Actualités :: Rood woko : Duel entre François et Simon par commerçants interposés (...)

Un deus ex machina (fléau des dieux) s’abat-il sur Rood-Woko ? On n’est pas loin de le penser tant la belligérance entre autorités municipales et commerçants semble vive. Les seconds accusent les premiers de vouloir nuire à leurs affaires par des mesures draconiennes. Les premiers, le maire Simon Compaoré en tête, rétorquent aux seconds que le Rood-woko relooké à coups de milliards ne saurait tolérer le " bordel " en son sein. Surenchères et escalades verbales font rage. C’est l’impasse ! La verrue et la chienlit se réinstallent… La ligne de démarcation est si nette que certains commerçants, trouvant Simon Compaoré trop va-t-en guerre, en appellent à une implication personnelle du Chef de l’Etat dans la gestion du dossier du marché central de Ouagadougou.

Du coup, quelques analystes estiment que les revendications des commerçants sont maximalistes et que l’appui d’un politicien, désireux d’évincer Simon, ne serait pas étranger à cette situation. Petit à petit, un cocktail explosif se constitue autour de Rood-Woko. A cette allure, il faut craindre que le 27 mai 2003 n’ait servi à rien. Les mêmes causes risquent alors de produire les mêmes effets.

La guéguerre entre Simon Compaoré et les commerçants prend les allures d’une confrontation à distance entre le bourgmestre et François Compaoré. Il est de notoriété publique que les rapports entre les deux hommes, n’en déplaise aux professions de foi mirifiques de Simon, sont loin d’être au beau fixe. C’est même peu de le dire ! Il se rapporte que Simon serait difficilement malléable par François dont l’ambition serait pourtant de placer des hommes acquis à sa cause à des positions stratégiques. On se rappelle qu’aux lendemains des dernières municipales, une tentative de mettre Simon à l’écart avait été entrepris par ce qu’on nomme improprement le clan de François. Simon ne devra sa place qu’à la fougue d’un certain Salif Diallo qui se précipitera pour proclamer que le CDP n’a pas encore secrété quelqu’un d’autre que Simon pour gérer la mairie. Il n’ y a pas longtemps, c’était le mythique groupe Yeleen (aujourd’hui plutôt dans l’expectative) qui s’en prenait de façon virulente à la gestion du maire central à travers un titre au vitriol dans son dernier album " l’œil de Dieu ".

A écouter ce titre, M. le Maire, c’est comme si le pauvre Simon ne faisait que précipiter la descente aux enfers de Ouagadougou. Yeleen n’y va vraiment pas du dos de la cuillère. Plus tard, on apprendra, des aveux mêmes de Smarty, l’un des membres du groupe, que Yeleen avait reçu 10 millions de François Compaoré pour la sortie de cet opus que certains ont qualifié d’assassin pour Simon. Ce qui se susurrait entre quatre murs, se révéla désormais au grand jour. La rivalité, voire l’antipathie entre Simon et François était et est bien établie. Après Yeleen qui a appelé quasiment à une mise à l’écart de l’édile de la ville, aujourd’hui, ce sont les commerçants qui exigent qu’il rende gorge. Et ils tiennent mordicus à leurs positions. Le maire également ne veut pas se laisser tondre comme un mouton de panurge. C’est à ce niveau justement que le bât blesse dans la mesure où avec des positions aussi tranchées, toute tentative de dialogue tourne pratiquement au pugilat.
Il y a vraiment du " feu dans l’air " pour reprendre une expression bien chère au maire ces derniers temps… Pourtant, l’anarchie tisse à nouveau sa toile à Rood-woko. Comment y mettre de l’ordre ? Peut-on faire des omelettes sans casser les œufs ?

Les commerçants ne doivent pas être des hors-la-loi !
Le 20 novembre dernier, les commerçants ont tenu une Assemblée Générale à la Bourse du Travail pour faire étalage de leur plate-forme revendicative adressée au maire. Ainsi, exigent-ils la suspension des barrières, le déguerpissement des policiers postés aux alentours du marché, la suppression de la zone piétonne pour en faire un sens unique comme de par le passé, le retour du parking des véhicules à son lieu antérieur. Les commerçants affirment que les mesures sécuritaires dissuadent la clientèle. Leurs affaires tourneraient donc au ralenti. Ils tiennent également à la présence des vendeuses de nourriture aux abords du marché, pour disent-ils, pouvoir s’alimenter sans effectuer de longues distances. En sus de ces points, les commerçants revendiquent aussi une réduction de 50% des frais de location.

Ils soutiennent qu’ils ne paieront plus ces frais de location si leurs revendications n’étaient pas satisfaites. Mais les commerçants sont plutôt sceptiques et circonspects puisqu’il y a eu une rencontre entre leur syndicat et le maire le 18 novembre 2009. A l’issue de cette rencontre, affirment-ils, aucune de leurs revendications n’a été jugée recevable par le maire qui opterait de s’enfermer dans sa tour d’ivoire et qui voudrait imposer ses points de vue aux commerçants. Estimant que Simon Compaoré est réfractaire à toute contestation et qu’il n’est pas ouvert au dialogue, les commerçants en appellent alors à la médiation du président Blaise Compaoré. Simon qui affirmait que ses cheveux repousseraient avec l’ouverture du marché en avril dernier, doit véritablement s’arracher le peu qui lui en reste… Non. Le maire ne veut pas manger du pain des commerçants. Il tape du poing sur la table : " Rood-woko ne connaîtra plus jamais le bordel ".Pour le maire, les mesures préconisées sont en faveur des commerçants et de tous les Burkinabè. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, l’absence de mesures rigoureuses de fonctionnement du marché conduira effectivement au scénario cauchemardesque de 2003.

La suppression de la zone piétonne aura par exemple pour conséquence entre autres l’anarchie, l’insécurité, les encombrements, les risques d’incendies, l’inaccessibilité des secours en cas de sinistres. L’absence des éléments de sécurité peut favoriser toutes sortes de trafic et de pratiques mafieuses sur le marché. Leur présence permet au moins de discipliner les uns et les autres.
Mais, c’est une question délicate car le moindre écart de conduite d’un camp comme de l’autre peut mettre le feu aux poudres. Le cas s’est produit le 16 juin dernier avec la mort d’un jeune homme fauché par un camion suite à une poursuite effectuée par un policier. Les commerçants se sont attaqués aux symboles de la sécurité dans le marché. La police municipale débordée avait dû demander le renfort des CRS. Mais le bilan était lourd. D’importants dégâts matériels et toutes les guérites de la police ont été détruites. Selon les autorités communales, les pertes s’élevaient à plus de 40 millions de francs CFA. Suites à ces accrochages, la police battra retraite pour ne réapparaître sur le marché que le 03 novembre 2009. Depuis ce retour, commerçants et policiers se toisent.
Simon doit accepter le dialogue.

Si les revendications des commerçants sont compréhensibles, il n’en demeure pas moins qu’un marché ne saurait fonctionner sans ordre et discipline. C’est parce qu’il y a eu un tel laxisme que l’incendie du 27 mai 2003 s’est produit. Les nouvelles mesures visent à garantir la quiétude. La municipalité qui a contracté d’énormes prêts ne peut pas tolérer que des individus, de par leur agissement et de par l’appât du gain, enflamment à nouveau le marché. Il faut être réaliste. La réfection du marché a en effet couté 3,5 milliards. La commune s’est endettée à hauteur de 1 311 912 000 FCFA auprès de l’Agence française de développement (AFD). Avec un taux de 2,48/an, ce prêt est remboursable en 15 ans avec 5 ans de différé. L’AFD a également consenti une subvention non remboursable de 2 066 261 400 FCFA à la commune. L’Etat burkinabè a contribué à hauteur de 500 millions FCFA. Il appartient aux commerçants de développer de nouvelles stratégies de marketing pour attirer la clientèle tout en respectant les normes en vigueur.

Cela est d’autant plus nécessaire que les commerçants sont signataires des règles qu’ils rejettent aujourd’hui. A partir de cet instant, ces règles acquièrent un caractère exécutoire et doivent de fait s’imposer à toutes les parties au contrat. C’est au tout début que les commerçants auraient dû dénoncer le caractère inique ou dolosif des dispositions qui leur étaient soumises. Aujourd’hui, fouler aux pieds des règles pour lesquelles ils ont manifesté leur consentement est aux antipodes de la loi. Cela dit, Simon Compaoré ne doit pas non plus céder à la tentation de traiter les commerçants comme des moins que rien. Il doit accepter le dialogue. A quoi ressemblerait un marché sans commerçant ? Il faut éviter la stigmatisation et les propos qui sont de nature à jeter de l’huile sur le feu. Personne n’a intérêt à ce que le marché vivote. Il faut donc que chacun mette de l’eau dans son vin.

La tempête emportera-t-elle Simon ?

En réalité, les rapports entre autorités communales et commerçants ont toujours été tumultueux. Ainsi, après l’incendie de 2003, las d’attendre l’aménagement d’un site provisoire, certains commerçants ont voulu se retrouver le 12 février 2004, sur leur lieu de travail à Rood Woko pour se concerter. Ils seront brutalement pris à partie par les forces de sécurité. La féroce répression laissera de nombreux blessés sur les carreaux. Certains ont même été amputés. Les commerçants écœurés s’en prendront aux symboles de l’Etat et particulièrement à ceux de la Commune de Ouagadougou, causant ainsi d’importants dégâts matériels. Cet orage passé, il y aura l’affaire dite des " 50 millions ". De 2001 à 2003, Ousmane Tapsoba et Moussa Dabo dirigeaient le Collectif des associations et syndicats de commerçants qui avait engagé une lutte féroce contre leurs homologues syro-libanais qu’ils accusaient de concurrence déloyale.

Pour les soutenir et surtout afin d’éviter que les commerçants ne fassent tandem avec le Collectif contre l’impunité, Blaise Compaoré essaiera de les soudoyer avec la somme de 50 millions. La mission sera confiée à Oumarou Kanazoé, à Alizeta Gando et à Ilboudo Tintin. Ayant accepté l’argent mais ne voulant pas se faire instrumentaliser, les deux commerçants subiront bien des misères avant d’être condamnés le 16 octobre 2006 à 14 mois de prison ferme (peine qu’ils avaient purgée en préventive) et au remboursement à El hadj Oumarou Kanazoé des 50 millions litigieux plus 15 autres briques de dommages-intérêts. Aujourd’hui, nous sommes à la veille d’échéances électorales majeures. Après avoir été des alliés de Simon dans sa bataille contre le Collectif contre l’impunité et pour la refondation démocratique, les commerçants semblent se retourner contre lui. Dans ce duel féroce, le nom de François Compaoré est souvent cité. Et comme toujours, Blaise ne semble pas s’intéresser à " ces histoires ". Après avoir été porté en triomphe au CDP, Simon Compaoré passera-t-il à la trappe comme bien d’autres avant lui ? Wait and see. Il serait seulement regrettable que le marché Rood-Woko, l’instrument stratégique de l’économie Burkinbè soit utilisé comme cheval de Troie pour exacerber les contradictions politiques des clans et gravitent autour du système !

Par Issac Konfé


Rood Woko : Diagnostic erroné, solutions inadaptées

Autant la monotonie est source de léthargie, autant le fait de revenir sur un sujet aussi fréquemment qu’avec les mêmes protagonistes et les mêmes tensions, apporte lassitude et incompréhension. En deux mois, l’ensemble de la " littérature " sur Rood Woko suffit pour une publication livresque de 100 pages. Simon et les locataires du marché sont à couteau tiré. Les blocages pourraient se lire sous plusieurs angles.
Primo, on avait pensé que les conclusions de la commission ad d’hoc constituaient la concentrée de l’entente entre la mairie et les commerçants. A la présentation dudit document, le maire a insisté auprès des représentants des structures syndicales, sur la nécessité de donner la bonne information à la base, pour éviter les polémiques. Personne n’a opposé un refus au maire, les travaux étant un fruit collectif.

Les sorties des commerçants interrogent sur la légitimité des conclusions de ladite commission : les méthodes de travail de la commission ad hoc ont-elles été validées par les représentants des commerçants et leur base ? Les résultats des travaux ont-ils fait, en première instance, l’objet d’une restitution/amendement au niveau de chaque partie ? Les représentants des commerçants ont-il été sincères avec leur base et les autres membres de la commission ?

A défaut de répondre à ces questions, on fera remarquer que dans le contexte du marché avec toutes les contradictions à l’interne, la commission ne devrait pas se fier uniquement à la démocratie sur la base de la raison du plus grand nombre en son sein. Car, en réalité mis en minorité, les représentants des commerçants signeront par principe ou suivisme le document final. Il reste qu’à l’application, le problème va se poser et les contradictions portées par leurs camarades l’emporteront. C’est ce qu’on pourrait appelé le " paradigme de Linas Marcoussis " : Gbagbo appose sa signature tout en sachant que la situation sera différente dans l’application !

Secundo, il est établi que le groupe des commerçants fait partie de ceux que l’on mobilise à tout bout de champ pour défendre la position de particuliers, notamment politiques et économiques. Il se pourrait alors, que des gens profitent de l’occasion pour tirer les ficelles. Cela, ajouté à " l’intransigeance " et au reflex de " combat " de Simon Compaoré, donne un cocktail explosif car tout frottement produit de la chaleur. Et l’odeur de cette chaleur n’est pas toujours bonne.

Tertio, et ce que l’on peut estimer comme le point essentiel, c’est évidemment le parallélisme actuel entre l’impératif de rentabilité/rentabilisation et celui du sécuritaire. Les commerçants habitués à une certaine culture du marché ou ayant la nostalgie de Rood-Woko d’antan, voudraient réunir les conditions qui passent, selon eux, par la satisfaction de certaines revendications : suspension des barrières de police, déguerpissement des policiers présents autour du marché, suppression de la zone piétonne, retour du parking auto à son lieu antérieur. En réalité, Rood Woko peine à attirer son monde d’antan. Les commerçants, malgré toutes les raisons qui pourraient expliquer le " désamour " du public vis-à-vis de leur marché fétiche, préfèrent s’arc-bouter sur des éléments dont la nuisance à la rentabilité de leur activité reste entièrement à prouver. En exemple, Ouagadougou dispose de 05, plutôt 12 arrondissements bientôt, 45 secteurs, dans une superficie étendue, avec des marchés un peu partout et où se vendent les mêmes produits qu’à Rood-Woko. La concurrence est très déterminante et morcèle la clientèle. Il y a quelques années, l’emplacement du marché, constituait le centre de Ouagadougou. Le Ouaga de 2009 ignore totalement cette réalité. En identifiant mal leur problème, les commerçants apportent des solutions inadaptées à leur équation commune. Malheureusement encore, ces solutions inadaptées se heurtent à la nouvelle donne du marché marquée par des règles de sécurité bien définies. La mairie qui en assure la responsabilité ne saurait tolérer l’atteinte à ses règles.

N’empêche ! Personne ne sort gagnant dans le bras de fer, s’il doit perdurer. Rood Woko sera paralysé ou fermé ; les commerçants s’en iront ; la mairie perdra une source de revenus et devra se débrouiller pour rembourser les prêts contractés pour la réhabilitation avec en prime, une image ternie. Alors, négocier vaut mieux que jouer au brave. Les deux parties doivent aussi intégrer le fait que Rood Woko doit s’orienter autrement ou végéter pour ne pas dire disparaître. Les projets en perspectives dans la ville donneront la preuve dans un futur prochain ou lointain !

M.N

Par Bendré

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