Actualités :: Indemnités des députés : Trop, c’est trop !

La création de cette institution en 1991 était l’un des signaux forts de l’adieu à l’Etat d’exception. Dénommée d’abord Assemblée des députés du peuple (ADP), les vestiges et les stigmates de la Révolution étant encore visibles, elle prendra finalement l’appellation plus sobre et moins idéologiquement chargée d’Assemblée nationale.

Son rôle : voter la loi, consentir l’impôt et contrôler l’action gouvernementale, aux termes des dispositions de l’article 84 de la Constitution de 1991, laquelle était, elle aussi, un signe de fin d’une époque où seuls le crépitement des armes donnait la météo politique du Pays des hommes intègres.

Ainsi donc, la vieille bâtisse qui a hébergé bien des services pendant le CMRPN, le CSP, la Révolution et ensuite la Rectification, commençait à reprendre vie et couleurs. On verra les tout nouveaux députés y entrer, des parlementaires dont le signe distinctif était le véhicule flambant neuf, surtout des « Pajeros » ou d’autres « 4x4 » acquis selon des conditions douces : paiement à tempérament, hors-taxes et hors-douanes.

Pour certains députés, les 240 000 francs environ qu’ils touchaient chaque mois ne changeaient pas beaucoup leur quotidien, comparativement au salaire qu’ils avaient abandonné pour l’écharpe et les lambris de la république. Mais pour la majorité, c’était le Pérou, surtout que l’on était loin de la dévaluation. Aujourd’hui, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts et les choses sont allées s’améliorant côté hémicycle.

Le vieux bâtiment scintille de mille feux pour ne pas dire de ses mille vitres. De même que les « représentants du peuple » qui y séjournent. Aux indemnités de sessions et au prêt sans intérêt pour se payer sa bagnole de rêve se sont ajoutés les petits cadeaux pour « bien fêter Noël », une pension pour ceux qui ont à leur actif trois mandats et les 3 millions annuels pour « financer de petits projets dans sa circonscription », dont une avance de ladite somme est curieusement disponible les derniers jours de l’année.

Et ce n’est pas tout car le législatif ne s’oublie pas, l’Exécutif non plus ne se refuse rien : le 31 juin 2003, par arrêté ministériel, un prêt de 15 millions sans intérêt est ainsi accordé aux ministres, présidents d’institutions et députés non siégeant (sic) pour se doter d’un véhicule neuf à usage personnel. Et ce, en pleine épidémie de méningite, aggravée par la rareté et la cherté du vaccin W135. Puis était venue s’ajouter une petite brique par tête de pipe pour les vacances ministérielles.
Alors, l’inénarrable Adama Fofana ne s’était pas gêné pour dire que le donateur, c’est-à-dire Blaise Compaoré, en avait non seulement le droit, mais aussi les moyens. Ça ne s’invente pas.

La dernière décision en date concernant ces prébendes qu’on se distribue entre petits copains, c’est le passage de 21 000 à 30 000 francs des indemnités journalières de session parlementaire. Comme on le sait, un libellé laconique de l’article 88 de la Constitution prévoit deux types de sessions : les sessions ordinaires de 90 jours, au nombre de deux, soit 180 jours dans l’année. La première débute le premier mercredi du mois de mars et la seconde le dernier mercredi de septembre. Il y a en outre des sessions extraordinaires, sur un ordre du jour déterminé de 15 jours maximum.

Un calcul enfantin donne désormais une indemnité annuelle de cinq millions quatre cent mille à chaque représentant ou 6,3 millions s’il y a deux sessions extraordinaires. Si on ajoute à cela les consistants émoluments et les nombreuses autres facilités dont jouissent nos honorables députés, on finit par se convaincre qu’un élu, qu’il soit du pouvoir ou de l’opposition, ça ne vit pas de peu.

Mais trop c’est trop ! Et en l’espèce, ni cette expression galvaudée qui dit que « c’est le prix à payer pour la démocratie », ni l’affirmation de nos macroéconomistes maison que « nos indicateurs sont au vert » ne sauraient expliquer cette boulimie de l’Assemblée nationale. Si les parlementaires font assurément l’objet de sollicitations diverses du fait de leur statut ou du fait de leurs promesses mirobolantes non respectées pendant leur campagne législative (si fait que certains en sont arrivés à voyager nuitamment dans leur fief de peur des jets de pierres), ils ne constituent tout de même pas la classe sociale qui mérite le plus ces incessantes retouches financières !

Cela est d’autant plus gênant que ceux qui votent les lois se révèlent être aujourd’hui les plus grands prédateurs du Trésor. Il faut donc commencer à paniquer, pour parodier une pub bien connue.

C’est d’autant plus triste que, comme à l’époque des 15 millions, cette nouvelle couche de beurre sur les épinards des parlementaires est passée alors qu’on n’a pas fini d’enterrer les cadavres victimes du choléra et de la famine. Et que la pauvreté des populations est toujours aussi insoutenable.

A deux ans de la fin de leur mandat et à deux mois de la prochaine présidentielle, cette décision ne fait que ternir l’image des locataires de l’auguste Assemblée, qui était déjà taxée (à tort ou à raison ?) de budgétivore. C’est vrai qu’à deux ans de l’échéance, on comprend que tout chef de famille prévoyant veuille bien terminer son mur.

Mais s’il faut voter les lois à ce prix, il y a de quoi regretter la période des raabo, kiti et autres zatu, dont l’élaboration et l’application revenaient moins cher. Au fait, ces messieurs et dames qui se partagent impunément les morceaux les plus viandeux de la république savent-ils seulement le montant du SMIG dans ce pays ?

Observateur Paalga

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