Actualités :: UNE NUIT AVEC LES SAPEURS-POMPIERS : Bruit de sirène et scènes d’accidents à (...)

Les sapeurs-pompiers burkinabè sont des hommes courageux. Mais ce n’est pas toujours qu’on leur reconnaît leur bravoure. Pourtant, l’on se serait mis dans la peau d’un sapeur-pompier que l’on rendrait à la BNSP (Brigade nationale des sapeurs-pompiers) une fière chandelle. C’est ce que nous avons fait en effectuant une sortie de terrain avec une équipe de la caserne centrale de la première compagnie de la Brigade nationale des sapeurs-pompiers à Ouagadougou, le samedi 21 février 2009, à la nuit tombante.

La sirène retentit quatre fois. Le commandant Compaoré, commandant la première compagnie des sapeurs-pompiers à Ouagadougou, nous commande aussitôt de courir pour aller nous placer à l’entrée. L’embarquement à bord de l’ambulance ne doit pas excéder deux minutes. Il est 19 h 20, nous sommes à bord de la camionnette rouge. De l’intérieur, il est presque impossible de voir à l’extérieur, car les vitres sont peintes en blanc, ce qui donne la sensation d’être dans une cage roulante. Une civière, une boîte contenant des gants blancs en plastique, les mêmes qu’utilisent les infirmiers.

A la cabine, assis à la droite du conducteur, le Sergent Maxime Kaboré, reçoit via son talkie-walkie, les indications du bureau des opérations de transmission. C’est lui le chef de mission - dans le jargon des sapeurs-pompiers, on dit "chef d’agrès" . Le conducteur est un caporal nommé Mohamed Diallo. Il roule à vive allure et la sirène ne cesse de hurler. A l’arrière, nous sommes assis sur le même siège que notre collègue, Aristide Ouédraogo, le photographe. Notre paparazzi est plutôt occupé à flasher continuellement les deux qui sont à l’arrière avec nous.

Le soldat de première classe, Abel Drabo, et le volontaire du Service national de développement, Eric Ouédraogo, à eux deux, occupent également le même siège. Dans le jargon des sapeurs-pompiers, ceux qui s’asseyent à l’arrière avec le patient sont appelés "les servants". Le véhicule immatriculé 11 AA 1892 BF, pointe vers l’est de la ville.

Tout en 7 précieuses minutes

Lorsque nous avons appelé le commandant de la Brigade nationale des sapeurs- pompiers, le colonel Silas Kéita, pour lui demander une sortie de terrain avec une de ses équipes en vue d’un reportage sur l’ambiance dans laquelle les pompiers font leurs interventions, nous savions que ce ne serait pas une balade de santé. Mais nous étions loin d’imaginer les vraies péripéties de l’aventure. Lorsque nous attendions dans une salle à la caserne centrale des sapeurs-pompiers de Ouagadougou, peu avant l’alerte de la sirène, le commandant Compaoré nous avait pourtant briefé la situation, pour nous préparer psychologiquement.

C’est aussi avec le commandant que avons appris, qu’en principe, sept minutes devraient suffire pour que l’équipe d’intervention se prépare et soit sur les lieux du drame. Mais, malheureusement, les Ouagalais feignent souvent d’ignorer qu’en circulation la priorité revient à l’ambulance, si bien que, du fait des embouteillages, les secouristes rencontrent des difficultés pour se rendre sur les lieux. Malgré tout, dix minutes ont suffi à l’excellent pilote pour que nous nous retrouvions sur le boulevard Circulaire, non loin de l’hôpital pédiatrique. Un accident de la circulation : deux motocyclettes et deux hommes à terre. Les deux conducteurs geignent fort, le plus âgé, la quarantaine bien sonnée, est grièvement blessé. Il saigne et son visage est en lambeaux.

Aussitôt descendus de l’ambulance, les pompiers, les mains gantées, accourent vers les blessés. Tandis que l’un des servants s’attèle à placer des balises sur la chaussée, l’autre fait sortir le brancard du véhicule. Le conducteur et le chef d’agrès interrogent d’abord les hommes à terre, les tâtent pour répérer les chocs. Puis, ensemble, les pompiers leur administrent les premiers soins, avant de les embarquer à bord de l’ambulance, une Toyota Hiace, relèvent les numéros des différents engins. Cinq minutes plus tard, nous voilà dans les loges du bloc des urgences traumatologiques du Centre universitaire Yalgado Ouédraogo. Pendant le trajet, le soldat de première classe Abel Drabo, sous l’oeil vigilant de l’autre servant, interrogeait les blessés sur leurs identités, celles des personnes à prévenir, ainsi que leurs numéros de contact, les douleurs que les patients ressentent chacun, touchant parfois les patients pour localiser leurs blessures. Il n’hésitait pas aussi à les réconforter chaque fois que l’un d’eux présentait mauvaise mine.

Ici, le 18

Dans les services d’urgence du CHU - YO, il n’y a plus de place, même les couloirs sont occupés. Une forte odeur de sang embaume les lieux. Une sensation de nausée nous prend mais nous efforçons de la contenir. Quelques instants après, une fois les blessés confiés aux infirmiers, et que le chef d’agrès a fait son rapport aux toubibs, nous sommes de retour à la caserne. Là, nous faisons un récapitulatif de l’intervention. Parcours global de l’ambulance : 22 km. Durée de l’intervention, trente minutes : dix minutes à l’aller, huit pour les premiers soins et pour embarquer les blessés, quatre minutes pour être à l’hôpital, cinq minutes pour confier les blessés aux infirmiers, quatre minutes pour rentrer à la caserne.

Et cela malgré la densité de la circulation qui obligeait le conducteur à faire des slaloms. Une fois à la caserne, les servants nettoient l’intérieur de l’ambulance. Nous en profitons pour suivre le sergent qui va rédiger son rapport dans un gros cahier déposé à l’intérieur du Bureau des opérations de transmission (BOT). Dans la petite salle insonorisée, trois hommes reçoivent les multiples coups de fil des populations. Un raffut total y règne. Près d’une dizaine de postes de téléphone crépitent à la fois. Nous observons les trois hommes se démener pour répondre aux coups de fil. Souvent, ils tiennent plusieurs, combinés à la fois, pour, helas s’entendre dire des futilités du genre : "Je vérifie si mon téléphone marche", "Mon âne a disparu".

Bref, des phrases qui sont de nature à décourager. Incivisme ou insouciance ? Les agents du BOT sont le plus souvent embêtés par des plaisantins qui abusent de la ligne verte. Mais, ils sont tenus de garder leur calme, pour ne pas refuser de décrocher, au risque de laisser quelqu’un quelque part, mourir faute de secours.

Pas une minte de répit

A 20h 30, nous voilà à nouveau dans l’ambulance, cap sur Gounghin. Cette fois, le volontaire du SND n’est plus avec l’équipe, il a été remplacé par un autre élément, le soldat de première classe Camille Compaoré. Non loin du dispensaire de Gounghin, un jeune homme d’une vingtaine d’années, est assis au bord de la route. Il a été blessé au tibia dans un accident. Heureusement, sa blessure n’est pas grave. Mais nous le transportons quand même au dispensaire. A peine l’avons-nous confié aux infirmières que le talkie-walkie du sergent crépite encore.

Le BOT lui signale qu’un autre jeune homme est couché dans la rue, quelque part au quartier Patte d’Oie. Même pas une minute de répit. Il nous revient en même temps à l’esprit que le commandant nous avait prévenus. Il nous avait dit qu’il se pourrait que nous sortions pour une intervention et ne plus rentrer que carrément le lendemain matin. Cela commence à se vérifier. De la Patte d’Oie, nous transportons le blessé au Centre médical avec antenne chirurgicale le plus proche, celui du secteur 30. Il a été victime d’une agression, par deux individus qui lui auraient soutiré son argent, d’après des témoins.

Visiblement, selon les pompiers, lors de l’agression, la victime a dû recevoir un choc à la nuque. Toute chose qui expliquerait son invalidité. En effet, le blessé entend et comprend ce qui se raconte autour de lui. Cependant, il a complètement perdu le contrôle de son corps. Incapable de bouger aucun de ses membres, il ne faisait que pleurer. Entre-temps, au cours du trajet, le blessé était resté silencieux. Nous avons cru à un évanouissement. Heureusement que les servants étaient là pour le faire... pleurer à nouveau. Les sapeurs-pompiers nous font savoir le plus sérieusement du monde qu’ils font cela pour nous rassurer que le blessé vit toujours.

Par Lassina Fabrice SANOU

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