Actualités :: Rougeole : 9 ans après, l’épidémie est de retour
Dr Ousmane Badolo

Avec les nombreux Programmes élargis de vaccination (PEV) l’on pensait que la rougeole avait battu en retraite au Pays des hommes intègres. Et pourtant, la voici qui revient en force cette année, semant la mort et la désolation. Que s’est-il donc passé ? Zoom sur un mal dont l’évocation avait toujours terrifié les enfants que nous étions, car il y avait peu de familles où elle ne touchait un membre, fauchait une jeune vie ou, c’est le moindre mal, rendait celui qui en avait été victime handicapé auditif, visuel ou mental.

Lorsque l’on prononce le mot « rougeole » devant un auditeur adulte, cela ramène en surface des souvenirs d’enfance. En effet, dans les villages burkinabè, la survenue d’une épidémie, particulièrement celle de la rougeole, ne laissait pas la population indifférente.

Toutes les stratégies imaginables et inimaginables étaient mises en branle pour s’en défendre. Aujourd’hui encore, face à cette maladie, bien des parents abandonnent la médecine moderne au profit des remèdes de grand-mère : le corps d’un malade est, par exemple, badigeonné avec de la levure de bière ou du jus de tamarin.

Et que dire de ceux qui entourent leur concession d’une traînée de cendre pour préserver les membres de la famille de l’épidémie ? Un de nos doyens au journal, Maurice Bali Bamouni, s’il n’est pas d’un âge certain, est d’un certain âge qui lui permet de parler de la stratégie de combat contre la rougeole en pays gourounsi (centre-ouest du Burkina).

A l’écouter, c’est une maladie qui, du temps de son enfance, traumatisait les populations. C’est ainsi que dans la région dont il est originaire, les parents avaient adopté une attitude de bravade vis-à-vis de la maladie. Quand le mal s’installait dans une cour du village, les autres familles allaient "l’acheter".

Ça veut dire quoi ? Ils allaient avec une calebassée de mil dans la famille de l’enfant malade. Ce dernier malaxait la céréale avec la main de sorte qu’elle soit souillée. De retour à la maison, de ce mil, on faisait une bouillie que tous les enfants de la concession consommaient. Bien sûr, il y avait des enfants qui y résistaient, mais beaucoup tombaient malades.

Mais comme l’on était préparé à la chose, par l’alimentation, par les décoctions et d’autres moyens prophylactiques, on parvenait à circonscrire les dommages. C’était tout de même mieux que quand la maladie surgissait d’elle-même, entraînant des retards de diagnostic. D’aucuns trouveront cela bizarre et se demanderont pourquoi aller chercher la maladie ailleurs alors qu’elle pourrait ne pas arriver chez soi.

« Nos parents avaient une conception qui intégrait la rougeole dans la vie de la famille. C’est ainsi que chez nous, on dit que l’homme ne doit pas chercher à limiter le nombre de ses enfants, car il ne peut pas prévoir combien d’entre eux la rougeole va prélever ; combien la foudre va prendre, ni combien les ancêtres vont rappeler très tôt pour leur tenir compagnie. Alors, il va en rester combien pour labourer le champ familial et combien pour garder les troupeaux ? ». Rires forts de celui qui est appelé familièrement « Vieux Père » à l’OBS.

Avec cette explication, les chercheurs en sciences démographiques ont peut-être là une piste pour comprendre la propension de nombre d’Africains à faire beaucoup d’enfants, mais, sur les tenants et les aboutissants de la maladie, reconnaissons que la médecine moderne est tout de même plus précise : le virus de la rougeole, extrêmement contagieux, se propage lorsque les malades toussent ou éternuent, par le contact rapproché entre personnes ou par le contact direct avec des sécrétions nasales ou laryngées.

Le virus reste actif et contagieux dans l’air ou sur les surfaces contaminées pendant deux heures. Les porteurs du virus peuvent le transmettre pendant les quatre jours qui précèdent l’apparition de l’éruption cutanée et les quatre jours qui suivent. Si fait qu’à la 13e semaine de l’épidémie, les services sanitaires de notre pays ont dénombré 16 084 cas dont 130 décès.

Pour un premier retour, force est de constater que Dame Rougeole n’y va pas du dos de la cuillère. Elle dont on n’a pas du tout regretté l’absence. Dans la ville de Ouagadougou, l’arrondissement de Bogodogo et celui de Boulmiougou sont les plus touchés. La dernière grande épidémie remonte au début des années 2000. Le retour de la rougeole étonne d’autant plus que des campagnes de vaccinations contre ont successivement eu lieu en 2001, 2004 et 2007.

Alors, c’est à perdre son latin, pardon, sa médecine. Selon les spécialistes de la question, le retour de cette maladie virale pourrait s’expliquerait par trois facteurs : l’arrivée progressive de personnes qui ont perdu leur immunité après des années sans vaccination, le fait d’enfants qui n’ont pas bénéficié des PEV (Programme élargi de vaccination) de routine et de sujets vaccinés, mais qui n’ont certainement pas développé une immunité pour plusieurs raisons.

A écouter Dr Ousmane Badolo, chef du service du suivi épidémiologique à la Direction de lutte contre la maladie (DLM), c’est le cas, cette année, de beaucoup de malades qui développent la maladie sous sa forme frustre (pas très grave).

Le plus inquiétant c’est que, à écouter bien des interlocuteurs, le pic de l’épidémie ne semble pas atteint. Pendant que le nombre de cas diminue dans les anciens foyers, de nouveaux sont en train de naître. Et le souhait de tous ceux rencontrés pour les besoins du reportage étaient que, dans cette semaine [celle qui a débuté le lundi 6 avril 2009], l’épidémie atteigne son paroxysme et amorce sa phase descendante.

En attendant, pour ceux qui sont déjà touchés, la prise en charge sanitaire est gratuite. L’Etat a mis à la disposition des districts sanitaires un certain nombre de molécules. Cependant, il nous est revenu que certains centres ne disposeraient pas encore des lots de médicaments. Une information nuancée par le patron du service épidémiologique : « Actuellement [l’entretien a eu lieu le 3 avril 2009], nous avons un stock de médicaments. Encore faut-il que chacun joue sa partition.

Les districts sanitaires, via les directions régionales, doivent par exemple faire l’état de leurs besoins tout en n’oubliant pas que nous mettons surtout l’accent sur les localités les plus touchées. Par ailleurs, d’autres maladies peuvent s’associer à la rougeole, et le prescripteur a toute la latitude de prescrire d’autres produits pour les soigner ».

Issa K. Barry


Encadré

Le portrait-robot du rougeoleux

Le premier signe est en général une forte fièvre qui apparaît environ 10 à 12 jours après l’exposition au virus et persiste quatre à sept jours. Au cours de ce stade, initial, le tableau peut comporter une rhinorrhée (nez qui coule), de la toux, des yeux rouges et larmoyants ainsi que de petits points blanchâtres sur la face interne des joues. L’éruption apparaît plusieurs jours plus tard, habituellement sur le visage et le haut du cou.

En trois jours environ, elle progresse pour atteindre les mains et les pieds. Elle persiste cinq à six jours avant de disparaître. On l’observe en moyenne 14 jours après l’exposition au virus, dans un intervalle de sept à 18 jours. Les flambées de rougeole peuvent entraîner des épidémies susceptibles de provoquer de nombreux décès, notamment parmi les jeunes enfants malnutris. Dans les pays où la rougeole a été en grande partie éliminée, les cas de contagions par des malades venus de l’étranger restent une source importante d’infection.

La rougeole est souvent une maladie modérément grave. Les formes sévères surviennent plus particulièrement chez le jeune enfant malnutri, notamment si les apports en vitamine A sont insuffisants ou si le système immunitaire est affaibli par le VIH/Sida ou d’autres pathologies. La plupart des décès sont dus aux complications de la maladie. Celles-ci sont plus fréquentes avant l’âge de cinq ans ou chez l’adulte de plus de vingt ans.

Parmi les complications les plus graves, on observe des cécités, des encéphalites (qui peuvent s’accompagner d’œdèmes cérébraux), des diarrhées aiguës (susceptibles d’entraîner la déshydratation), des infections auriculaires et respiratoires graves comme la pneumonie. Dans les populations fortement touchées par la malnutrition et qui ne bénéficient pas de soins de santé adéquats, jusqu’à 10% des cas de rougeole sont mortels. Les personnes qui guérissent de la rougeole sont immunisées à vie.

Source : revue en ligne DOCTISSIMO

L’Observateur Paalga

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