Actualités :: LUTTE CONTRE LE GRAND BANDITISME : "La Justice est victime d’attaques (...)

Le Syndicat autonome des magistrats du Burkina (SAMAB) veut remettre les pendules à l’heure, quant à l’action de la Justice dans la lutte contre le grand banditisme. C’est le sens de la déclaration ci-dessous.

Citoyens burkinabè, le SAMAB a constaté avec vive préoccupation la diffusion de l’intervention du gouverneur de l’Est dans le Journal télévisé de 20h du mercredi 07 juillet 2010 et le Sidwaya n°6710 du mercredi 07 juillet 2010. Cette intervention serait anodine pour notre syndicat si l’intervenant n’avait pas tenu des propos très tendancieux qui interpellent plus d’un.

De l’intervention du gouverneur de l’Est

Lors de la rencontre du ministre de la Sécurité dans la région de l’Est, tenue le 05 juillet 2010, le gouverneur de ladite région affirmait que le découragement des éléments de la sécurité et le refus parfois de la population de collaborer ont une seule explication : "il s’agit du relâchement quasi- quotidien de certains bandits appréhendés et mis à la disposition de la justice. Cette situation, si elle va perdurer, ne sera rien d’autre qu’un recyclage des hors-la-loi afin de les rendre plus performants."

De l’inopportunité et de la fausseté des propos

Cette sortie grave de sens laisse tout le monde perplexe notamment au sein de la famille judiciaire.

En effet, la justice est un maillon essentiel de la lutte contre le banditisme en ce sens qu’elle est la dernière, celle qui est chargée d’appliquer la sanction. La justice est chargée d’appliquer des lois et textes réglementaires qu’elle n’a pas adoptés. Ces lois garantissent des droits et libertés au profit des citoyens quel squ’ils soient. Au surplus, les codes de procédure pénale et pénal ne laissent aucune liberté au juge de statuer selon son bon vouloir. Le magistrat est le serviteur de la loi, le fidèle serviteur de la loi. C’est pourquoi, loin de la publicité, loin des tambours et trompettes, il joue son rôle conformément aux lois mises à sa disposition. Contrairement à certains, la justice ne peut pas fouler aux pieds les lois pour un souci d’efficacité et que dire encore. Les infractions relatives au grand banditisme sont qualifiées de crime et pour ce faire font l’objet d’une information obligatoire dans un cabinet d’instruction selon les cas. Au cours de cette information, la détention peut s’avérer nécessaire.

Avant l’adoption de la loi sur le grand banditisme, il n’existait aucun texte juridique dérogatoire pour le traitement spécifique des infractions en matière de grand banditisme de sorte que les détentions préventives des grands bandits étaient appelées à prendre fin avec la fin de l’information judiciaire. Ces dossiers pouvaient être jugés plusieurs années après la commission de l’infraction. La détention préventive n’étant pas une peine mais une mesure exceptionnelle, le juge d’instruction ne peut pas étendre à souhait et sans raison sa durée sans violer la loi. La qualité d’une bonne procédure judiciaire dépend pour beaucoup de la qualité de l’enquête initiale et surtout des preuves réunies à l’occasion. Le procès pénal est avant tout un procès fondé sur la preuve. Le magistrat juge sur la base des preuves dont l’administration obéit à un formalisme légal. Sans preuve pertinente et valable, il ne peut condamner.

Il est incommodant d’affirmer que la justice recycle des bandits et du reste, de tels propos ne sont rien d’autres que de la diffamation et pire s’analysent comme une volonté manifeste de jeter le discrédit sur l’institution judiciaire, toutes choses qui sont répréhensibles au regard de notre droit positif. Ils méritent d’être dénoncés et condamnés sans équivoque. En tout état de cause, le SAMAB se réserve le droit d’en tirer toutes les conséquences devant les juridictions. En vérité, affirmer que la justice ne joue pas efficacement son rôle républicain dans la lutte contre le grand banditisme relève de l’ignorance. Même si cela n’est pas le rôle du SAMAB de communiquer sur l’activité des juridictions, il est pertinent dans le cas d’espèce de citer quelques décisions rendues en application de la loi portant répression du grand banditisme :
- TGI Kaya, audience du 11 novembre 2009, D.P. et autres poursuivis pour vols à mains armées, recel aggravé, incitation au vol. Condamnés à 15 ans de prison dont 10 ans fermes, 05 ans avec sursis et 07 ans de sûreté ;

- TGI Kaya, audience du 16 avril 2010, S.T. poursuivi pour vols à mains armées, coups et blessures volontaires. Condamné à 30 ans dont 20 ans fermes, 10 ans de sursis et 15 ans de sûreté ;
- TGI Fada, audience du 17 mars 2010, N.D. poursuivi pour vols à mains armées et condamné à 10 ans fermes ;
- TGI Fada, audience du 17 mars 2010, D.T. poursuivi pour vols à mains armées et condamné à 07 ans fermes ;
- TGI Fada, audience 10 mai 2010, B.Y. poursuivi pour vols à mains armées et condamné à 10 ans fermes ;
- TGI Ouagadougou, audience du 04 juin 2010 :

* I.A. poursuivi pour vols à mains armées, condamné à 25 ans fermes dont 15 ans de sûreté ;

* Y.A. poursuivi pour vols à mains armées. Condamné à 20 ans fermes dont 15 ans de sûreté.

* F.T. poursuivi pour vols à mains armées, condamné à 20 ans fermes dont 15 ans de sûreté ;
- TGI Ouagadougou, audience du 21 mai 2010, S.L. poursuivi pour vols à mains armées, condamné à 25 ans fermes dont 15 ans de sûreté ;
- TGI Ouagadougou, audience du 27 mai 2010, I.D. poursuivi pour vols à mains armées et condamné à 05 ans fermes ;
- TGI Ouagadougou, audience du 11 juin 2010, 0.0. poursuivi pour vols à mains armées et condamné à 50 ans fermes dont 40 ans de sûreté. Ces quelques cas non exhaustifs montrent bien que les juridictions appliquent avec rigueur les textes en vigueur. Condamner le travail d’une institution, stigmatiser son activité sans fondement est un comportement dangereux et c’est ce que la justice a pour mission d’éviter. Eviter de juger sur la base de l’évidence première, sans preuve doit être la maxime de toute démarche rationnelle en matière de jugement.

Les statistiques judiciaires existent et ceux qui veulent les consulter peuvent le faire pour avoir la réalité du travail des magistrats. La force de la justice réside dans sa sérénité olympienne et dans le fait qu’elle n’a de comptes à rendre qu’à la loi. En réalité, la justice est très soucieuse de la sécurité des citoyens. Elle ne demande qu’à accomplir sa mission dans le strict respect des lois en vigueur et en premier lieu, la Constitution. Rendre justice c’est s’éloigner du débat passionné pour, en toute sérénité examiner les litiges à elle soumis, écouter les protagonistes et surtout être à distance des évidences trompeuses. En fait, la justice a bien des critiques à formuler en sa qualité de gardienne des libertés collectives et individuelles sur des pratiques qui sont aux antipodes de la légalité et du respect des droits humains et de l’Etat de droit. Seulement, elle le fait et sait le faire dans des cadres constructifs, appropriés, républicains et ce dans le respect des institutions car une république ne saurait se construire durablement sur des querelles ou des dénigrements inter institutions.

Pas de Burkina démocratique sans une justice forte

Citoyens burkinabè,

le SAMAB est soucieux du rôle de la justice dans l’édification de l’Etat de droit. C’est pourquoi, depuis sa création en 1983, il n’a cessé de lutter pour une justice indépendante à l’abri de toute pression. Ce combat, le SAMAB vous invite à le mener avec lui car il ne saurait y avoir de Burkina démocratique sans une justice forte, indépendante. C’est pourquoi d’ores et déjà, nous répondrons toujours présents à chaque fois que la justice sera injustement mise en cause. Le SAMAB interpelle le ministre de la Justice, Garde des Sceaux à donner un éclairage sur les procédures en matière judiciaire et l’activité des juridictions et invite solennellement le président du Conseil supérieur de la magistrature (CSM) à garantir l’indépendance de la justice contre les attaques gratuites auxquelles elle est l’objet.

Cela est d’autant plus crucial qu’il est donné de constater dans le cadre de la décentralisation que les représentants de l’exécutif au niveau local analysent faussement leurs rapports avec les juridictions. Est-il besoin de rappeler que la séparation des pouvoirs telle que consacrée par la Constitution du 11 juin 1991, proscrit l’immixtion des pouvoirs les uns dans les fonctions des autres ? Les magistrats des juridictions sont les représentants du pouvoir judiciaire, et à ce titre, ils n’ont d’injonctions à recevoir des représentants des autres pouvoirs notamment des gouverneurs sous peine de tomber sur le coup de l’infraction d’immixtion dans les fonctions judiciaires. Camarades militants, le comité exécutif vous invite à la mobilisation pour de futures batailles pour une justice à l’abri des pressions.

Ouagadougou, le 15 juillet 2010

P/Le Comité Exécutif National

Le Secrétaire Adjoint à la Communication ZABSONRE T. Bruno

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