Avec le ramadan, les alentours des moquées sont pris d’assaut par les « garibous », ces pensionnaires des écoles coraniques à qui se mêlent des mendiants occasionnels ou professionnels. A la recherche de leur pitance quotidienne et celle de leurs maîtres, ils bravent les quolibets et autres insultes des potentiels donateurs qu’ils harcèlent sans répit. Souvent, ils sont même accusés, à tort ou à raison d’être des voleurs, des consommateurs de drogue, des violeurs. Dans la matinée du mercredi 8 septembre 2010, nous avons suivi Dramane, qui tend la sébile du côté de la grande mosquée de Ouagadougou. Très loquace, il a égrené le chapelet des difficultés auxquelles lui et ses camarades sont confrontés, tout en reconnaissant que le mois de jeûne lui permet de faire de bonnes affaires.
L’affluence est importante autour de la grande mosquée de Ouagdougou, où ont élu domicile, de nombreux mendiants de tous âges et des deux sexes en cette période de Ramadan. Assis le long de l’artère principale de ce lieu saint, ils usent de tous les moyens, des regards implorants aux psalmodies, pour solliciter la générosité des passants. Les plus jeunes eux se faufilent dans la circulation et se livrent à une course poursuite pour essayer d’arracher quelques sous à tous ceux qui marquent l’arrêt du feu tricolore situé à quelques mètres principale de la mosquée. Souvent plusieurs « boîtes » servant à recueillir les dons, s’entrechoquent, mettant dans l’embarras le donateur qui ne sait plus ou jeter sa pièce de monnaie.
Dramane et son jeune cousin, âgés respectivement de 15 et 13 ans, habitent au secteur N°10 de Ouagadougou. Dès le lever du jour, ils quittent la maison de leur maître pour aller demander l’aumône.
Celui-ci ayant voyagé, son suppléant a modifié l’heure de la lecture du Coran, la ramenant à 16h et 16h30. Vêtus de haillons, ils arpentent tous les coins de la ville. Des concessions d’individus aux bars-dancing et autres restaurants maquis. Ils se donnent toutes les chances de trouver les 100 francs CFA, la somme minimale exigée et imposée par le maître. Dramane est révolté contre les difficultés vécues dans certains endroits : « Dans les bars, il y a des gens qui mettent la bière dans ma sébile, alors qu’ils savent bien que ma religion m’interdit l’alcool ». Paradoxalement, c’est dans ces lieux qu’il rencontre les bienfaiteurs les plus généreux. « Dans les bars et maquis, il m’arrive de tomber sur des gens en bonne compagnie, et la femme les incite à être généreux », révèle le garibou. Avec le ramadan, il reconnaît faire de bonnes affaires.
« On n’a plus besoin de trop tourner, pour avoir à manger. Les gens sont larges ». Par contre, les mois les plus difficiles, c’est mars et avril. « On dirait que cette période est difficile pour tout le monde. Les gens sont agressifs et deviennent subitement méchants. Certains nous donnent même des repas avariés », affirme t-il. Les misères, les garibous les rencontrent aussi sous d’autres formes. Nombre d’entre eux sont ainsi détenus dans les cellules des commissariats de police ou des prisons civiles, pour consommation de drogues, de viols de filles et de vols, déplore Dramane.
Joël Zoundi
Fasozine
