Actualités :: Lotissement de Zongo : Séraphine fonce malgré les passions

Les opérations d’attribution de parcelles ont bel et bien démarré à Zongo dans l’arrondissement de Boulmiougou. Contre vents et marées, la mairie a décidé d’en finir avec la question de Zongo malgré les vagues de protestations et les mouvements d’humeurs que soulève la question sur le lotissement de ce village périphérique situé à l’entrée ouest de Ouagadougou. Une partie de la population réclame la publication de la liste des attributaires. Pendant ce temps une discorde autour des membres de la commission d’attribution divise le maire et le chef de Zongo.

Ce matin du 20 juillet, c’est le maire Séraphine Ouédraogo en personne qui dirige l’équipe d’attribution des parcelles à Zongo. Quelques jours auparavant, des protestataires avaient exigé la publication de la liste des attributaires établis par la mairie. Ils avaient juré de tout faire pour empêcher les opérations tant que leurs exigences ne sont pas prises en compte par la mairie. Ce matin, un dispositif sécuritaire assez important est mis en place. Une quinzaine d’agents de sécurité composés de gendarmes, de la police nationale et municipale sont là pour assurer la sérénité. L’équipe sillonne les différents taudis pour positionner ceux qu’elle estime prioritaires.

Devant chaque cour visitée, le propriétaire des lieux est appelé à présenter les documents du recensement. Si lesdits documents sont conformes, l’intéressé est positionné sur le plan, mais sa parcelle ne lui est pas indiquée. Leur nom sera ensuite publié à la mairie et c’est à l’issue du payement des droits que les bénéficiaires connaîtront l’emplacement exact de leur parcelle. Une nouvelle méthode qui fait grincer des dents. Pour le maire de Boulmiougou, c’est une méthode qui permet à la fois de contrôler une dernière fois et d’aller plus vite dans les attributions. A peine arrivée, l’édile de Boulmiougou est interpellée sur le cas d’une dame qui n’a pas été prise en compte et qui vit pourtant dans le quartier depuis 8 ans. Accompagnée de quelques collaborateurs, le maire retourne sur les lieux pour vérifier. La dame est soumise à un petit interrogatoire. La vieille insiste et persiste pour convaincre l’équipe qu’elle vit dans le quartier. Le maire fait le tour de la maisonnette de 8 tôles où vit la dame.

Les voisins sont appelés à venir témoigner. Ils sont là. Tous confirment ce que la vieille dit. "Elle vit bel et bien ici madame le maire.C’est une veuve qui a été contrainte de quitter sa famille à Pissy pour venir ici il y a 8 ans.", témoigne "le maire de Koudougou".un jeune bien connu dans la zone. Le maire se résigne à accepter les différents témoignages. La veuve sera prise en compte et elle aura sa parcelle. Séraphine Ouédraogo l’invite à les suivre pour rejoindre l’équipe qui se trouve à quelques 200m de là. En cours de route, Séraphine hésite toujours. Elle n’est pas convaincue de tout ce qui vient d’être dit. Elle repose une dernière question à la quinquagénaire. Est-ce que vous n’avez pas une parcelle dans l’arrondissement de Boulmiougou ? "Non", répond immédiatement la dame. Ceux qui ont déjà eu une parcelle ailleurs dans l’arrondissement sont écartés dans le principe. Le maire décroche son téléphone portable. Elle téléphone au bureau pour demander une vérification sur place. Elle a vite la réponse au bout du fil. Elle est désormais convaincue. Le groupe rejoint l’équipe et la veuve est prise en compte. Soulagement autour d’elle. Les voisins et les parents qui étaient là pour la soutenir la félicitent.

Des deals autour du récensement

C’est le mardi 7 juillet que l’opération d’attribution a commencé officiellement à Zongo. Les populations de Zongo ont été rencontrées ce jour là et les conditions d’attribution ont été expliquées aux milliers de personnes qui attendent depuis maintenant 7 ans. Chacun espère qu’on viendra lui indiquer enfin les 4 bornes dans lesquelles il pourra bâtir son logement. Mais une chose est sûre.

Tous n’auront pas de parcelle. Et cela a été clairement dit lors de l’assemblée générale explicative. Ceux qui sont prioritaires sont au nombre de 6511, selon la mairie. Dès le lendemain, de nombreux contestataires sont allés manifester devant la mairie pour exiger que la liste des attributaires soit publiée. Pour eux, c’est la meilleure façon de savoir si la liste reflète la réalité du terrain et d’éviter les fraudes. "Nous nous connaissons tous à Zongo. Si on publie la liste, nous allons savoir détecter les cas de fraude dès à présent.", Souligne un des protestataires. Un souci de transparence que partage le maire. Mais pour elle, cette nouvelle méthode qui veut que la liste soit publiée après le positionnement permettra de faire un dernier toilettage de la liste sortie du dernier contrôle et d’aller plus vite dans cette opération. Deux contrôles ont été effectués à Zongo depuis le début du processus de lotissement commencé en 2002. Les 26 équipes qui ont sillonné premièrement la zone pour faire le recensement des résidents ont présenté un total de 53000 personnes.

Que s’est-il passé dans ce village qui ne dépasse pourtant pas 10 000 personnes. Un premier contrôle permet de découvrir le scandale. Des membres des différentes équipes ont profité pour faire des affaires. Des petits malins ont dans un laps de temps construit leur maisonnette pour se faire recenser tout en résidant ailleurs, d’autres gros spéculateurs proposaient de l’argent à certains membres des équipes pour acheter les reçus du recencement. Certaines équipes ont vendu ces documents du recensement comme de petits pains. Le premier contrôle établit qu’il n’y a que 7000 vrais résidents à Zongo. Cette liste a été publiée en septembre 2008 à la mairie de Boulmiougou. De nombreuses personnes contestent la liste, estimant qu’elle n’est pas fiable. Des marches de protestations sont organisées et la liste est arrachée et déchirée par les contestataires. Au niveau de la mairie, on est conscient aussi que des gens ont pu profiter de ce contrôle.

Et certains ne sont pas loin de la mairie. Séraphine en est consciente. Certains de son entourage n’hésitent pas à profiter quand l’occasion se présente. "Les gens mangent et mettent les os sur ma tête", confie-t-elle. Certaines personnes avaient été mises en cause dans les opérations de recensement à Zongo. Trois d’entre elles ont été écrouées puis libérées par la suite sans procès. Une situation qui a embarrassé les autorités municipales qu’on accuse d’avoir fait libérer les fraudeurs. Le maire affirme qu’elle n’y est pour rien dans la libération des présumés fraudeurs. Suite aux protestations contre la liste publiée en septembre, une assemblée générale est encore organisée en octobre 2008 pour la préparation d’un nouveau contrôle. Les jeunes originaires de Zongo exigent qu’on leur confie la mission. Ils obtiennent l’aval de la mairie et pendant 7 mois, ces jeunes revisitent les maisons sans contrepartie financière et proposent une nouvelle liste à la mairie. Ils estiment les vrais résidents de Zongo à 7041. Un chiffre qui n’est pas très loin du travail fait par les précédents contrôleurs.

A l’issue de tous ces contrôles, la mairie a désormais fait sa décantation et établi une liste qu’elle pense plus réaliste. Le nombre réel des résidents est estimé à 6511 personnes. Les non résidents sont au nombre de 9015 et les demandeurs 2473. Il y a aussi plus 1242 cas d’irrégularité. Des gens ayant déjà une parcelle à Boulmiougou ou ayant des documents qui ne concordent pas avec les références enregistrées à la mairie. Ce qui fait un total de 19 241 personnes inscrites. Le nombre de parcelles dégagées se situerait entre 6000 et 7000 pour cette première phase d’attribution. Pour le maire de Boulmiougou, vu les états, il n’y a pas de raison que les 6511 personnes qui méritent d’avoir une parcelle ne soient pas satisfaites. Les situations particulières seront analysées au cas par cas, selon le maire qui dit vouloir sortir la tête haute au bout de ce dernier lotissement dans son arrondissement. En attendant, des problèmes réels persistent sur le terrain.

Deux membres de la commission contestés

Le maire doit résoudre ce qui l’oppose aujourd’hui au chef coutumier de Zongo. Deux membres de la commission sont contestés par le chef. Il ne veut pas voir la nommée Sala dans la commission. Elle lui aurait manqué du respect. Le maire reconnaît l’écart de langage que Sala aurait eu à l’égard du chef mais, pour elle, le débat était clos dans la mesure où l’intéressé est allée présenter ses excuses au chef après l’incident. La deuxième personne contestée par le chef, c’est Emile Tapsoba, choisi par le chef de Koaada pour le représenter.

C’est Emile qui était désigné par le chef de Zongo pendant le bornage pour suivre l’équipe et indiquer les lieux sacrés. Le chef lui reproche d’avoir fait réserver un terrain de près de 1 hectare à son insu, soit disant lieu sacré. Ce que le chef n’a pas admis et considère comme une tentative de fraude. "J’ai appelé tous les vieux pour aller montrer l’endroit. Personne n’a reconnu la nature sacrée du site. Pourquoi on indique sur le plan que c’est un lieu sacré ? Avec qui il a fait ça ? Et pourquoi ils l’ont fait ?", Interroge le chef. Il cherche à comprendre et demande que Emile sorte purement et simplement de la commission. Pour lui, laisser Emile dans la commission, c’est ouvrir la porte à des pratiques de tout genre surtout que l’intéressé a pris part à l’opération de recensement scandaleux de 2002. Le maire reconnaît effectivement que la zone concernée après vérification n’est pas un lieu sacré, mais refuse de croire que Emile l’ait fait sciemment. "Si vous arrivez sur le lieu, vous avez effectivement l’impression qu’il s’agit d’un lieu sacré. Emile s’est trompé.

Même s’il avait menti pour bénéficier du terrain après, ce n’est pas possible. Il a quel intérêt donc à mentir pour dire que lieu est sacré ?", S’interroge Séraphine Ouédraogo. Pour elle, l’arrêté mettant en place la commission a été signé par l’autorité et le chef doit normalement le comprendre et accepter collaborer pour le bon déroulement de l’opération. Autre difficulté à résoudre avec les autochtones, le chef a déposé une demande de 900 parcelles pour satisfaire la grande famille autochtone. Le maire se dit disposer à analyser la doléance même si le nombre parait trop au vue des parcelles disponibles. Le chef de Zongo ne se fait pas d’illusion non plus. Des discussions peuvent être engagées sur le nombre. Certains autochtones de Zongo n’ont même pas vu leur nom sur la liste publiée en septembre. Et le chef pense que la mairie devrait tout faire pour qu’aucun fils de Zongo ne soit pas oublié. En attendant, c’est un dialogue de sourds qui se mène actuellement. Chacun est campé sur sa position. Rien n’est pour le moment entrepris pour aplanir les divergences qui cachent mal un déficit de communication sur un projet aussi sensible.

Par Moussa Zongo

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