Actualités :: Régime carcéral au Burkina : Nettoyer davantage les écuries

Un spectacle hollywoodien à Ouagadougou. Du presque jamais vu dans les annales du régime carcéral post colonial du Burkina. Le mercredi 29 septembre dernier, aux environs de 19h 30, contre toute attente et à la surprise générale, la Maison d’arrêt et de correction de Ouagadougou (MACO) a été secouée par un séisme inhabituel. Les locataires de cette bâtisse vieille de 41 ans étaient en révolte.

Officiellement, cette mutinerie a eu pour origine, une pénurie d’eau qui a privé les pensionnaires de ce liquide vital , surtout en cette période où le ciel semble avoir suspendu sa générosité et où les risques de déshydratation sont réels. Si on ajoute à cela, les conditions de détention de ces quelque 700 personnes (effectif officiel), on mesure à quel point tous les ingrédients d’une explosion généralisée étaient réunis.

En tous les cas, toute maison carcérale est potentiellement un volcan, susceptible de se mettre en ébullition à tout moment. Malheureusement, nos prisons, qu’il s’agisse de problèmes de leur désengorgement, de l’humanisation des conditions de détention et de la perception que nous avons du prisonnier, sont des volcans qui manquent parfois cruellement de vulcanologues pour détecter les moindres signes d’éruption. Toujours est-il que pour ce qui est de la MACO, un prisonnier a perdu la vie et 102 autres ont réussi à s’évader.

En cette période d’insécurité ambiante avec son lot de victimes et de familles inconsolables, une telle évasion ne peut qu’exacerber les angoisses des paisibles populations déjà traumatisées par les braquages et autres prises d’otages qui se sont terminés dans un bain de sang. En attendant que toute la lumière soit faite sur cette mutinerie , on est tenté de dire que ce qui est arrivé était presque prévisible.

En effet, bien que nos démarches pour déterminer le nombre exact des pensionnaires admis à la MACO aient été vaines, il est évident qu’il s’y pose un problème de sur-peuplement et de promiscuité. Nul besoin d’être devin pour savoir en effet que la population carcérale en 1963 , date de la construction du bâtiment, n’est plus la même que celle d’aujourd’hui en termes d’effectifs.

D’où l’impérieuse et urgente nécessité de procéder à une extension de cette bâtisse à défaut de construire des annexes à travers la ville. Il n’est donc pas exagéré de croire que la capacité d’accueil du bâtiment est limitée pour ne pas en dire plus.

Et la facilité avec laquelle les mutins ont pu démonter la grille sous les regards presque impuissants de leurs gardiens, en dit long sur le rapport de forces en défaveur de ces derniers et sur les moyens dérisoires dont ils disposent pour maintenir l’ordre. Ils ont pratiquement été pris en otage par des prisonniers qui ont inversé les rôles. De geôliers, ces gardiens se sont retrouvés dans l’inconfortable situation de prisonniers, contraints à laisser leurs proies disparaître dans la nature.

Mais au-delà de la lecture que chacun peut faire de cette situation, il y a une certitude qu’il ne faudrait pas nier au risque d’être en porte-à- faux avec cette psychose de l’insécurité qui s’est emparée des populations aux yeux desquelles, certaines initiatives prises à travers séminaires et autres rencontres paraissent parfois comme des coquilles vides.

La plupart de nos prisonniers ont le sentiment d’être des parias, des pestiférés et des laissés-pour-compte d’un système judiciaire qui se presse lentement de les juger en les maintenant dans une longue, lassante et desespérante garde à vue au cours de laquelle ils risquent, en côtoyant d’autres prisonniers qui ont commis des délits plus graves, d’être perdus à jamais. Cette contrainte à la cohabitation contagieuse et dangereuse avec certains prisonniers célèbres, peut être fatale pour ceux qui ont commis des délits de moindre gravité. Certes, dans toute peine d’emprisonnement, il y a un volet sanction, bien entendu. Mais, une telle sanction devrait plutôt viser un objectif pédagogique.

Un trop long séjour en prison sans jugement comporte des conséquences préjudiciables pour l’individu parce qu’il fait non seulement fi de la présomption d’innocence dont pourrait bénéficier un condamné, mais conforte également la perception négative qu’a l’opinion publique du prisonnier en Afrique. Le cas est plus aggravé lorsqu’un prisonnier, après ce parcours du combattant pour obtenir son jugement , se retrouve au bout du compte, victime d’une erreur judiciaire. Généralement, il ne bénéficie pas de la moindre excuse pour le préjudice moral subi encore moins d’une quelconque mesure de dédommagement. Toujours est-il que si on n’y prend garde, ce qui vient de se produire à la MACO risque d’être le signe avant-coureur d’une fronde généralisée.

D’abord parce que personne ne peut prédire ce qui se passe dans la tête de ces 102 prisonniers en cavale. Ensuite, il n’est pas non plus exclu que ce coup fasse des émules parmi d’autres détenus. En tout état de cause, tout en reconnaissant les efforts déjà accomplis, il est plus que jamais urgent de nettoyer davantage les écuries de nos prisons et d’éteindre cette poudrière que constituent nos maisons carcérales. D’où l’urgence et la nécessité de doter résolument les ministères de la justice et de la sécurité de tous les moyens humains, matériels et financiers, aux fins de garantir la quiétude des populations en termes sécurité et de justice.

Le Pays

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