Actualités :: Burkina / Liberté de la presse : L’Assemblée législative de transition appelée (...)

Le 4 octobre 2023, a eu lieu un conseil des ministres où le gouvernement a déclaré le capitaine Thomas Sankara héros de la nation et a adopté un projet de loi sur le Conseil supérieur de la communication que ne renierait pas celui qui a assassiné l’icône panafricaine, le capitaine Blaise Compaoré. Quelle est la modification principale contenue dans cette proposition de loi que querellent les médias ?

Cette proposition de loi vient comme un épilogue à une année de guerre contre les médias qu’une certaine opinion sur les réseaux sociaux appelant au meurtre de journalistes et le gouvernement ont livré en expulsant des journalistes et fermant des médias. C’est en ce sens que le recours à l’Assemblée législative de transition par les organisations professionnelles des médias et par le gouvernement a du sens. Il lui est demandé d’arbitrer un conflit entre le pouvoir et un contre-pouvoir pour une loi juste qui garantisse la liberté et le bien de tous.

Notre pays vit des moments douloureux où il est attaqué de partout par des groupes terroristes qui sèment la mort et la désolation. Notre armée courageuse se bat avec l’aide des Volontaires pour la défense de la patrie. La nation toute entière subit l’effort de paix par les contributions et les taxes diverses. Après un an de gestion du pouvoir, le Mouvement patriotique pour la sauvegarde et la restauration deuxième du nom est au bilan de son action et des leçons qu’il tire sur sa gestion. Ce projet de loi sur le Conseil supérieur de la communication est-il prioritaire dans notre contexte actuel de lutte contre le terrorisme ? L’Assemblée législative à qui les Organisations professionnelles des médias(OPM) ont fait appel ne devrait-t-elle pas agir pour mettre fin à cette guerre inutile entre le gouvernement et les médias qui épuisent la nation et ne renforcent pas nos actions de reconquête du territoire ?

Certaines personnes essaient de diviser le pays, de divertir le gouvernement en l’empêchant de se consacrer à l’essentiel qu’est la lutte contre le terrorisme pour le retour de la paix. Dans cette visée, la presse, les médias, les journalistes, les magistrats et les intellectuels sont attaqués, stigmatisés et présentés comme des apatrides. Le gouvernement du MPSR2 a eu à se substituer au CSC pour prendre des décisions contre les médias et ce projet de loi qui veut modifier la gouvernance de l’organe de régulation est une prise de contrôle de cet organe, par la nomination de son président par le chef de l’Etat.

Ainsi adoubé au-dessus de ses pairs qui ne l’ont pas choisi, il aurait lui aussi le privilège de choisir qui le secondera. C’est un casus belli que le gouvernement a engagé, bien que les professionnels des médias étaient présent dans la commission d’études et aient fait des objections à ces amendements, il n’en a pas été tenu compte et la proposition de loi va être présentée aux députés avec ces points contestés qui mettent en cause l’indépendance de l’institution et de ses décisions.

Un pas en avant, deux pas en arrière

L’Assemblée législative rendrait service au gouvernement en n’adoptant pas cette loi. Pourquoi ? Parce que l’erreur est humaine et le gouvernement s’est trompé et se trompe en s’attaquant aux libertés. La liberté de la presse est une liberté publique qui se fonde sur celle d’opinion et d’expression. Nous venons de loin où cette liberté a été confisquée sous les pouvoirs d’exception, particulièrement la période du capitaine Blaise Compaoré où régnait la terreur du « tu fais on te fait et il n’y a rien ».

Même avec le vernis démocratique le pouvoir Compaoré a « lâché ses chiens » de la garde de sécurité présidentielle qui ont tué et brûlé le journaliste Norbert Zongo sur la route de Sapouy le 13 décembre 1998, avec ses trois compagnons, parce qu’il enquêtait sur l’assassinat du chauffeur du frère du président, François Compaoré. Cette affaire est toujours pendante devant les tribunaux, le crime est impuni. Norbert Zongo a beaucoup apporté à ce pays par son sacrifice, que le peuple burkinabè a reconnu en luttant pendant de longues années pour la vérité et la justice. Ces marches meetings du Collectif des organisations démocratiques de masses et les partis politiques ont été les précurseurs, l’école de l’insurrection victorieuse de 2014 qui a chassé le dictateur Blaise Compaoré.

Lire aussi : Burkina : Les médias sont puissants mais ils ne peuvent pas tout, pas de panique !

Rien que pour ce crime horrible impuni, notre pays devrait se garder de faire ce recul en arrière sur le CSC. Norbert Zongo a longuement combattu le Conseil supérieur de l’information où le président était nommé par le président du Faso et l’organe n’avait aucune indépendance. C’est ce projet rétrograde que le gouvernement veut ramener. Pourquoi notre pays ne peut-il pas avancer sur des questions déjà résolues et doit revenir en arrière. Sommes-nous condamnés à faire un pas en avant et deux pas en arrière ? Reconnaître l’indépendance du CSC par rapport à la présidence, et laisser le droit aux conseillers d’élire leur président est une reconnaissance d’une autre autorité par le président, d’une limite à son pouvoir. Ce désir de tout contrôler, d’avoir tous les pouvoirs est d’une autre époque. La presse burkinabè est de plus en plus responsable, malgré le harcèlement continu au cours de cette année, elle a tenu sans aller à la légèreté et à l’irresponsabilité donnant des informations vérifiées, équilibrées, justes toujours dans l’intérêt du peuple burkinabè.

Informer n’est pas un acte séditieux

Concernant la liberté de la presse, le secrétaire général de l’ONU, A Gutteres dit : « La liberté de la presse est le fondement même de la démocratie et de la justice. Grâce à elle, nous disposons de tous les faits dont nous avons besoin pour façonner notre opinion et dire la vérité aux détenteurs du pouvoir. Mais aux quatre coins du monde, la liberté de la presse est attaquée ».

L’Assemblée législative de transition doit être consciente que la libre communication des pensées et des opinions est un droit du citoyen qui n’empêche pas le gouvernement de travailler. Et si le citoyen abuse de cette liberté, les tribunaux sont là pour juger et condamner. Avec le Conseil supérieur de la communication, un organe indépendant, les journalistes sont sereins, travaillent librement et la population a la garantie de ne pas avoir des informations manipulées, servant des intérêts particuliers. Ils peuvent enquêter sur les faits de corruption comme l’affaire de charbon fin en jugement devant les tribunaux. Mais sans la liberté de cet organe et la garantie d’un jugement des pairs, c’est la plume tremblante qu’ils écriront et la recherche de l’information sur de larges domaines de la vie sociale, économique et politique ne sera pas faite. Au cours de cette année, les journalistes ont passé leur temps à expliquer qu’informer sur ce qui ne va pas, n’est pas un acte séditieux. C’est attirer l’attention de l’autorité sur les points à améliorer, soigner pour le plus grand bien de la société. La presse et les médias sont des organes d’aide à la décision éclairée.

Le pouvoir du MPSR2 et son gouvernement ne voit en la presse qu’une menace, apparemment plus importante que les groupes terroristes. Ce qui n’est absolument pas le cas. L’Assemblée législative de transition devrait, en tant que pouvoir, arrêter cette dérive absolutiste en limitant le pouvoir du gouvernement par le rejet de cette loi.

Sana Guy
Lefaso.net

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