. Il s’est donné corps et âme pour la création du sanctuaire Notre Dame de Yagma.

Laurent Ghilat Paré fut un enseignant atypique. Dans toutes les écoles où il est passé, ses élèves se souviennent de ses chants en latin et de son investissement pour les préparatifs des fêtes de Noël et de Pâques. De 1947 à 1948, il fut directeur de l’école de Tourcoing (Bam). En 1954, il prend la direction de l’école de Manga. De 1954 à 1958, il va diriger l’école de Kologh-Naba avant d’être appelé au gouvernement. Il a beaucoup œuvré dans l’enseignement. En ouvrant le tout premier collège d’enseignement privé à Ouagadougou, il a donné une chance à des élèves exclus ou à des filles mères d’étudier. C’est le 17 octobre 1966 qu’il ouvrit le collège Laurent Ghilat Paré qui deviendra plus tard le lycée Saint Joseph aujourd’hui appelé communément lycée Saint Jo. Laurent Ghilat Paré a un attachement particulier pour ce nom. Il donna ce nom à presque tous ses enfants. Ses enfants témoignent à cet effet : « notre père vouait un culte particulier à Saint Joseph depuis le petit séminaire. A son mariage, disait-il, il a confié son foyer à Saint Joseph. Il nous disait que lorsqu’il avait des difficultés de tout ordre au séminaire et qu’il demandait l’intercession de ce saint, il en était délivré et il en avait fait son saint patron ».

Laurent Ghilat Paré n’avait pas de passion pour la politique. En 1948, le capitaine Michel Dorange l’approcha pour lui demander son aide dans ses missions politiques. Il refusa de se mêler de politique et décide de poursuivre sa carrière dans la mission et dans l’enseignement. Ensuite, ce fut le tour de Ouezzin Coulibaly, qui était vice-président du conseil du gouvernement sous la présidence de Yvon Bourges en 1957 de lui demander de participer à son action politique. Cette fois, il devait être nommé ministre de la jeunesse, des sports, de la formation technique et professionnelle. Mais toujours égal à lui-même, il refusa cette nomination. Mais en 1958, face à l’insistance de son ami qui venait d’être nommé ministre, il accepta de l’accompagner en tant que directeur de cabinet. C’est ainsi, qu’il occupa le poste de directeur de cabinet du ministre de la fonction publique en 1958. De 1961 à 1964, c’est dans l’éducation nationale qu’il va exercer cette fonction de directeur de cabinet. De 1964 à 1969, il est secrétaire général du CDPPP (Centre de développement et de perfectionnement pédagogique).

Laurent Ghilat Paré a été un homme de foi, un instituteur dévoué mais aussi et surtout un homme simplement humain. Il n’hésitait pas à partager son savoir, son argent et tout ce dont il disposait avec l’autre. Sa cour était remplie de gens de divers horizons. Il a même élevé des Béninois, des Togolais dans sa cour. A en croire sa famille, ce fut un père responsable, qui apportait du bonheur dans son foyer.

Wendkouni Bertrand Ouédraogo
Lefaso.net

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