Actualités :: Manifestations contre la flambée des prix : « La vie chère » coûte cher à (...)

Ouagadougou a connu à son tour de violentes manifestations sous le prétexte de lutte contre la vie chère, hier 28 février 2008. Alors que tout semblait calme aux premières heures de la matinée, les esprits se sont surchauffés par la suite. Des feux tricolores, des édifices publics, des biens privés... ont été saccagés. Etat des lieux.

Des groupes de jeunes gens ont manifesté violemment, jeudi 28 février dans la matinée à Ouagadougou, contre la flambée des prix des produits de première nécessité. Par petits groupes, ils ont occupé certaines rues de la capitale, brûlant des pneus et brisant les feux tricolores. Sur l’Avenue Kwamé-N’Krumah, la quasi-totalité des panneaux publicitaires électroniques ont été brisés. Les manifestants sont partis avec les feux tricolores après avoir démonté les poteaux qui les supportaient. Visiblement décidés à casser, ils s’en sont pris aux luxueux immeubles de cette avenue. L’immeuble de la MABUCIG et celui de la Résidence Aziz ont essuyé des jets de pierre sur les vitres.

A Samandin, les manifestants ont terrassé un pan de mur de l’Ecole nationale des télécommunications du côté de l’Avenue Kanazoé. Les feux de signalisation, installés dans les environs ont subi le même sort que ceux de l’Avenue Kwame-N’Krumah. Les quartiers Dapoya, Kolog-naba et Patte-d’oie, ont également enregistré les mêmes actes de vandalisme. Les boutiques, les kiosques et les stations services sont restés fermés, alors que certains d’entre eux avaient ouvert le matin. Aucune voiture de l’Etat, reconnaissable au fond d’immatriculation en rouge, n’est visible en circulation.

Un meneur de 28 ans, au devant de son groupe, a brisé tous les feux tricolores de sa zone d’action à Dapoya, tout en prenant le soin de retirer les réflecteurs. Essoufflé par la course-poursuite engagée avec les éléments de la gendarmerie, il explique que tant que le gouvernement ne baissera pas les taxes, il n ‘y aura pas d’entente.
Vendeur ambulant de pacotilles diverses, ce manifestant qui a requis l’anonymat croit savoir que « les aides qu’on donne au gouvernement sont reversées au budget de l’Etat et ne servent pas aux populations ». Pour lui, l’Etat a augmenté les taxes alors qu’il ne s’occupe pas des populations. « Aujourd’hui, les prix ont augmenté, ça fait qu’on ne peut plus se payer à manger et c’est pour cela qu’on fait la grève », explique un autre jeune de 14 ans, qui portait toujours sa tenue kaki des écoles publiques.

Cette situation est une reproduction de ce qui a prévalu à Bobo-Dioulasso, à Ouahigouya et à Banfora la semaine dernière. Des manifestants de mouvement informel ont conduit à des casses et des pillages dans ces localités, occasionnant à Bobo, des dégâts évalués à plus d’un demi milliard de francs CFA. Les agents de sécurité rencontrés sur place essaient des maîtriser la situation
à l’aide de grenades lacrymogènes. Leur tâche est d’autant plus difficile que les jeunes se replient dans leurs cours pour
ressortir aussitôt.

La crainte exprimée le matin par les commerçants et les responsables d’établissement s’est confirmée plus tard. La plupart des élèves des lycées publics ont rejoint leur domicile sitôt arrivés en classe. Les établissements privés sont carrément fermés. « Nous avons décidé de libérer les plus petits pour leur sécurité », a expliqué le matin Franck Bonanet, censeur au lycée Philippe-Zinda-Kaboré. « Par crainte qu’ils ne soient récupérés par d’éventuels manifestants, nous leur avons demandé de rejoindre dare-dare leur maison », a-t-il ajouté.

La veille, le gouvernement avait décidé de renoncer aux taxes perçues sur certains produits de grande consommation, en vue de faire baisser leur prix au consommateur. Le président des jeunes patriotes, Nana Thibaut, avait fini par lever son mot d’ordre de marche pour ce jeudi, tout en maintenant son idée d’une « opération ville morte » qui se traduirait par la fermeture des boutiques et des voies de circulation.

Aimé Mouor KABIRE


* « Jets de pierre » contre « gaz lacrymogène »

Jets de pierre contre gaz lacrymogène. Tel est le jeu auquel s’est livré à Ouagadougou dans les quartiers de Dapoya, Tampouy et Larlé, les manifestants contre la vie « chère » et les policiers, ce jeudi 28 février 2008. Il est 12h 15 lorsque nous enfourchons notre « char » pour faire un tour en ville. Arrivé à Dapoya, l’atmosphère surchauffée des groupuscules de jeunes attire notre attention sur la route de l’Armée.

A quelques mètres du marché de Sankaryaré, la présence de pneus calcinés, des feux tricolores saccagés laissent présager le pire. Un pick up bourré de policiers est stationné à 100 mètres en face de la caisse populaire de Dapoya dont les vitres ont volé en éclats. La circulation est monotone. Quelques motocyclistes roulent lentement. Les voitures cherchent des six mètres pour éviter les manifestants. A la hauteur du feu tricolore à côté de la station Shell de la cité An III, policiers casqués et blindés tenant des manifestants en haleine se regardaient en chien de faïence. Nous calons notre « char » à côté. Le bitume a été transformé à l’occasion en un dépotoir. Il est 12 h 30. Sur la voie allant au marché de Dapoya, le gros lot des manifestants a enflammé des pneus. A 100 m d’eux, les policiers intimident avec leurs carabines qui ne semblent pas chargées. Il fait chaud.

Des badauds sortis qui, des ruelles, qui de sa cour admirent le spectacle. Çà et là, les vitres des panneaux lumineux bordant le bitume ont volé en éclats. Tout autour des policiers, la multitude de cailloux et de déchets de toutes sortes indiquent la densité des échauffourées. Aux pieds des policiers, un manifestant est maîtrisé. Selon des témoins, l’homme serait un malade mental. Il sera relaxé plus tard. Tout à coup, quatre policiers se mettent en position en faisant barricade avec leur bouclier et avancent vers les manifestants. Les cailloux pleuvent. Les manifestants en face des policiers reculent tandis que ceux qui sont derrière les flics entrent dans la danse avec des jets de pierre. A l’ouest, à quelque 100 mètres, des jeunes essaient de faire un bûcher avec un pneu sous le regard de deux militaires tenant en bandoulière leur kalach.

Un manifestant arrêté

Alors que les cailloux pleuvaient, les policiers qui étaient stationnés dans le pick up démarrent. Nous faisons de même. La stratégie consistait à prendre en tenaille le gros de la foule. La foule ainsi prise en tenaille et les pierres qui « pleuvaient » de toute part, les gaz lacrymogènes entrent en action. C’est la débandade. Comme une fumée, les manifestants se dispersent dans les ruelles des six mètres bordant la voie. Le pick up freine à hauteur du marché de poulet de Dapoya. Un manifestant que les policiers avaient bien identifié est extirpé du marché de poulet sous le regard des commerçants qui ne bronchent pas. Sur leur visage, ils avaient l’air d’acquiescer l’arrestation de ce jeune dont l’âge avoisinait la vingtaine. En effet, de Dapoya à Tampouy en passant par Larlé, la centaine de manifestants avait entre 10 et 25 ans. Après cette arrestation, les policiers replièrent vers la station Shell. Au passage, un policier hèle un vendeur ambulant de cigarette. Il prend une « clop » et l’enflamme. Ce ne fut pas facile. Sur le bitume, la fumée des pneus et des gaz lacrymogènes rend difficile la respiration. Quelques personnes se sont employées à mouiller des mouchoirs pour se protéger.

D’autres, plus citoyens et civiques se sont employés à débarrasser la voie des pneus. Un adulte, à l’aide de bidon d’eau a pu éteindre ce qu’il pouvait. Pendant ce temps, des kiosques de la LONAB volant en éclats sur le flanc Est du marché. Des jeunes surexcités vociféraient sans pouvoir exprimer des revendications. Tantôt, ce sont quelques individus qui jettent par intermittence des pierres. Tantôt ce sont des badauds qui s’en prenaient aux feux. Jusqu’à 13h30, la situation était tendue. Mais les forces diminuant avec la chaleur, les manifestants ont perdu de leur souffle. A 15 h, à notre dernier passage, seules les voies dégradées, les poubelles publiques et la flopée des cailloux, des pierres, des débris de bouteilles, ainsi que le pick up bourré de policiers montraient l’intensité des échauffourrés.

Daouda Emile OUEDRAOGO
daouda.ouedraogo@sidwaya.bf


* Des véhicules de l’Etat saccagés

Le parc automobile des ministères de l’Action sociale et de la Solidarité nationale et du Travail et de la Sécurité sociale a été saccagé. Les manifestants d’un jour ont poussé le bouchon loin en cassant les vitres des portes d’entrée de l’immeuble Baoghin. Selon une source, les manifestants seraient passés par le mur et se sont mis à tout casser.

A ceux qui saccageaient les feux tricolores, les caisses populaires de Larlé, de Dapoya et brûlaient des pneus sur l’asphalte, s’est joint un second groupe qui agissait pour un « règlement de compte ». En effet, des biens du maire de Nongr Massom Zakaria Sawadogo ont été brûlés. Selon les propos de riverains, confirmés par les forces de l’ordre en off, un proche et ami du maire aurait dans une rixe poignardé un jeune du quartier. Ce dernier aurait été conduit illico presto à l’hôpital où il est en soin intensif. Révoltée, la population est allée saccager l’imprimerie du maire sise à Tanghin. Des commandes (imprimés d’extraits de naissance) qui s’y trouvaient sont parties en fumée. Les marcheurs seraient partis avec des ordinateurs, des téléphones portables en vente et de l’argent liquide. Il a fallu un déploiement des forces de l’ordre pour protéger le domicile du maire que « les marcheurs voulaient mettre à sac. La fille de l’ami du maire qui aurait poignardé le jeune doit sa vie sauve à un voisin pasteur. Celui-ci a eu ses portes et fenêtres endommagées ».


Les téméraires ont fait de bonnes affaires

Hier, les commerces qui ont eu le courage d’ouvrir leurs portes ont fait de très bonnes affaires. En effet, la rareté, voire la quasi absence de boutiques ouvertes a créé de longues files devant celles ouvertes. Les commerçants débordant d’imagination ont vite fait de faire grimper les prix. Ainsi le litre d’essence s’est vendu dans certains endroits de la ville à 750 francs CFA. Comme quoi, il suffisait d’avoir le nez creux pour se frotter les mains. Outre les petites pompes services d’essence, quelques tenanciers de buvettes n’ont pas tari en clients, même si dans cette activité on ne s’est pas moqué des « godeurs » en renchérissant les prix. Mais d’une façon générale les téméraires se frottent les mains. Toute chose qui remet plus ou moins en cause le but poursuivi par les manifestants qui, disent-t-ils, protestaient contre la vie chère au Faso.

J.Y & J.Z

Sidwaya

Burkina : La pose de hénné, un business qui marche pour (...)
Lutte contre le terrorisme : « Il y a certaines (...)
Burkina / Concours de la magistrature : La maîtrise ou (...)
Bobo-Dioulasso : Un an de silence depuis la disparition (...)
Burkina/Coupures d’eau : Au quartier Sin-yiri de (...)
Burkina/Lutte contre l’insécurité : La direction générale (...)
Burkina/CHU Souro Sanou : La CNSS offre une automate de (...)
Burkina/Santé : Médecins Sans Frontières offre de nouveaux (...)
57e session de la Commission population et développement (...)
Burkina/Action sociale : L’association Go Paga devient « (...)
Bobo-Dioulasso : Les chefs coutumiers traditionnels (...)
Burkina Faso : Le secrétaire général de la CGT-B, Moussa (...)
Burkina : La Côte d’Ivoire va accompagner le retour (...)
Burkina/Enseignement supérieur : L’université Joseph (...)
Burkina : « Nous demandons à notre ministre de tutelle de (...)
La Poste Burkina Faso : « Malgré la crise sécuritaire, les (...)
Bobo-Dioulasso : Incinération de produits prohibés d’une (...)
Burkina/ Mesures de réponses aux pandémies et crises (...)
Burkina/ Programme OKDD : Validation d’un plan de (...)
Association Beoog-Neeré du Ganzourgou : 320 caprins pour (...)
Burkina/ Rencontre inter-réseaux 2024 : L’élimination des (...)

Pages : 0 | 21 | 42 | 63 | 84 | 105 | 126 | 147 | 168 | ... | 36519


LeFaso.net
LeFaso.net © 2003-2023 LeFaso.net ne saurait être tenu responsable des contenus "articles" provenant des sites externes partenaires.
Droits de reproduction et de diffusion réservés