Le communiqué ci-dessous est un appel à contributions lancé dans le cadre de l’organisation d’une conférence internationale sur le thème : Médiatisation, mobilités et les mesures de « gatekeeping » dans un contexte d’insécurité au Sahel. Cette conférence de deux jours (15-16 septembre 2022) sera organisée à l’Institut des sciences des sociétés (CNRST) de Ouagadougou. Elle vise à réunir des chercheurs, des professionnels des médias, des activistes des réseaux sociaux et des ONG travaillant dans le domaine de la migration, du journalisme et des médias au Sahel, ou dans des contextes connexes. Les éventuels contributeurs ont jusqu’au 18 juin pour envoyer leurs résumés. Voir les détails :
Introduction
L’insécurité que vivent actuellement le Burkina Faso, le Mali et le Niger est souvent décrite, de manière non critique, comme étant causée par des groupes armés, parfois appelés terroristes ou djihadistes, qui mènent des attaques contre des civils ainsi que des forces armées nationales et internationales. Mais historiquement comme actuellement, la violence au Sahel n’est pas monopolisée par des groupes insurgés.
Dans tout le Sahel, la violence contre les civils a également été commise par toute une série d’acteurs à savoir les armées nationales, les milices, les bandits, les groupes de défense locaux et les acteurs extérieurs (armées, acteurs privés). En d’autres termes, l’idée que l’État possède le monopole de la violence légitime a été largement démentie au Sahel.
La vague d’insécurité que connaît actuellement le Sahel a aggravé une situation déjà précaire en ce qui concerne le développement humain. En particulier, l’insécurité croissante a été l’un des principaux moteurs, ces derniers temps, d’une importante migration intra et internationale au sein et au-delà du Sahel. Le HCR, l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés, a récemment indiqué que le conflit au Sahel "a forcé plus de 2,5 millions de personnes à fuir leurs foyers au cours de la dernière décennie" (HCR, 2022).
Ce déplacement important de personnes a encore accentué le rôle du Sahel dans la migration illégale vers l’Europe, étant donné que la région est un "corridor clé et un point de départ pour ceux qui tentent de rejoindre l’Europe, souvent au prix de risques personnels extrêmes " (Erol Yayboke & Rakan Aboneaaj, 2020).
L’émergence de plusieurs centres de pouvoir armé impliquant des acteurs étatiques et non étatiques et la mobilité précaire des personnes, tant légalement qu’illégalement, à l’intérieur et à travers le Sahel se déroulent dans un contexte de transformation rapide des écologies de la communication. Comme partout ailleurs en Afrique subsaharienne, les médias/technologies numériques - en particulier le développement d’internet et des réseaux sociaux tels que WhatsApp et Facebook - sont apparus de plus en plus comme les principaux moteurs des transformations de la nature des pratiques de communication privées et publiques.
Tout comme la perte du monopole de l’État sur l’usage légitime de la violence soulignée plus haut, le développement rapide des médias privés (télévision, radio, presse papier et en ligne) et des réseaux sociaux au Sahel a également remis en question le monopole d’Etat qui était exercé sur l’ensemble du secteur de l’information et de la communication dans la région.
La pluralité des voix dans la sphère publique, rendue possible grâce aux réseaux numériques/sociaux de plus en plus répandus, a également favorisé l’émergence de modèles de diffusion généralisée d’informations erronées ou trompeuses, l’instrumentalisation coordonnée des réseaux sociaux, les menaces et manipulations de l’opinion publique, etc. Ces pratiques ont mis en évidence, une fois de plus, le rôle important que les grands médias doivent jouer en tant que "gardiens" de l’information, afin de contrôler de manière professionnelle ce que le public consomme comme nouvelles et informations.
L’idée de "contrôle", telle qu’elle a été abordée à l’origine par Kurt Lewin (1947), implique le passage d’informations, d’objets ou de personnes par des "portes" contrôlées par les acteurs contextuels concernés. L’augmentation des mobilités forcées, volontaires, légales et illégales des personnes à l’intérieur et à travers le Sahel se relie à l’évolution des pratiques de circulation et de contrôle des informations dans la région dans un contexte marqué par des conflits armés.
Ceci suggère que la situation au Sahel peut actuellement fournir une lentille utile pour examiner, à travers des perspectives multidisciplinaires, les pratiques de « gatekeeping » en ce qui concerne les mobilités des personnes et les médiations des informations dans les situations de conflit armé.
À la lumière de ce qui précède, cette conférence de deux jours vise à réunir des chercheurs, des professionnels des médias, des activistes des réseaux sociaux et des ONG travaillant dans le domaine de la migration et du journalisme et des médias au Sahel, ou dans des contextes connexes, afin d’examiner les pratiques de contrôle autour des mobilités des personnes et des processus de médiation des informations dans des situations caractérisées par des conflits armés et des transformations croissantes des écologies de la communication. Nous sommes particulièrement intéressés par les constructions, les négociations, l’adaptation ou le contournement des pratiques de contrôle dans des contextes formels et informels et par leur lien avec les mobilités/circulations de personnes et de l’information dans des contextes de conflits.
Contributions potentielles
Nous sollicitons donc des contributions comparatives ou portant sur un seul pays qui chercheront à aborder l’une des questions clés suivantes de manière théorique et/ou empirique :
1. Comment les travailleurs des médias et les autres acteurs/groupes sociaux concernés au Sahel collectent, traitent et diffusent les informations sur la migration et l’insécurité dans la région ? Quels sont les défis auxquels ils sont confrontés et comment pouvons-nous théoriser à la fois ces défis et leurs pratiques adaptatives ? En particulier, de quelle manière ces pratiques adaptatives enrichissent, défient et étendent les compréhensions conventionnelles des pratiques de contrôle dans les études sur les médias, le journalisme et la communication ? Plus généralement, quels sont les filtres d’inclusion et d’exclusion qui émergent dans les discussions publiques sur la migration et les conflits au Sahel et quelles sont les implications de ces modèles de filtrage pour les politiques publiques et les débats démocratiques ?
2. Comment l’oralité, caractéristique des écologies africaines de la communication, est-elle encouragée, modifiée et remise en question par des pratiques de communication à médiation numérique centrées sur les discussions sur l’insécurité et la migration au Sahel ?
3. Comment les pratiques formelles et informelles de « gatekeeping » sont-elles liées aux mobilités des personnes à l’intérieur et à l’extérieur du Sahel et que signifient ces modèles émergents pour notre compréhension du « gatekeeping » vu sous l’angle des études sur la migration ?
4. Quels sont les défis de l’étude des pratiques de « gatekeeping » autour des mobilités et des médiations de conflits et comment les surmonter sans mettre en danger l’intégrité du processus de recherche ?
5. Quelles synergies théoriques émergent du Sahel en ce qui concerne l’élargissement des compréhensions multidisciplinaires et la pertinence du « gatekeeping » comme une perspective centrale pour examiner les mobilités et la circulation des personnes et des informations dans les contextes de conflits ?
Procédure de soumission
Les contributeurs intéressés sont invités à soumettre des résumés pour la conférence au plus tard le 18 juillet 2022. Les résumés et les communications peuvent se faire en français ou anglais. Les résumés doivent comporter 500 mots maximum. Le résumé, incluant une très courte présentation de chaque contributeur, doit être soumis par courrier électronique au format MS Word ou PDF aux adresses suivantes :
Heidi Bojsen : hbojsen@ruc.dk
Ismaël Compaoré : elamsi25@yahoo.fr
Teke Ngomba : imvjnt@cc.au.dk
Tous les résumés soumis feront l’objet d’une évaluation par le comité scientifique de la conférence. Après notification de l’acceptation des propositions, les contributeurs devront soumettre un manuscrit complet (entre 6.500 et 8.000 mots) avant le 1er septembre 2022. Les manuscrits soumis ne doivent pas avoir été publiés précédemment où être en cours d’examen pour publication ailleurs. Une sélection de manuscrits de la conférence sera soumise pour publication dans un numéro spécial d’une revue internationale à comité de lecture.
Dates importantes
Date limite de soumission des résumés : 18 juillet 2022.
Notification de la décision concernant les résumés : 21 juillet 2022
Soumission des manuscrits complets : 1er septembre 2022
Présentations à la conférence : 15-16 septembre 2022.
Demandes de renseignements
Pour toute question ou besoin d’informations complémentaires, veuillez contacter Heidi Bojsen (hbojsen@ruc.dk /+45 4674 3255), Ludovic Ouhonyioué KIBORA (kludovic@yahoo.fr/ +226 70 26 09 24) and Ismaël Compaoré (elamsi25@yahoo.fr /+226 76 14 18 26).
Références :
Lewin, K. (1947). Frontiers in Group Dynamics : II. Channels of Group Life ; Social Planning and Action Research. Human Relations 1(2):143-153.
UNHCR (2022). Decade of Sahel conflict leaves 2.5 million people displaced. Available online at : https://www.unhcr.org/news/briefing/2022/1/61e137ac4/decade-sahel-conflict-leaves-25-million-people-displaced.html (accessed on 23 March 2022).
Vos Tim P., & Heinderyckx, F. (éds.) (2015) Gatekeeping in Transition, Londre/NY : Routledge.
Yayboke E. & Aboneaaj, R. (2020). Peril in the Desert : Irregular Migration through the Sahel. Center for Strategic and International Studies. Available online at : https://www.csis.org/analysis/peril-desert-irregular-migration-through-sahel (accessed on 23 March 2022).
Médiatisation, mobilités et les mesures de « gatekeeping » dans un contexte d’insécurité au Sahel
Call for Papers
Appel à contributions
International Conference on the Theme :
Colloque international sur le thème :
Mediatization, Mobilities and the Gatekeeping Practices in a Context of Insecurity in the Sahel
Médiatisation, mobilités et les mesures de « gatekeeping » dans un contexte d’insécurité au Sahel
Venue of the Conference / Localité du colloque : Institut des sciences des sociétés, Ouagadougou, Burkina Faso
Date of the Conference /Date du colloque : 15 -16 Sept. 2022
Introduction
The insecurity currently weighing on Burkina Faso, Mali and Niger is often described as caused exclusively by armed groups, at times called terrorist or jihadist groups, which have carried out a series of attacks against civilians as well as national and international armed forces. But historically as well as currently, violence in the Sahel is not the prerogative of insurgent groups. Across the Sahel, violence against civilians has also been committed by a range of actors including national armies, militias, bandits and local defense groups, as well as external actors (foreign troops, private companies). In other words, the idea that the national state possesses the monopoly of legitimate violence has largely been debunked in the Sahel.
The spate of insecurity currently unfolding in the Sahel has worsened an already precarious situation as far as human development is concerned. In particular, increasing insecurity has been a primary driver lately, of significant intra-and international migration within and beyond the Sahel. UNHCR, the United Nations’ Refugee Agency, recently reported for instance that the conflict in Sahel ‘has forced more than 2.5 million people to flee their homes in the last decade’ (UNHCR, 2022).
This significant displacement of people has further compounded the Sahel’s role in illegal migration to Europe given that the region is a ‘key corridor and departure point for those trying to reach Europe, often at extreme personal risk’ (Erol Yayboke & Rakan Aboneaaj, 2020).
The emergence of several centers of armed power involving both state and non-state actors and the precarious mobility of persons both legally and illegally within and across the Sahel are all taking place in a context of rapidly transforming communication ecologies. Like elsewhere across sub-Saharan Africa, digital media/technologies- especially the proliferation of social media such as WhatsApp and Facebook, have emerged as major drivers of transformations in the nature of private and public communication practices.
Parallel to the loss of the state’s monopoly over legitimate use of violence highlighted above, the increasing proliferation of social media in the Sahel has challenged the monopoly of mainstream news media to distribute information of public relevance in the region. The plurality of voices in the public sphere made possible by the proliferation of digital/social media has also led to widespread circulation of wrong or misleading information and a coordinated instrumentalization of social media by both state and non-state actors in order to threaten critics, including media workers and to manipulate national and international public opinion. Such practices have brought to the fore once more, the important roles that mainstream news media must play as ‘gatekeepers’ of information to professionally vet what the public consumes as news and information.
Inherent in the idea of ‘gatekeeping’ as originally discussed by Kurt Lewin (1947) is the passage of information, objects or persons through ‘gates’ that are controlled by relevant contextual actors. The increasing forced, voluntary legal and illegal mobilities of people within across the Sahel both affect and are affected by changing practices of circulation. They involve complex practices of vetting news and information in the region in a context marked by armed conflicts. This suggests that the situation in the Sahel may currently provide a useful lens to examine through multidisciplinary perspectives, gatekeeping practices as concerns mobilities of persons and mediations of news and information in situations of armed conflict.
In light of the above, this two-day conference aims to bring together scholars, media practitioners and NGO activists working in the domain of migration, journalism and media in the Sahel or related contexts to examine gatekeeping practices around mobilities of persons and processes of mediations of news and information in situations characterized by armed conflict and increasing transformations of communication ecologies. We are particularly interested in the constructions, negotiations, adaptation and or circumventions of gatekeeping practices in formal and informal contexts and as it relates to mobilities/circulations people and information in contexts of conflicts.
Potential Contributions
We are therefore soliciting comparative or single country contributions that will seek to address any of the following key questions theoretically and/ or empirically :
1. How do media workers and other relevant social actors/groups in the Sahel retrieve, verify and distribute information about migration and insecurity in the region ?
What challenges are they facing and how can we theorize both these challenges and their adaptive practices ? In particular, in what ways do these adaptive practices enrich, challenge and expand conventional understandings of gatekeeping practices in media, journalism and communication studies ? Broadly, which filters of inclusion and exclusion are emerging as concerns public discussions of migration and conflicts in the Sahel and what are the implications of these filtering patterns for public policy and democratic debates ?
2. How is the distinctive orality of African communication ecologies fostered, changed and challenged through digitally mediated communication practices centered on discussions of insecurity and migration in the Sahel ?
3. How are formal and informal gatekeeping practices related to mobilities of persons within and beyond Sahel changing and what do such new patterns mean for our understanding of gatekeeping as seen from the lens of migration studies ?
4. What are the challenges in studying gatekeeping practices around mobilities and mediations of conflict and how can these be overcome in ways that do not endanger the integrity of the research process ?
5. What theoretical synergies are emerging from the Sahel with regards to expanding multidisciplinary understandings and relevance of gatekeeping as a central perspective to examine mobilities and circulation of persons and information in contexts of conflicts ?
Submission Procedure
Interested contributors are invited to submit abstracts for the conference on or before 18 July 2022. The abstracts should be maximum 500 words. Abstracts and communications may be delivered in English or French. The abstract, including a very short presentation of each contributor, should be submitted through email in MS Word or PDF format to the following :
Heidi Bojsen : hbojsen@ruc.dk
Ismaël Compaoré : elamsi25@yahoo.fr
Teke Ngomba : imvjnt@cc.au.dk
All submitted abstracts will be peer-reviewed by the scientific committee of the conference. Following notification of acceptance of proposals, contributors will be expected to submit a full manuscript (ranging between 6.500 – 8.000 words) by 1 September 2022. Submitted manuscripts should not have been previously published or be under review for publication elsewhere. A selection of manuscripts from the conference will be submitted for publications as a special issue of an international peer-reviewed journal.
Important Dates
Deadline to Submit Abstracts : 18 July 2022
Notification of Decision on Abstracts : 21 July 2022
Submission of Full Manuscripts : 1 September 2022
Conference Presentations : 15-16 September 2022.
Inquiries
For any questions or need for further information, please contact Heidi Bojsen (hbojsen@ruc.dk /+45 4674 3255), Ludovic Ouhonyioué KIBORA (kludovic@yahoo.fr/ +226 70 26 09 24) and Ismaël Compaoré (elamsi25@yahoo.fr /+226 76 14 18 26).
References :
Lewin, K. (1947). Frontiers in Group Dynamics : II. Channels of Group Life ; Social Planning and Action Research. Human Relations 1(2):143-153.
UNHCR (2022). Decade of Sahel conflict leaves 2.5 million people displaced. Available online at : https://www.unhcr.org/news/briefing/2022/1/61e137ac4/decade-sahel-conflict-leaves-25-million-people-displaced.html (accessed on 23 March 2022).
Vos Tim P., & Heinderyckx, F. (eds.) (2015). Gatekeeping in Transition, London/NY : Routledge.
Yayboke E. & Aboneaaj, R. (2020). Peril in the Desert : Irregular Migration through the Sahel. Center for Strategic and International Studies. Available online at : https://www.csis.org/analysis/peril-desert-irregular-migration-through-sahel (accessed on 23 March 2022).
