Actualités :: CRISE DE L’ESSENCE-MELANGE A OUAGA : Faut-il abandonner les P50 (...)

Les consommateurs d’essence-mélange l’ont remarqué : il est devenu difficile, depuis quelques semaines, d’avoir ce produit dans certaines stations-service à Ouagadougou. La raison est connue : le prix de l’huile 2-temps a subi une hausse soudaine. Ce n’est donc pas la joie chez les utilisateurs des mobylettes de type P50, Ninja, Delta, CT, etc. qui sont quelquefois contraints de se contenter du carburant avec une faible teneur de lubrifiant. Les mécaniciens sont de plus en plus sollicités pour débloquer les moteurs d’engins. Les vendeurs de mobylettes redoutent la mévente.

Les mélangeurs de la station Shell de Saint-Camille ne fonctionnent plus depuis bientôt un mois et demi. Les clients qui y arrivent pour se faire servir repartent déçus : il n’y a pas d’essence-mélange. Las de chanter ce même refrain, le gérant en poste au niveau de ces machines a fini par trouver la parade : une feuille blanche affichée sur les machines avec la mention "En panne" s’adresse désormais aux nombreux clients qui ont besoin de ce type de carburant pour faire avancer leur engin. Rasmané Rouamba, l’un des gérants de cette station que nous avons rencontré le 13 mars dernier, explique la situation par la cherté du prix de l’huile moteur 2-temps que l’on incorpore à l’essence sèche du type "super 91", pour obtenir ce produit communément appelé essence-mélange.

Le litre d’huile 2-temps, dit-il, coûte plus cher que le litre de super 91. Or, le prix du litre d’essence-mélange a été fixé par le gouvernement à 655 F, donc de 10 F moins cher que le super 91 qui est vendu à 665 F CFA le litre. Il n’y a donc presque plus de profit à tirer dans la vente de l’essence-mélange, selon Shell qui a préféré fermer les robinets des mélangeurs, en attendant que la situation évolue plus favorablement. Mais en attendant aussi, la société perd des centaines de clients par jour et M. Rouamba en est conscient : " Depuis des semaines, les clients viennent, on leur répète la même chose, ils repartent déçus. A la longue, nous risquons de les perdre définitivement", a-t-il déclaré, avant de conclure que la seule solution, c’est la baisse du prix de l’huile 2-temps.

"Si ça continue, on va marcher à pied"

Nestor Zongo est l’un de ces clients déçus que nous avons rencontré à Shell Saint-Camille. Avant de "trimballer" sa P50 vers une autre station, à la recherche du fameux mélange, il nous a fait part de sa déception : "Depuis un certain temps, les pompes sont constamment en panne. Et là où ça marche, on nous dit qu’il n’y a pas d’essence-mélange au delà du 6%. Si ça continue, on va abandonner les chars et circuler à pied !". A la station Total Charles de Gaulle par contre, l’essence-mélange est disponible, en dépit de la cherté du prix de l’huile. Mais là aussi, pas question de servir le "jus" à plus de 6%. Car selon des calculs marchands, la marge bénéficiaire s’amenuise à mesure que le pourcentage d’huile est élevé.

A la station-service Petrofa Zone du Bois, il n’y a jusque-là, aucune restriction pour contenir le renchérissement du prix de l’huile 2-temps. L’essence-mélange, apprend-on, y est disponible à plein régime, à en croire le superviseur de la station, Siaka Konaté, qui avoue toutefois que la courbe de la marge bénéficiaire de la société est en berne depuis que le prix de l’huile-moteur a connu une envolée. Si Petrofa ne semble pas, à priori être concerné par la crise du mélange, cela est dû à sa stratégie de préfinancement, qui fait que la différene de prix est supportée par la société mère, plutôt que les gérants de stations-service, comme c’est le cas ailleurs. La hausse du prix de l’huile-moteur, apprend-on de source proche de Petrofa, est consécutive à l’augmentation du prix du baril de pétrole, car l’huile de base est elle-même tirée du pétrole brut.

Et l’huile-moteur est directement importée de l’étranger par les sociétés pétrolières elles-mêmes. C’est donc un marché qui échappe au contrôle de la Société nationale burkinabè d’hydrocarbures (SONABHY) (Lire encadré). Face à cette crise du mélange, beaucoup de mobylettes à Ouagadougou sont astreints au régime du 6, voire 4% d’huile-moteur. Ce qui est pourtant dangereux pour la santé du moteur. C’est du moins l’avis de Boukary Kaboré, mécanicien spécialiste des mobylettes de petite cylindrée. D’après lui, la faible teneur de lubrifiant dans le carburant peut être à l’origine d’un blocage total du moteur. Dans le pire des cas, des pièces telles que le piston, le roulement de quarter et la bielle peuvent également en pâtir. C’est pourquoi le mélange 8% est recommandé par le mécanicien, pour la bonne marche du moteur.

Victimes collatérales de la pénurie

Parmi les victimes collatérales de la pénurie du mélange, il y a les revendeurs de cyclomoteurs. C’est le cas de Burkina-Moto, l’un des plus grands revendeurs des engins montés par la SIFA (Société internationale du Faso). Yaya Tarnagda, chef du service commercial cycles et pneus de Burkina Moto SA, estime que l’impact de la pénurie du mélange sur la vente des engins est évident. "Il n’y a pas de chiffres disponibles, indique-t-il, mais il y a une certaine mévente des mobylettes de type P50, Delta, Ninja, etc.". Et c’est exactement la même situation qui prévaut dans l’agence Burkina Moto de l’Ouest basée à Bobo Dioulasso, à en croire Hubert Dibgolongo, chef de ladite agence. Si les clients ne se bousculent plus autour des petites mobylettes, cela est également dû, d’après Yaya Tarnagda, à l’effet de mode, vu que les motos à vitesse de fabrication chinoise (du type JC) sont de nos jours, de loin les plus prisées par les consommateurs des villes comme des campagnes.

L’un dans l’autre, il est difficile de faire la part des choses, d’examiner le comportement de la clientèle, surtout que les acheteurs d’engins sont presque toujours de nouveaux clients, a conclu le chef du service commercial de Burkina Moto.

Par Paul-Miki ROAMBA


HUBERT YAMEOGO, DG DE LA SONABHY

"Nous n’importons pas d’huile-moteur"

La Société nationale burkinabè d’hydrocarbures (SONABHY), contrairement à ce que pensent bien des consommateurs, ne gère pas l’essence-mélange 2-temps. C’est plutôt l’affaire des gérants de stations-service qui ajoutent l’huile-moteur à l’essence sèche pour obtenir le mélange. Hubert Yaméogo, directeur général de la nationale des hydrocarbures, apporte des précisions sur la question.

Le Pays : Que répondez-vous à ceux qui accusent la SONABHY dans ce qu’il convient d’appeler la crise du mélange ?

Hubert Yaméogo : J’ai moi aussi ouï dire qu’il y a une pénurie de mélange 2-temps dans les stations. Mais j’avoue que je n’ai pas été très tôt mis au courant de la situation, étant donné que nous ne sommes pas des utilisateurs directs du mélange. La SONABHY a pour mission d’importer les hydrocarbures et de les mettre à la disposition du consommateur burkinabè. Nous importons du gasoil, du pétrole, de l’essence super 91 sans plomb, du DDO, du Jet A1 pour l’aviation, du fuel-oil pour les machines de la SONABEL et du gaz butane. Mais nous ne nous chargeons pas de la distribution. Lorsque nous importons, nous stockons et les distributeurs viennent prendre les produits à la SONABHY pour les mettre à la disposition des gérants de stations.

Comme vous pouvez le constater, la SONABHY ne vend pas le mélange 2-temps. Nous vendons de l’essence Super 91. Et au niveau des stations, les gérants font la répartition entre la partie réservée au mélange 2-temps et la partie réservée à l’essence sèche. Ce sont eux donc qui font le mélange pour vendre. Mais la SONABHY n’importe ni ne vend d’huile. Elle n’est concernée par le mélange 2-temps que dans sa partie essence. Et à ce niveau, il n’y a pas de pénurie d’essence dans nos dépôts et nous sommes prêts à la vendre à tous ceux qui voudront en acheter.

Est-ce qu’avec le problème actuel il ne vaudrait pas mieux à l’avenir que la SONABHY s’implique dans l’importation d’huile-moteur, étant donné qu’avec la libéralisation, les prix ne sont plus contrôlés ?

Nous détenons un monopole sur l’importation des produits que j’ai cités plus haut. Si l’autorité a estimé que pour ce qui concerne l’huile, on peut libéraliser et permettre au privé de l’importer directement, je ne vois pas en quoi la SONABHY peut y mettre un obstacle. Nous faisons déjà difficilement la mission qui nous est assignée. Je pense donc que ce n’est pas la peine d’aller en chercher d’autres.

Propos recueillis par Paul-Miki ROAMBA

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