Actualités :: Lutte contre la prostitution à Ouagadougou : Les douze travaux de (...)

Depuis quelques années, le maire de Ouagadougou, Simon Compaoré, a inscrit en bonne place la lutte contre la prostitution dans ses actions. A cet effet, des études ont été réalisées sur le phénomène qui « connaît de nos jours des changements donnant naissance à une nouvelle physionomie. Il se professionnalise, s’industrialise et s’étend insidieusement à des couches et catégories sociales jusque-là épargnées »....

Les résultats de la dernière enquête sur le sujet ont été restitués au cours d’un atelier. Nous vous proposons la synthèse du Rapport général produit par la Direction de l’Action sociale et de l’Education de la Commune de Ouagadougou qui fait état de douze recommandations approuvées par le bourgmestre de la capitale burkinabè comme solutions à l’éradication d’une des formes de la prostitution notamment celle des mineures.

« Recherche action pour une stratégie d’insertion socio-économique des prostituées de nationalité burkinabè et plus particulièrement celles des mineures en situation de prostitution dans la commune de Ouagadougou », tel était l’intitulé de l’étude, la troisième du genre, initiée par les autorités municipales « pour juguler les causes du phénomène, découvrir ses différentes manifestations et proposer des solutions idoines à son éradication afin de préserver les valeurs socio-culturelles chères aux sociétés africaines ».

C’est dans ce cadre que du 14 au 15 février 2008, s’est tenu dans la salle du conseil municipal de l’Hôtel de Ville, un atelier qui a regroupé une soixantaine de participants des départements ministériels, des institutions internationales spécialisées, des organisations non gouvernementales, des mouvements associatifs et des médias pour échanger sur l’insertion socio-économique des racoleuses sexuelles de nationalité burkinabé de la commune de Ouaga.

Les résultats de l’étude
L’enquête a porté sur 60 racoleuses de la ville de Ouagadougou, 40 mineures et 20 parents de racoleuses. La répartition des racoleuses suivant l’âge et le niveau d’instruction laisse voir que la majorité des racoleuses majeures rencontrées (47%) sont dans la tranche 21-25 ans. Dans la même logique, la grande partie des mineures rencontrées (35%) a 16 ans. Dans les deux catégories de prostituées, le niveau d’instruction dominant est le niveau primaire (62%) ou les sans niveau (35%).

La profession des parents ou tuteurs des racoleuses sexuelles montre que la plupart d’entre eux sont soit des cultivateurs, soit des commerçants ou autres travailleurs du secteur informel. En outre, 58% des parents des prostituées sont de régime matrimonial polygame tandis que 32,5% des racoleuses ont au moins l’un de leurs parents décédé.

Ce triste tableau qui a été dépeint tend à prouver que l’implication de certaines filles dans la prostitution est l’expression de leur volonté de sortir du marasme économique dans lequel vivent leurs familles. Il faut cependant reconnaître que les conditions socioculturelles (maltraitance, crises au sein des familles, entre certains couples, la mauvaise compagnie, etc.), expliquent l’irruption de certaines filles dans ce métier.

Qu’à cela ne tienne, nombre de filles, dans l’intention de se débarrasser de ce métier si avilissant, pratiquent certaines activités dites de substitution. En général, ce sont des activités informelles (petit commerce, activités artisanales comme la coiffure, etc.). La faible rentabilité et la variation des gains de ces activités ne leur permettent pas de subvenir à leurs besoins si nombreux, ce qui les empêche d’honorer leur volonté de laisser le métier de racoleuse.

L’étude a aussi soulevé un pan concernant la possibilité pour les travailleuses du sexe de retourner chez leurs parents. Il ressort que 19% des prostituées souhaitent retourner en familles tandis que 29% affirment ne pas souhaiter le retour en famille. Les raisons avancées sont diverses, mais on retiendra que les conflits au sein des familles et les décès de certains parents en sont les causes principales. A la question de savoir si les parents ignorent l’activité pratiquée par leurs filles, 70% des parents affirment ignorer l’activité à laquelle se livrent leurs filles.

Des questions préoccupantes
Au terme de la présentation, des questions d’éclaircissement et des contributions majeures ont permis d’enrichir le rapport de l’étude. Entre autres, on note au titre des questions soulevées :

La volonté seule suffit-elle pour abandonner la prostitution ?

Pourquoi la recherche action s’est-elle limitée aux racoleuses burkinabè ?

Est-ce qu’un appui économique pourrait favoriser le retour en famille des racoleuses sexuelles ?

Dans la rubrique des contributions et observations, on retiendra :

l’insuffisance de l’étude sur l’absence du volet reprise de la scolarité par les mineures ;

la nécessité d’actualiser les données de l’étude datant de 2003 ;

la nécessité de tenir compte dans l’étude des capacités psychologiques et psychosociales des filles ;

la nécessité d’envisager des sanctions à l’endroit des clients des filles mineures ;

l’exigence d’un engagement et d’un appui politique en conjonction avec les initiatives de la commune.

Propositions des participants à l’issue de travaux de groupe
Les groupes, au nombre de trois, ont chacun eu à travailler sur un cas problématique dont la restitution en plénière a permis d’aboutir aux résultats suivants :

le groupe 1, qui a eu à réfléchir sur la situation des filles qui ont déjà une activité de substitution à la prostitution, estime qu’il faut une orientation politique, économique, éducationnelle et socioculturelle pour résorber la question de la réinsertion des racoleuses sexuelles, Quant à la situation des filles qui n’ont que la prostitution comme activité économique principale, le groupe 2 a apporté les réponses suivantes :

une prise en charge psychosociale avec une grande implication de la société civile ;

une sensibilisation du public cible ;

un encadrement et un accompagnement du public cible dans un milieu approprié,

enfin, le groupe 3, dont la réflexion a porté sur le cas des mineures en situation de prostitution à travers des récits de vie, propose des stratégies formulées en termes d’activités préventives et curatives ainsi comme suit :

Au titre des actions préventives :

l’application du contrôle des textes : l’interdiction de la fréquentation des débits de boissons (par exemple, renforcer les sorties de terrain des policiers/renforcer la répression envers les responsables des débits et les gérants des vidéo clubs) ;

la sensibilisation, information de la population, des familles (Outils/moyens, canaux) ;

l’implication des personnes ressources, autorités religieuses et coutumières dans les sensibilisations ;

la création et la révision des textes pour permettre de rafler les clients des mineures ;

la création d’une ligne verte pour amener la population à contribuer à détecter les mineures en situation de racolage ;

la création des dispositifs transitoires d’insertion socioprofessionnelle des mineures déscolarisées.

Au titre des actions curatives :

Des entretiens personnalisés pour mieux trouver des solutions efficaces et adéquates ;

une prise en charge psychosociale et médicale ;

la ré-scolarisation ;

le maintien des filles à l’école et leur accompagnement total ;

la formation préprofessionnelle pour les non-scolarisées (trouver des apprentissages qui aboutiront à quelque chose qui marche) ;

l’aménagement de dispositifs de formation qui n’exposeront pas les mineures à la raillerie sociale/rejet et qui les reconduiraient vers la profession qu’elles ont délaissée ;

la multiplication des dispositifs d’insertion socioprofessionnelle des filles déscolarisées et non scolarisées ;

l’appui juridique et judiciaire pour les plaintes pour coups et blessures ou les violences faites sur les filles ;

la recherche de dispositifs de dénonciation (par exemple une ligne verte avec un système d’alerte (équipe d’alerte) pour tout appel de la population et des filles mineures en détresse ;

la conscientisation des familles des mineures (théâtre forums, conférences-débats, causeries-débats, etc.) ;

l’appui économique des parents des mineures ;

- la création des conditions de parrainage au niveau national pour appuyer les mineures qui tombent dans la situation ;

le plaidoyer au Conseil Supérieur de Communication (CSC) et auprès des partenaires pour leur expliquer la lutte contre certaines publicités et certains films/feuilletons qui sont sans pudeur.

A l’issue de l’atelier, des recommandations, au nombre de douze, ont été formulées et approuvées par le maire Simon Compaoré qui a cependant fait quelques observations pour les rendre plus réalisables. Ce sont :

la création d’un cadre de concertation communale entre les acteurs et partenaires impliqués ;

l’élaboration d’un programme d’action pour la prévention de la prostitution au niveau communal ;

l’élaboration d’un programme de sensibilisation sur la santé sexuelle et reproductive à l’intention des parents et des enfants par les canaux de la presse ;

la création et le renforcement des capacités des centres de formation professionnelle des filles dans les arrondissements en appui à ceux déjà existants ;

la mise en place d’un fonds communal de réinsertion socio-économique des filles prostituées ;

le renforcement et l’extension des services socio scolaires au sein des établissements scolaires ;

la création d’une structure de prise en charge adaptée aux spécificités du public cible avec une équipe pluridisciplinaire ;

la création à long terme d’un centre de réparation psycho sanitaire des filles. Ce cadre sera un moyen transitoire et dirigé par une équipe pluridisciplinaire ;

la création au sein des commissariats de cellules d’action sociale (des services spéciaux d’action sociale) et le renforcement des capacités en équipe d’intervention des agents. L’initiative pourrait être prise par le ministère de l’Action sociale et de Solidarité nationale ;

la prise par le gouvernement de mesures concrètes de protection de l’intégrité physique et morale des mineures à travers l’application des textes et leur adaptation au contexte actuel ;

le renforcement du parrainage au niveau communal pour la prise en charge des mineures.

La prise en charge des frais d’inscription et formation des filles racoleuses dans le programme de formation des 10 000 jeunes aux métiers et 5 000 jeunes en entreprenariat du ministère de la Jeunesse et de l’Emploi.

Synthèse Adama Ouédraogo Damiss

L’Observateur

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