Actualités :: Paramanga E. Yonli : “Mon gouvernement est l’instrument de la mise en œuvre (...)
P.E. Yonli

Comme il est de coutume depuis qu’il est appelé aux affaires, le Premier ministre Paramanga Ernest YONLI, après chacune de ses nominations, rencontre la presse pour donner les grandes lignes des actions futures de son gouvernement.

Pour la troisième fois, l’homme n’a pas dérogé à la « tradition » et a rencontré les médias le vendredi 13 janvier 2006 pour leur entretenir de la formation du nouveau gouvernement et des défis qu’il doit relever pour satisfaire les exigences du programme du président COMPAORE.

Vu la profondeur du débat, des idées et l’importance du sujet, l’Opinion, votre journal, s’est fait le devoir de retranscrire les axes clés de cette conférence de presse pour vous.

- Lors de la prise de contact avec le président du Faso, le lundi 9 janvier, vous avez affirmé, monsieur le Premier ministre, que le défi de ce quinquennat sera la répartition des produits de la croissance. Comment cette répartition va se faire ? Ne sera-t-elle pas paradoxale avec les revendications faites au niveau social par les syndicats ?

- Certains ministères comme celui des Infrastructures et des Transports et bien d’autres, ont été éclatés en plusieurs ministères. Pourquoi le ministère de l’Agriculture n’a pas été touché par cette philosophie et quel est l’objectif recherché par ce redimentionnement ?

- Vous avez dit dans votre déclaration liminaire que les engagements pris par le chef de l’Etat seront respectés. Est-ce à dire que tout cela va se faire dans les 5 ans à venir ?

Paramanga Ernest YONLI : (PEY) : Je crois que vous avez déjà touché du doigt un certain nombre de questions qui feront l’objet de nos échanges. Premièrement, sur la question de la redistribution des fruits de la croissance, vous me demandez par quel mécanisme cela va se faire ? Naturellement, je dirais qu’il ne s’agit pas de réunir la cagnotte et d’appeler chaque Burkinabè pour lui dire voilà ta part, parce que cela n’est pas possible.

Les sociétés modernes sont organisées sur la base de la production et de la répartition des biens et services à travers les différentes activités que mènent les individus dans la société, l’ampleur de leur travail, les secteurs où ils produisent et à travers les mécanismes marchands qu’ils dégagent des revenus monétaires. Ce sont les mécanismes normaux dans toutes les sociétés. Avant c’était le troc, et des Etats-Unis d’Amérique au Burkina Faso en passant par la France, les gouvernants passent à travers ces mécanismes naturels d’une économie et de la société pour distribuer les fruits de la croissance.

Pour être plus clair, il s’agit de faire en sorte que chaque citoyen puisse bénéficier des fruits de son effort en organisant mieux l’économie. Depuis le processus de production jusqu’à la consommation, c’est à dire, jusqu’au moment où l’on met son doigt dans l’assiette pour manger. Cela suppose que nous développions et organisions tous les pans de l’économie, c’est-à-dire les secteurs de la production, les secteurs du commerce, et les secteurs financiers, et d’accès aux moyens financiers.

Par exemple pour produire, un agriculteur moderne a besoin de disposer de l’argent ; et s’il n’y a pas un système de financement adapté à ses capacités notamment de garantie, il ne pourra pas avoir les ressources nécessaires pour produire davantage.

Mais si nous mettons en place un système financier décentralisé avec des conditionnalités acceptables et accessibles par différents travailleurs, il est clair qu’ils auront les moyens de pouvoir investir et pouvoir tirer le meilleur profit de leur investissement.
De la même façon, dans le cadre du travail salarié, il faut faire en sorte que tous les travailleurs aient des contrats avec leurs employeurs. Ce n’est pas le cas actuellement, et je le concède.

Il faut faire en sorte que toutes les professions soient organisées dans l’économie moderne, que les relations de travail soient des relations contractuelles à base desquelles les salaires sont fixés. Voilà quelques exemples pour montrer que ce ne sont pas des mécanismes particuliers que nous allons inventer, mais nous allons mieux organiser l’économie, mieux la structurer, et faire en sorte que les différents mécanismes fonctionnent bien à la satisfaction des travailleurs et de tous les Burkinabè.

Vous me demandez, également comme la croissance est si grande, pourquoi ne pas répondre aux revendications des travailleurs ?
Je pense que comme je viens de l’expliquer vous constatez que ce n’est pas comme ça. Parce que dans une économie nationale, si vous prenez le PNB (Produit national brut), il ne s’agit pas de dire, tel groupe de travailleurs, par exemple les travailleurs du secteur de l’industrie savonnière ont produit tant de bénéfices, il faut prendre ça, le leur remettre, (je vais parler vulgairement) pour qu’ils se partagent.

Si l’on faisait comme ça, je pense que l’économie s’arrêterait. Parce que, quand vous produisez du savon, il faut savoir que c’est quelqu’un peut être qui a fait le beurre de karité, que c’est quelqu’un d’autre qui a produit le coton, donc, je pense que c’est un cycle qui engage beaucoup de gens et à travers la chaîne, tout le monde doit tirer les marrons du feu. Si les conditions les permettent, nous allons à tout moment répondre aux revendications des travailleurs en donnant ce qui est possible de donner en fonction de la richesse disponible.

Et je peux dire et déjà vous annoncer que le dialogue sera un mode d’action de ce gouvernement, là pour pouvoir écouter l’ensemble des couches sociales organisées et trouver les solutions les plus appropriées à leurs demandes. Voilà pour ce qui est de votre première question. La deuxième question, redimensionnement des ministères, quel objectif poursuivi ? Je pense que vous avez fait une mauvaise lecture, où vous n’avez pas bien entendu, si le ministère de l’Agriculture a été touché.

Peut-être que vous voulez qu’on éclate comme le ministère des Infrastructures en faisant plusieurs ministères, mais nous, nous avons pensé autre chose. Le regroupement du ministère de l’Agriculture je le rappelle, et l’avais déjà dit en 2000 où en 2002, c’est d’abord de donner assez de cohésion à la politique du gouvernement en matière de développement rural.

Comme vous le savez notre économie est essentiellement agricole, et comme vous le savez également, c’est l’agriculture qui est porteur de la croissance dans notre pays. Je vais vous donner un exemple : quand nous faisions l’évaluation avec nos partenaires, le FMI et la Banque mondiale de ce que va être la croissance en 2005, on tablait sur une croissance comprise en 3 et 4 % sur la base d’une année normale de production agricole du Burkina Faso.

On se retrouve aujourd’hui, et je peux le dire, le président l’a déjà annoncé à une croissance économique de 7,5 % donc presque le double de ce qu’on estimait avec nos partenaires. Vous savez d’où ça vient, de la bonne pluviométrie et des bonnes récoltes tout simplement. Ça veut dire donc, que si l’agriculture est très bien organisée si on lui donne assez de moyens nous pouvons effectivement accélérer notre croissance, mais aussi l’approfondir et atteindre des taux de croissance, voisins de 10 et même au-delà de 10.

C’est une des conditions sine qua non de pouvoir disposer de revenus additionnels à distribuer à travers les mécanismes économiques. Donc je pense qu’il faut une politique agricole cohérente qui nous permette de prendre en compte tous les facteurs de productions. Et comme vous le savez, le premier facteur de production agricole dans notre pays c’est l’eau et c’est pour ça que nous avons regroupé l’Agriculture avec l’Hydraulique et bien sûr les Ressources halieutiques qui sont des produits de l’eau. Je pense qu’on n’a pas encore fini cette démarche et il faut continuer à avoir un ministère organisé comme ça de façon cohérente.

Maintenant, nous avons trouvé que les charges étaient trop lourdes pour un seul ministre parce qu’il y a beaucoup d’activités. Mais également comme je viens de le dire, il faut pousser le caractère économique de l’agriculture plus en profondeur au lieu de l’utiliser comme secteur producteur de ressources végétales, l’agriculture, devenue secteur économique porteur de la croissance a besoin d’une autre façon d’être organisée et d’être soutenue par des gens qui sont soit un ministre ou deux ministres capables de faire cette intégration, parfaite de l’économie agricole que nous souhaitons.
Et donc c’est pour ça que nous avons créé un ministère délégué à l’Agriculture.

Je ne parlerai pas de ministre, mais si vous regardez le cursus de M. Bonoudaba DABIRE, vous savez que c’est l’un de nos économistes qui a travaillé sur beaucoup de programmes dans ce pays.
Je le dis parce qu’il faut le dire pour répondre bien à votre question. Nous n’avons pas pris quelqu’un au hasard comme ça pour venir faire de la figuration, mais pour travailler dans l’optique des résultats que nous voulons obtenir. D’une façon générale, les ministères ont été redimensionnés pour leur donner un peu plus de visibilité.

Pour encore illustrer votre question, je prends un ministère qui a été transformé celui des Infrastructures. Si vous lisez le programme du président, si vous l’avez écouté pendant la campagne, beaucoup d’attentes mais aussi beaucoup d’engagements ont été pris dans le domaine des Infrastructures économiques et de service, c’est à dire les routes, l’habitat, les grands barrages, mais aussi les grandes infrastructures de soutien comme le nouvel aéroport de Ouagadougou.

Il faut organiser la fluidité des transports à travers le Burkina, mais aussi du Burkina vers l’extérieur donc, c’est un programme avec de grandes ambitions dans le domaine des infrastructures économiques et de service parce que c’est le soutien essentiel à l’économie et à la croissance. Et pour cela, il faut donner des missions très claires, mais précises à des ministres bien déterminés.

Nous avons pensé que le ministère des Infrastructures était devenu trop gigantesque et qu’un seul ministre ou un seul ministère n’allait pas donner assez de clarté et d’efficacité dans la réalisation et la conduite des projets d’infrastructures par rapport aux ambitions que nous voulons donc, c’est pour plus d’efficacité et donner plus de précision dans les actions à mener et pour ne pas faire des amalgames, que nous avons éclaté ce ministère en trois ministères.

Je pense que les autres ministères procèdent donc de la même volonté du souci d’efficacité. Mais il y a une grand variable qui explique toute cette modification, c’est la question temps. Le mandat présidentiel est passé de 7 ans à 5 ans, et nous, nous voulons réaliser de grandes choses en cinq ans. Alors, il faut être efficace, il n’y a pas d’autres solutions que l’efficacité ; c’est pourquoi, nous avons pensé qu’en qualifiant mieux les ministères, en précisant leurs missions, on pourra donc aller vite dans les délais requis donc dans les 5 ans et j’ai répondu en même temps à votre 3e question.

M. le Premier ministre, pouvez-vous nous dire de façon officielle pourquoi certains ministres ont quitté le gouvernement parce que officieusement, beaucoup de choses sont dites ?

P E Y : Ça va être une réponse très courte. Vous avez entendu des explications officieuses, moi je vous en donne l’officielle. C’est qu’un gouvernement, d’abord quand on y arrive, on doit être prêt à partir. A commencer par le Premier ministre lui-même. Et comme vous le savez et l’imaginaire populaire le dit d’ailleurs, le Premier ministre est un fusible quand il saute, l’électricité se coupe.

Et s’il n’y a pas de Premier ministre ça veut dire que le gouvernement même n’est pas là. Tous les membres du gouvernement quand ils arrivent, on le leur dit, vous êtes venus pour un objectif précis, pour réaliser les ambitions d’un gouvernement, il faut travailler à les réaliser et à tout moment si ces ambitions ne sont pas atteintes ou sont insuffisantes il faut être prêt à partir.

Ça c’est la première explication. La deuxième, je crois que je viens d’expliquer les ambitions du gouvernement et les objectifs à atteindre dans un délai de cinq ans. Nous avons redimensionné des ministères mais nous avons également comme je l’ai dit, choisi des hommes et des femmes pour porter les réalisations de ce programme là, et naturellement, quand il y a des arrivants, il y a des partants.

Comment, Excellence peut-on réussir une croissance économique avec des facteurs de production très élevés ? Au Burkina Faso tout coûte cher, les hydrocarbures, les routes, le téléphone, l’électricité, etc.

P E Y : Bien, je pense que votre question me permet d’insister sur la pertinence du programme du président du Faso. Parce que justement, il s’agit de réaliser un taux de croissance plus élevé, une croissance de qualité, c’est-à-dire une croissance qui profite à tous ceux qui participent au labeur national et qui les touche dans l’intégralité de leurs efforts. C’est ça la substance du programme du président.

Réaliser une croissance forte avec justement les réalités du Burkina ; c’est d’abord, faire en sorte que les coûts de production soient compétitifs.
N’oublions pas que nous sommes dans une économie mondialisée, et même au niveau de la sous-région nous avons besoin d’être plus compétitifs que nos voisins parce que nous avons les mêmes avantages juridiques et tarifaires au plan commercial à travers l’UEMOA ou la CEDEAO.

Il faut produire donc beaucoup plus d’effets positifs sur nos avantages comparatifs et comme vous le dites si bien, c’est amoindrir les coûts qui font que nos économies, nos industries ne peuvent pas être compétitives.
Qu’est-ce qu’il faut faire ? C’est effectivement, créer des infrastructures de soutien à la production et à la commercialisation.

Je venais de le dire, une des substances importantes du programme du président, « le progrès continu pour une société d’espérance », ce sont les infrastructures économiques et de services qu’il faut réaliser en grand nombre et de façon importante, mais aussi, en favorisant la fluidité des transports des marchandises et des personnes au niveau du Burkina Faso à l’intérieur mais aussi vers la sous-région, les ports notamment.

Pour le coût de l’énergie, vous savez que depuis un certain nombre d’années, notre pays travaille, (parce que c’est le coût justement le plus prohibitif celui de l’énergie notamment l’électricité) aux inter- connections avec les pays comme le Ghana, la Côte d’Ivoire et bientôt, je peux vous l’annoncer avec le Nigeria via le Niger. Nous avons un projet qui va démarrer, et les concertations sont déjà en cours parce que le Nigeria a un excédent extraordinaire en matière d’énergie électrique.

Il approvisionne déjà un certain nombre de pays de la sous-région, le Niger et le Bénin, et nous pouvons par le Niger tirer cette énergie et pouvoir baisser de façon sensible le coût de l’énergie électrique. De la même façon, je parlais des infrastructures de transport, de l’ambition de construire un nouvel aéroport international qui est déjà une réalité à travers la conception du projet, mais aussi, d’ouvrir de grandes voies.

Je suis fier qu notre pays soit déjà ouvert sur la plupart des voisins maritimes par le goudron, certains par des doubles voies, mais nous allons améliorer le trafic, élargir peut-être la capacité et l’efficacité de ces routes là pour que les gens s’approvisionnent moins cher et exportent moins cher. Il y n’a donc pas de miracle, c’est d’agir sur les facteurs de production dont les coûts unitaires sont les plus élevés de façon à ce que nous puissions obtenir des facteurs de production à des conditions meilleurs marchés pour que notre économie soit plus compétitive.

Expliquez-nous Monsieur le Premier ministre comment l’ADF/RDA qui a soutenu Blaise COMPAORE se retrouve avec rien que deux ministères ?

P E Y : Pour ce qui est du niveau de participation de l’ADF/RDA dans ce gouvernement, je pense qu’il ne s’agit pas pour nous, de quantifier ou de dire que tel parti ou telle force politique, ou telle force sociale, vous savez qu’il y avait des associations qui ont soutenu Blaise COMPAORE. Pourquoi vous ne me demandez pas pourquoi les Tanties n’ont pas un ministère ?

Vous aurez pu me poser la même question ? Le problème n’est pas de mesurer parce que si je vous demande à vous les journalistes d’aller m’évaluer le degré ou la partie des efforts de chaque force sociale qui a produit les résultats de 80,35 % je pense que vous allez prendre une éternité.

Comme ce n’est pas possible et que ce n’est pas politiquement utile, il ne s’agit pas de dire, parce que l’ADF/RDA était chef de file de l’opposition elle a soutenu le président il faut peut-être diviser le gouvernement en deux : une partie pour l’ADF/RDA et une autre partie pour le CDP. Ce n’est pas comme ça. Je pense que c’est le principe du soutien à un programme et que c’est dans cet esprit-là que l’ADF/RDA a agi. Elle a agi parce qu’elle pensait que, le programme du président était à même de réaliser un certain nombre d’ambitions qu’elle-même se donnait dans son parti.

Vous pouvez lui poser la question. En tout cas, c’était un choix délibéré de soutenir le candidat Blaise COMPAORE et je voudrais dire que ce soutien n’était pas un soutien de marchandage à ce que je sache et je suis bien placé pour le dire.
Deuxièmement, je crois que le soutien à un programme c’est sur aussi son contenu et sa durée je viens de vous rappeler que le programme est basé sur cinq ans.

Troisièmement, le gouvernement est la mise en œuvre du programme à travers l’Etat qui ne s’arrête pas au gouvernement : vous savez que l’Etat est organisé depuis le chef de l’Etat qui est une institution jusqu’au dernier service villageois ou de secteur. Je pense qu’il y a des niveaux de participation dans la chaîne d’organisation de l’Etat et de la société auquel l’ADF/RDA pouvait prendre part et contribuer à une réalisation efficace du programme du président.

Les questions de sécurité, la lutte contre la fraude et la corruption sont des priorités dans ce gouvernement qui vient d’être formé. Quand on regarde la configuration de ce gouvernement on se rend compte que, pratiquement tous ceux qui s’occupaient de ces questions sont toujours en poste dans le gouvernement. Est-ce qu’on doit penser que vous avez apporté d’autres armes ou bien c’est dans la continuité que vous allez mettre toutes ces questions au centre de vos préoccupations ?

P E Y : J’insiste pour dire que, la lutte contre l’insécurité et toutes les autres formes de délinquance donc d’incivisme seront combattues de façon plus visible parce que la lutte sera plus visible. Mais je voudrais dire que le problème n’est pas tant de changer un ministre qui s’occupait d’une priorité ou parce que tout simplement on pense que le ministre a échoué. Je ne le crois pas parce que c’est tout un processus. Je voudrais vous rappeler que les questions de la corruption, de la fraude ou du banditisme sont des questions de société aussi vieilles que les questions de production de richesse.

Parce que les deux sont liées. Il y a des gens qui travaillent dans toutes les sociétés organisées et il y a d’autres qui ne font rien et qui cherchent à utiliser leur intelligence pour soutirer justement le produit des labeurs des autres. Ce n’est donc pas quelque chose de nouveau, c’est quelque chose qui est au cœur et qui fait partie des normes sociales.

Toutes les sociétés ont combattu le banditisme, l’insécurité, la fraude et la corruption, maintenant nous sommes dans des sociétés modernes où c’est d’autres formes d’insécurité et d’autres formes de corruption, il faut le savoir. Je pense que personne ne croit pas et vous êtes bien placés pour le savoir qu’on peut combattre l’insécurité et la corruption à coup de baguette magique. Deuxièmement, on ne combat pas ces fléaux par le volontarisme, je pense qu’il faut nous donner le temps et les moyens collectifs d’abord pour combattre la fraude et la corruption d’une part, mais aussi l’insécurité d’autre part.

L’Etat a commencé par une volonté affichée en essayant de définir une politique de lutte contre l’insécurité qui est en train de prendre corps. Et comme vous l’aurez remarqué, puisque nous avons l’un des budgets de l’Etat le plus transparent en Afrique, on n’a pas honte, notre budget est transparent, et disponible, tout le monde peut le parcourir et savoir quelles sont les dotations budgétaires que nous consacrons aux différentes actions dans notre pays. Je dis donc que les dotations budgétaires vont crescendo en matière de renforcement de la capacité des structures chargées de lutter contre l’insécurité ou la corruption, la fraude dans notre pays : ça c’est pour les moyens.

Mais vous connaissez, nos moyens sont limités pour chaque chose et pour chaque chose prioritaire, nous demandons l’appui de nos partenaires, mais la question de l’insécurité ou la lutte contre la corruption, ce sont des questions de souveraineté. Les gens vous disent, faites-le vous-mêmes, nous, nous allons vous soutenir pour les autres choses et je suis d’accord avec eux et ça marche comme ça. Nous donnons les moyens qu’il faut. Deuxième chose, il faut organiser la société et l’Etat de façon à ce que chacun assume des responsabilités, mais toujours dans le temps.

Aucune opération coup de poing ne pourra venir à bout de l’insécurité qui est un phénomène social qui n’est pas toujours visible qu’on peut attraper et mettre de côté. Ça veut dire qu’il faut mobiliser la population, la société civile dans un cadre organisé ; nous avons imaginé la police de proximité qui n’est pas une panacée mais un moyen d’intéresser chaque citoyen burkinabè là où il se trouve depuis le village jusqu’au secteur des grandes villes et de Bobo-Dioulasso à sa responsabilité dans la lutte contre l’insécurité.

Et nous n’allons pas changer de politique, nous allons plutôt approfondir cet aspect parce que nous venons juste de commencer. On l’a lancé dans le Kouritenga à Koupéla, il faut maintenant lancer toute la politique dans l’ensemble du Burkina Faso. Cela prend du temps, ça coûte de l’argent, nous allons donner les moyens dont nous disposons.

Concernant la lutte contre la fraude et la corruption qui sont deux choses très voisines, c’est la volonté d’abord. J’ai entendu dire ici et là que le Premier ministre s’engage chaque fois devant les secteurs privés à combattre la corruption, je vais continuer de m’engager et je suis très sérieux et j’ai la volonté de continuer et je vais continuer avec l’ensemble du gouvernement.

Mais aussi, parce qu’on ne peut pas combattre la corruption et la fraude si les acteurs, tous les acteurs qui sont ceux qui par leurs activités créent les conditions de la fraude et de la corruption, ne prennent pas leurs parts de responsabilité. Ça commence par le monde du secteur privé n’est-ce pas ? On n’aura jamais suffisamment de douaniers, ni de policiers, ni d’inspecteurs du Trésor, où des impôts pour faire la course aux citoyens qui ne respectent rien en matière de lois et réglementations, on n’aura jamais ça.

Par contre, on pourra cultiver une conscience collective, une conscience citoyenne dans le temps, pour que chaque Burkinabè sache que c’est de lui d’abord de son action et de sa responsabilité que dépend le résultat collectif du gouvernement en matière de lutte contre la corruption et la fraude. Voilà ce que nous allons faire et croyez-moi que le gouvernement dans les cinq prochaines années va travailler à réaliser des objectifs qui garantissent une meilleure transparence.

Il faut encourager ceux qui travaillent et s’assurer qu’ils peuvent disposer du fruit de leur travail, ça passe par la sécurité, nous allons travailler à la renforcer, et ça passe également par fermer la route à tous ceux qui évitent à aller tout droit et qui veulent passer par des courtes échelles pour avoir leur pitance c’est-à-dire lutter contre la corruption dans l’administration, mais aussi dans le secteur privé et dans l’ensemble de la société.

Monsieur le Premier ministre, est-ce qu’un raz de marée électoral au profit de l’ADF/RDA aux municipales du 12 mars prochain peut donner naissance à une autre configuration du gouvernement YONLI III ?
Vous entamez votre 6e année, on vous annonce même pour l’après législative, est-ce que vous n’êtes pas sclérosés ?

P E Y : Je vais commencer par répondre par la dernière question. C’est très simple. Il faut vous remémorer dans le temps, quand je suis arrivé la première fois en novembre 2000 comme Premier ministre, c’est le Programme de développement solidaire qui avait cours.

J’ai
travaillé à gérer la conjoncture que vous connaissez à l’époque, mais également à mettre en œuvre le programme septennal du président. Aujourd’hui, j’ai un troisième bail comme vous le dites si bien, je pense que c’est un nouveau programme, c’est le Progrès continu pour une société d’espérance ». Ce n’est pas les mêmes priorités, ce n’est pas les mêmes exigences. D’ailleurs, j’ai rappelé quelques exigences de ce quinquennat-là.

Pour dire tout simplement que de par la nature des choses à faire, ce n’est pas tellement la même chose. Si vous avez des choses différentes à gérer vous devez imaginer et développer des initiatives différentes il n’y a donc pas de routine parce que les choses sur lesquelles il faut travailler ont changé et sont différentes. C’est d’abord la première chose.

La deuxième chose, dans un pays comme le Burkina Faso où tout est prioritaire, on ne doit pas manquer d’imagination pour pouvoir faire mieux. Je pense qu’à chercher, à imaginer et à faire mieux, nous sommes obligés de créer c’est pour ça que vous-mêmes je vous ai appelé à une année 2006 pleine de réussite et de créativité je pense que vous devez aborder l’année avec beaucoup plus d’ambitions et si vous êtes ambitieux, il faut créer.

Je pense que j’ai encore un esprit et un cerveau qui peuvent créer donc je ne me sclérose pas, au contraire, quand on vous fait confiance, vous travaillez toujours à mériter la confiance et je sais que cette confiance là, c’est d’abord le Président du Faso qui me la donne et c’est aussi de faire en sorte de satisfaire l’opinion burkinabè avec les résultats que nous devons réaliser, voilà donc des considérations qui m’empêchent de travailler dans la routine parce qu’il y a encore de la créativité et notre pays en a besoin et je pense que je suis encore capable d’imaginer des choses nouvelles et de faire mieux.

Concernant l’issue des municipales et sa conséquence sur le gouvernement YONLI III comme vous l’appelez, je crois qu’il faut savoir qu’en politique surtout quand les élections ont un caractère national, à chaque fois justement, on peut s’attendre à des changements.

Dans tous les pays du monde, on n’est pas à l’abri que les résultats des municipales, s’il y a des changements tellement importants en profondeur et en envergure que l’on change beaucoup de choses dans ce pays politiquement parlant y compris le gouvernement. Ça c’est possible. Je suis toujours prêt chaque matin que je me réveille à cette éventualité tout simplement.

Mais nous devons être inspirés dans une démocratie qui se construit à chaque fois de répondre à l’aspiration exprimée à travers les urnes par les populations. A chaque fois qu’il y aura un acte démocratique à travers les urnes, d’une certaine profondeur, d’une certaine ampleur, il est nécessaire que nous réajustions l’organisation de l’Etat et de société à travers les organes dirigeants du pays. C’est mon point de vue.

Propos recueillis par Frédéric ILBOUDO
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