Actualités :: Scrutin du 13-novembre : qui fit mieux ?

Dans notre édition n° 6503 du 21 au 23 octobre 2005, sous le titre « Qui dit mieux ? », nous faisions un traitement badin et quelque peu caricaturale de l’information, où chaque candidat à la présidentielle du 13 novembre 2005 faisait sa propre « prodada ». Au lendemain de cette parution, les 13 prétendants partaient à la pêche aux voix, vendant à qui mieux mieux son programme ou projet de société.

Durant cette campagne, les lecteurs et les observateurs ont donc pu voir chacun à l’œuvre sur le terrain. Le 13 novembre 2005, ce fut l’élection présidentielle, qui a vu comme on le sait, la victoire du candidat Blaise Compaoré. Après les résultats provisoires donnés par la CENI et validés plus tard par le Conseil constitutionnel, l’heureux élu a prêté serment en grandes pompes le 20 décembre dernier à Ouaga 2000.

Maintenant que les choses sont bien tassées, on peut donc revenir sur certains aspects de cette campagne. Des éléments qui, s’ils étaient mentionnés au moment de la campagne, ne seraient pas forcément à l’avantage des intéressés, surtout pour certains, dont la frilosité était à fleur de peau. C’est ce à quoi se sont livrés nos 12 points focaux, qui, durant cette pêche aux électeurs, étaient aux trousses de ceux qui ambitionnaient occuper le bureau principal du palais de Kosyam.

Après donc le « Qui dit mieux », voici rassemblé sur ce qui fut l’événement de l’année, le « Qui fit mieux ? » de la rédaction de l’Observateur Paalga, qui porte notamment sur l’organisation des présidentiables, le respect de leurs programmes de campagnes, leurs prestations télévisées, la teneur de leurs discours, etc.

Soumane Touré : Les dérapages verbaux d’un candidat à la magistrature suprême

Pour suivre les tournées électorales d’un candidat à la présidentielle, la presse, entre autres documents, a besoin de son programme de sorties. Le Parti africain de l’indépendance (PAI), certes en possédait, mais celui-ci a souvent subi des modifications qui ne permettaient pas aux hommes de média de couvrir toutes les étapes.

N’en déplaise à Soumane Touré, qui a affirmé que les journalistes ne faisaient pas leur boulot. Illustration : à L’Observateur paalga, ses sorties dans les Hauts-Bassins et dans la boucle du Mouhoun étaient attendues, puisque, dit-on, le PAI y est fortement implanté. Malheureusement, nous n’avons pas été informé quand son candidat à la présidentielle s’y rendait. Il a fallu prendre contact avec le directeur de campagne (D.C.) du parti, qui a rassuré les journalistes qu’il a été commis de les convoyer. L’heure du départ a même été fixée le même jour à 14h.

Puis, silence. Le DC ne donne plus signe de vie. L’équipe de Sidwaya nous téléphone régulièrement pour demander des nouvelles. Nous tentons vainement de joindre Soumane Touré lui-même. C’est 24h plus tard que nous avons pu joindre au téléphone le directeur de campagne, qui se trouvait à... Pô. "Le voyage est annulé", nous dit-il. Il a fallu contacter notre correspondant à Bobo-Dioulasso, qui a guetté Soumane Touré à son retour de la région des Cascades pour lui accorder une interview. Et il ne s’est pas gêné pour dire dans l’entretien, comme indiqué plus haut, que les journalistes ne font pas leur boulot.

Mais plus grave était son dérapage verbal autour d’un cercueil. "J’ai refusé d’aller à ses funérailles parce qu’il a trahi le PAI pour rejoindre le CDP". Ces propos du secrétaire général du PAI à Fada N’Gourma ont été diffusés à la TNB. Soumane Touré parlait du frère décédé d’Amirou Thiombiano, le fondateur du parti. Cette attitude de l’ancien syndicaliste est tout simplement de l’intolérance. Parce qu’à un certain moment de la vie politique, on ne partage pas les mêmes visions, alors on devient des ennemis, même jusqu’à la tombe. Cela rappelle les propos virulents, à un degré moindre toutefois, tenus par le leader du PAI à l’adresse du président de la CENI, Moussa Michel Tapsoba, et publiés dans nos colonnes.

A la suite, un lecteur avait réagi en affirmant que le patron du PAI ne peut être candidat à la présidentielle de 2005. Car, dit-il, si aujourd’hui il n’a que sa bouche pour parler et sa plume pour écrire, et il se comporte de la sorte, qu’adviendra-t-il le jour où il aura entre ses mains le pouvoir, les armes et les hommes ?

Toubé Clément Dakio : Quand la timidité tue la communication

Le candidat Toubé Clément Dakio a fait preuve d’une parfaite timidité durant la campagne présidentielle. C’est du moins le constat que nous avons fait sur cet homme. Depuis notre désignation pour être son point focal, nous n’avons pas cessé de le traquer. Pire, nous l’avons presque harcelé téléphoniquement pour ne pas rater ses sorties et déplacements. A ce niveau, c’était d’ailleurs très difficile, car il ne fallait pas le manquer le matin dans la mesure où dès qu’il sortait de son domicile, il était injoignable (il n’avait pas de téléphone mobile).

Malgré tout, nous nous sommes efforcé de l’appeler presque tous les jours. Il faut souligner au passage que le programme qu’il nous a remis au préalable n’a jamais été respecté. Ce qui compliquait davantage le travail. Nous avons toujours téléphoné pour savoir quand on sortait, quelle était la prochaine étape, etc. Et que dire de la ponctualité du candidat de l’UDD ?

En effet, lors des deux sorties que nous avons effectuées avec lui, à Bobo et à Nouna, les heures de départ étaient respectivement 4 heures et 5 heures du matin. Mais nous avons finalement pris la route de Sya à 7h et celle de Nouna à 8h. Les déplacements se faisant à bord du véhicule du candidat lui-même, à un moment donné, nous nous sommes senti comme une charge, car il paraissait contraint de nous trimbaler. D’ailleurs, pour sa dernière sortie, il n’a pas hésité à nous dire qu’il n’a pas de place.

Chez le candidat de l’UDD, nous avons constaté une organisation qui laisse à désirer. On a eu l’impression que souvent son staff ne savait que faire. Quel staff d’ailleurs ! Or en temps normal, si le candidat était bien organisé avec un vrai état-major, on ne devrait même pas s’adresser directement à lui, mais à son entourage (Directeur de campagne, chargé de communication, etc.) pour l’organisation pratique des déplacements. Mais que voulez-vous quand le prétendant au fauteuil suprême est un "one-man-band" ?

Dans les différentes tournées, nous avons entendu des mauvaises langues du sillage de Dakio dire qu’il prend la politique comme un passe-temps, pour meubler le vide professionnel qui s’est créé dans sa vie depuis qu’il a pris sa retraite à la BCEAO, il y a de cela 12 ans. Quant à ses prestations télévisées, c’était tout simplement catastrophiques, tant dans la forme que dans le fond. Et certains n’ont pas hésité à dire que des candidats comme lui "versent la figure du Burkina par terre".

Emile Paré :L’introuvable chargé de communication

C’est par correspondance n°0102/05/EO/MAO du 17 octobre 2005 que le candidat Emile Paré a été informé de notre affectation comme journaliste focal, afin de suivre son agenda tout au long de la campagne électorale, qui s’est ouverte cinq jours plus tard. Lors de la conférence de presse du candidat Paré le 22 octobre à 10h au siège du MPS/PF pour présenter son programme de gouvernement, il a été signifié aux représentants des organes de presse qu’une personne est chargée au sein de son staff de campagne d’être le répondant des hommes de médias, un chargé de communication en somme.

Malheureusement, l’intéressé n’était pas sur place ce jour-là, et nous n’avons donc pas pu entrer en contact avec lui. Nous n’avons pu le faire que deux jours plus tard, au téléphone. Toutes les fois que nous avons échangé, c’était au téléphone. Pour tout dire, nous ne savons pas à qui ressemble le fameux chargé de communication du candidat Paré, et cela nous a un peu handicapé dans notre travail, parce qu’on n’avait pas l’information juste en temps voulu, pour ne pas dire réel. Nous avons donc, comme dirait l’autre, "fait ce qu’on pouvait".

Le programme des meetings et autres AG du candidat du MPS/PF a été modifié et nous n’avons finalement pu suivre que le meeting tenu à Fada N’Gourma le 29 octobre dernier. Nous avons pris rendez-vous au siège du parti, tôt le matin du 9 novembre, pour embarquer pour les AG de "notre candidat" à Koudougou, Réo, Léo et Sapouy. Grande fut notre surprise quand vers 9h 30, nous nous entendrons dire que le présidentiable Paré est du côté de Solenzo et qu’il va falloir annuler la sortie.

La communication n’a pas bien fonctionné avec le comité de campagne du MPS/PF, mais il faut tirer le chapeau au candidat lui-même, qui s’est montré disponible. Il était au four et au moulin. Ce qui ne facilitait pas toujours les choses. On est d’avis qu’il a tiré son épingle du jeu lors de ses passages à la radio et à la télévision nationales ; toutefois, il aurait pu mieux faire si ses collaborateurs avaient accordé aux "gratte-papiers" des facilités logistiques notamment, pour mieux "vendre" leur champion. Hélas !

Gilbert Bouda : "Patindé" a surpris

La Fasocratie n’est pas la démocratie au Faso, c’est une doctrine qui se hisse au-dessus du pouvoir du peuple, pas plus que le Fasocrate n’est le démocrate du Faso. Quant à la Fonction publique internationale, elle devait avoir pour siège Bobo-Dioulasso si... ! Voilà qui devait réjouir les chômeurs du Faso. En fait c’est une organisation supranationale qui devait réussir là où l’ONU a échoué. Pendant la campagne, le candidat du Parti burkinabè pour la refondation (PBR), Gilbert Bouda, s’est ingénié à expliquer ces nouveaux concepts dont il est lui-même l’auteur.

Après une semaine de léthargie, c’est à partir du 1er novembre que le fasocrate est allé à la conquête de l’électorat dans les 13 chefs-lieux de région. Les meetings programmés n’y ont pas drainé grand monde, du fait certainement des thèses fumeuses et absconses ci-dessus rappelées, mais aussi de la modestie des moyens du candidat. En effet, les tee-shirts, casquettes et autres spécimens tenaient à chaque sortie dans l’arrière-place de la 4x4 à bord de laquelle étaient entassés une demi-dizaine de militants. Qu’à cela ne tienne, le plus jeune candidat a pu rallier quelques régions pour prêcher sa Fasocratie dans la savane et dans le Sahel, si ce n’est dans le désert.

Sur le plan de la communication, la définition même des nouvelles doctrines citées plus haut par leur concepteur était quelque peu laborieuse, si fait qu’il y avait beaucoup de "bruits" autour de son message, dont la réceptivité était moindre au sein des disciples de Descartes. Si dans la presse écrite les prestations du candidat lui ont été bénéfiques, on ne peut pas en dire autant de celle audiovisuelle. En effet, les différents passages à la RTB ont révélé son regard fuyant et sa sérieuse difficulté à s’imposer face à ses interlocuteurs.

Que dire de tout cela, si ce n’est reconnaître des difficultés inhérentes à tout début, surtout pour un illustre inconnu aux grandes ambitions. Mais au regard de son rang (9e/13), Gilbert Bouda, conformément à son surnom "Patindé" (qui veut dire en mooré "celui qu’on n’attendait pas"), a surpris et a eu plus de mérite que certains vieux routiers du microcosme politique qui font beaucoup de bruit pour peu de choses. C’est un homme courageux qui avance dans une kyrielle d’adversités. Avec une bonne dose d’organisation, il peut encore surprendre.

Philippe Ouédraogo : Un peu trop sérieux

La campagne électorale pour la présidentielle du 13 novembre 2005 a mis à nu la pauvreté, au sens propre comme au sens figuré, de bon nombre de partis de l’opposition. Sans la subvention modique, pour ne pas dire symbolique, de l’Etat, certains candidats n’auraient pas pu battre campagne hors de Ouagadougou. Cela a contraint plus ou moins des prétendants au fauteuil présidentiel à régler leur campagne à la mesure des moyens dont ils disposaient. Etait manifestement de ceux-là le candidat du PDS et de la CDS, Philippe Ouédraogo.

Sa stratégie de campagne était bâtie sur des assemblées générales, une rencontre avec les militants, la plupart du temps au siège du parti (PDS) ou dans des salles publiques ; cela avait le désavantage de ne pas toucher un large public. Mais il y avait aussi, pour ratisser large, des meetings (6 étaient inscrits dans le programme de campagne du candidat Philippe Ouédraogo).

Toutes les fois où notre disponibilité nous a permis de suivre notre candidat dans la ronde des provinces, nous avons pu nous apercevoir du respect de son programme et de son calendrier de campagne. On ne saurait donc reprocher à Phil’O de n’être pas allé à la conquête de l’électorat. Nous avons pu également nous rendre compte que le candidat, à l’exception des quelques rares fois où il était soutenu par le président de la CDS, faisait cavalier seul alors qu’il avait le soutien d’environ six partis.

Sur le terrain de la campagne, c’est un Philippe Ouédraogo d’un calme olympien qu’on a vu à l’œuvre ; son calme n’avait-il d’égal que la sagesse avec laquelle il haranguait les foules ? En tout cas, c’est tout à fait à l’image du polytechnicien qu’il est. Sa prestation à la télévision, lors de l’émission "45 minutes avec un candidat" , a montré à notre avis que l’homme avait de la tenue et que son expression était cohérente, sans animosité. Même s’il a semblé un peu trop sérieux, ce qui rendait son discours trop lisse et donc peu réceptif. On n’a pas besoin de s’agiter pour se faire comprendre, mais tout de même...

Me Bénéwendé Sankara : Le sens du suivi et de l’organisation

Le premier constat sur cet homme de loi (il est avocat) est son sens de l’organisation et du suivi. Ainsi, lorsque le journal lui a envoyé une correspondance pour lui signifier qu’un journaliste va le suivre tout au long de la campagne électorale pour couvrir ses meetings, il a répondu par écrit pour en prendre acte et remercier L’Obs. De même, après le scrutin, il a de nouveau écrit pour nous dire merci de ce que nous avons pu faire dans le sens de la médiatisation de son action. C’est assez rare chez les politiciens pour ne pas être souligné. Et on l’aura remarqué, les échanges épistolaires ont toujours accompagné les actes qu’il a posés lors de cette campagne.

En ce qui concerne la campagne elle-même, Me Sankara, tout comme les autres candidats de l’opposition, souffrait d’une faiblesse : le manque de moyens. Cela ne l’a pas empêché d’honorer tous les meetings qu’il a programmés, notamment 7 au niveau national plus d’autres jamborees politiques provinciaux, sans oublier les rencontres avec "les groupes qui comptent", à savoir les commerçants des yaars, les syndicats, les étudiants, etc.

Pour ce qui est du contenu du discours de campagne, le président de l’UNIR/MS est resté fidèle à son langage habituel. Il reprend certains combats menés par son héros de référence, Thomas Sankara. Un discours sankariste basé sur son programme alternatif. Que ce soit à Gaoua, Nassoumbou, Thiou, Dédougou, Fada N’Gourma ou Ouagadougou, Me Sankara a invité le peuple à prendre ses responsabilités en prenant le pouvoir, discours révolutionnaires par excellence. Il n’a hélas pas été entendu.

Quid de ses rapports avec la presse et singulièrement avec L’Observateur au cours de cette campagne ? Il était l’un des rares candidats qu’on pouvait joindre directement pour connaître le programme des déplacements. En outre, ses collaborateurs, notamment son directeur national de campagne, Malick Sawadogo, le député Dera Adama ainsi que son directeur de la communication étaient également disponibles.

Exception faite du meeting de Dédougou, qui a été avancé d’une journée, sans que nous n’en soyons informé à temps, toutes les manifestations du candidat nous étaient communiquées à l’avance, directement au journaliste focal, parfois même par correspondance. Son programme de meetings était du reste en notre possession quelques jours avant le début officiel de la campagne.

Le 25 novembre dernier, il faisait parvenir au journal, comme indiqué plus haut, une lettre de remerciement pour la participation du quotidien à la couverture de sa campagne. S’il y a une conclusion à tirer de cette collaboration durant ces 21 jours, c’est qu’elle fut fructueuse et empreinte d’une bonne ambiance. C’est aussi la preuve qu’on n’a pas besoin d’être dans un Hummer ou dans un hélico pour être organisé. Et les autres candidats de l’opposition auraient pu aussi réussir au moins ce pari de l’organisation et de la rigueur au lieu de nager dans l’impréparation et l’inorganisation comme ce fut souvent le cas.

Nayabtigungu Congo Kaboré : Les raisons d’une descente aux enfers

Au sein des 12, voire 13 candidats en lice pour le fauteuil présidentiel, on notait trois sankaristes dont le fondateur et président du plus ancien parti sankariste (18 ans d’existence), le Mouvement pour la tolérance et le progrès (MTP), Nayabtigungu Congo Kaboré. Diplomate à la retraite depuis plus de 3 ans, le Nayab, comme on l’appelle, à l’instar des douze autres qui ont nourri l’ambition de briguer la magistrature suprême, a été suivi dans ses activités par notre rédaction.

Depuis l’ouverture de la campagne présidentielle le 22 octobre 2005, jusqu’au jour du scrutin et même après, nous n’avons cessé de manifester notre volonté de suivre de près les activités politiques de cet ancien homme fort de la révolution, natif de Doundoulma, une localité située à quelques kilomètres du département de Tanghin-Dassouri, et qui, bientôt, aura la soixantaine.

Mais quelle ne fut notre galère, nous qui avons pour souci majeur de tenir les lecteurs et, partant, les électeurs informés des mouvements et actions de tous les présidentiables : il a fallu remuer ciel et terre comme qui dirait, pour pouvoir approcher ce politicien d’un genre particulier, qui affirme battre campagne contre le régime de Blaise Compaoré depuis 18 ans, et qui, de ce fait, n’avait plus besoin d’aller à la pêche aux voix pendant 21 jours.

Résultat de nos courses : un entretien à domicile autour de sa stratégie de campagne entre autres ainsi qu’un autre, par téléphone, le jour du scrutin, au cours duquel nous avons recueilli ses impressions et premiers constats sur le terrain après l’accomplissement du devoir civique, qui ont tous été publiés dans nos colonnes. Service minimum donc pour le Nayab, qui ne s’est vraiment pas foulé la rate.

S’il est vrai que ce sankariste met l’accent sur la personnalité du candidat ou encore l’individu, il n’en demeure pas moins qu’il n’a pas pu, tout au long de la campagne présidentielle, montrer clairement à qui que ce soit (même pas à nous !) un programme bien établi. Paresse ou flair de l’échec, on ne saurait le dire. Si notre confrère l’hebdomadaire "L’Opinion" , dans sa livraison du 9 au 15 novembre 2005, a penché pour la première hypothèse en s’interrogeant à sa une : "Nayabtigungu Congo Kaboré, le candidat "peinard" ?" et ce, au regard de son comportement sur le terrain, la seconde n’est pas non plus à écarter et pourrait même expliquer la première.

Et pour preuve, l’activité de ce présidentiable n’a pratiquement pas été visible à part ses quelques interventions à la télé ou à la radio, une déclaration réchauffée et les interviews accordés à la presse malgré lui-même. Certes, même si le "porte-à-porte" a semblé pour lui la bonne stratégie d’approche de l’électorat, force est de reconnaître qu’il aurait mieux gagné avec la tenue de meetings ou d’A.G. (comme les autres l’ont fait), et en allant à la rencontre des électeurs qui ne le connaissent pas forcément sur le plan physique.

Ne serait-ce que pour que ces derniers découvrent au moins la mine de celui qui ambitionne les diriger. Qu’à cela ne tienne, si certains habitants de son fief (Tanghin-Dassouri où il semble n’avoir pratiquement pas mené une action lors de la campagne) affirment ne pas le connaître, ce n’est pas ceux des autres localités du Burkina qui diront le contraire. Loin s’en faut, une telle situation n’est pas du genre à créditer un prétendant au fauteuil présidentiel qui, du reste, est parti au combat sans armes, pour ne pas dire sans une base réelle et forte.

Que dire alors d’un tel candidat qui n’a pas travaillé à mobiliser les gens ou à rendre visible son action politique même dans son village natal ou fief ? Si on peut le dire, Nayab n’était pas visiblement animé d’une réelle volonté de briguer la magistrature suprême. Et les quelques conversations que nous avons eues avec lui ont plus ou moins révélé cet état de fait dans la mesure où si on s’en tient à ses dires, on peut affirmer sans ambages qu’il a visiblement le regard tourné sinon même braqué sur les élections municipales de février 2006, comme pour briser cette sorte de malédiction que vit le MTP depuis 18 ans et qui l’empêche de s’octroyer ne serait-ce qu’un conseiller municipal encore moins un député à l’Assemblée nationale.

Réalisme, fuite en avant ou stratégie aux contours indéfinis ? Allez savoir. En attendant que l’histoire nous situe sur les ambitions réelles de ce "présidentiable", cela se dessinait déjà, il est arrivé en dernière position dans ce scrutin avec 0,32% des voix ; se faisant devancer même par un nouveau venu sur la scène politique nationale, Gilbert Bouda, et un apathique, Toubé Clément. C’est donc sans surprise (bon nombre de personnes en avaient même la certitude) que Nayab a effectué progressivement sa descente aux enfers en occupant une place qui n’est pas de nature à redorer son blason politique, lui que certains ont fini même par qualifier de "revenant politique" vu son comportement sur l’échiquier national.

Mais s’il est vraiment quelque chose à déplorer chez lui, c’est son discours ethno-régionaliste. Beaucoup de téléspectateurs et d’auditeurs se demandaient d’ailleurs comment le Conseil supérieur de la communication pouvait laisser passer pareilles dérives de la part d’un candidat qui donnait l’impression qu’il ne voulait pas devenir président de tous les Burkinabè, mais chef suprême des Moosé.

Laurent Bado : Un râleur professionnel

Le candidat du Parti pour la renaissance nationale (PAREN) à la présidentielle 2005 est de ceux qui, en début de campagne, semblaient bien organisés. En effet, des photos de Laurent Bado sur cartes et CD ; des documents tels que le manifeste du parti et une correspondance du directeur national de campagne, Omar Guiguemdé, demandant à la presse de se référer au secrétaire chargé des questions politiques, Sango Abdoul Karim, pour toute information sur le candidat nous avaient été acheminés bien avant les joutes.

Lors de la campagne, c’est un Bado convalescent (il se remettait à peine d’une maladie) qui ira à la conquête des voix. Même si on constatait la modicité des moyens du candidat (affiches, foulards seulement), celui-ci a mis l’accent sur les idées avec des termes et expressions accrocheurs du genre : "Si vous ne me votez pas, l’enfer sera sous vos pieds d’ici 7 à 10 ans". "Ne me votez pas..." "vos bulletins, mettez-les dans vos c...".

Cette stratégie du candidat peut avoir desservi Laurent Bado en créant un trouble dans les têtes de bon nombre de compatriotes qui ne comprennent pas forcément le discours imagé ou provocateur de l’homme de Zoula et la théâtralisation de ses interventions.

Mais ce dernier estimera à maintes reprises que la presse déforme ses propos et ne met pas certaines choses dans leur contexte. La rengaine quoi . Et c’est à un Laurent Bado furieux au téléphone le 12 novembre 2005 à 15h, que le reporter qui lui a été affecté et qui a voulu connaître le lieu et l’heure de son vote, a eu affaire :"Je ne veux pas de vous. Merci et merci encore". Sur insistance du journaliste, Laurent Bado assène : "Ecoutez, n’insistez pas, vous passez tout le temps à déformer mes propos. Allez rejoindre Blaise et son CDP...". Ambiance... Mais c’est finalement dans une bonne ambiance que les deux interlocuteurs se sont quittés après bien sûr le "petit orage" verbal.

Au cours de la campagne, et contrairement à certains candidats, Laurent Bado s’est plutôt concentré sur son programme, sur ses idées et il le fera d’ailleurs remarquer à la presse à Pô lors de son premier meeting. Et de meeting en meeting, la foule sortait de plus en plus pour écouter ses "prêches" et "sermons". Et malgré l’affaire des 30 millions de FCFA, le départ de trois de ses députés, la faiblesse de ses moyens, la jeunesse de son parti, etc., Laurent Bado a terrassé Blaise Compaoré chez lui à Zoula et est arrivé troisième après Blaise Compaoré et Me Bénéwendé S. Sankara.

Le staff de campagne n’a pas trop bouleversé le programme de meeting du candidat, ce qui nous a permis de localiser facilement le présidentiable. Le bon score de Laurent Bado est également à mettre à l’actif de la bonne organisation de ses hommes.

Ali Lankoandé : Encore un effort dans la programmation

C’est très timidement que le Parti pour la démocratie et le progrès/Parti socialiste (PDP/PS) a débuté sa campagne présidentielle avec son leader, Ali Lankoandé, comme porte-drapeau. Comme un moteur diesel qui doit bien chauffer pour mieux donner, le PDP/PS, depuis sa sortie du 23 octobre à Bobo, n’a plus fait signe de vie dans les provinces jusqu’au 1er novembre 2005 quand le successeur de Ky-Zerbo a repris son bâton de pèlerin pour sillonner sans discontinuer le Faso de part en part en commençant par Pouytenga, Boulsa, Pièla, Bogandé et Bilanga. Un rythme infernal que s’est imposé le doyen Ali Lankoandé, âgé de 75 ans.

C’est ainsi que des localités comme Dori, Gorom-Gorom, Arbinda, Djibo, Ouahigouya, Yako, Boussé, Boussouma, Fada, Pama ont, entre autres, été passées au peigne fin. Le plus surprenant dans tout ça, c’est que le doyen, comme il l’a perfidement fait remarquer entre-temps, a rallié toutes ces villes non pas en hélicoptère, mais bien en voiture, plus précisément dans sa Runner à essence. Les convois du candidat du PDP/PS étaient généralement constitués de trois véhicules. Des convois qui ont péché souvent par le retard au démarrage.

En effet, les heures de départ n’étaient qu’indicatives tout comme celles de la tenue des meetings et autres AG. C’est un aspect que le parti gagnerait à corriger dans la perspective des élections futures. Un autre point à améliorer, c’est la programmation des sorties. Pour cette campagne, le PDP/PS n’a pas réussi à respecter le calendrier qu’il s’était lui-même fixé. Par exemple, la sortie sur l’axe Pouytenga-Boulsa-Bilanga a été repoussée de 48 heures tandis que celle de Fada a été avancée de 96 heures, ce qui a provoqué un chamboulement de la programmation dans un fief comme Boussouma où le candidat a rencontré ses militants le 11 au lieu du 8 novembre.

Il faut aussi souligner le fait que certaines localités ont été visitées alors qu’elles ne figuraient pas sur le programme de départ communiqué par la section communication de ladji. C’est le cas par exemple de Tougan et de Thion. C’est sans doute dû à la demande des militants et sympathisants du coin. A l’opposé, des villes comme Dano et Diébougou, pourtant programmées, n’ont pas vu le candidat de l’espoir. Elles se sont contentées de son directeur de campagne, le député François O. Ouédraogo.

Côté prestation, il faut dire qu’Ali a fait bonne figure. Il n’y a rien à redire. Que ce soit à la télé ou à la radio, il a toujours su tirer son épingle du jeu. Calme, posé, le verbe mesuré, il ne s’est jamais laissé aller à des attaques personnelles contre ses adversaires. Par contre, il a critiqué comme il se devait la gestion du pouvoir par le régime en place. Un bon point que le parti doit capitaliser pour les batailles futures même si le vieux Ali manquait quelquefois de punch.

Norbert Michel Tiendrébéogo : La moisson n’était pas à la hauteur du discours

Par ordre d’inscription à la présidentielle au Conseil constitutionnel, Norbert Michel Tiendrébéogo était deuxième après le candidat sortant, Blaise Compaoré. Son effigie était à la même place sur le bulletin qui a été conçu suivant l’ordre de dépôt des dossiers de candidature. Mais si l’enfant de St-Léon, au secteur n°1 de Ouagadougou, s’est précipité pour poser sa candidature à la magistrature suprême, il n’est pas allé avec la même vitesse à la conquête des voix.

La preuve, trois jours avant le début de la campagne électorale, le candidat de la coalition Front des forces sociales (FFS)/Convergence de l’espoir n’avait pas encore un programme établi à cet effet. Notre organe de presse, en rappel, avait affecté un journaliste à chaque candidat pour la circonstance. Un deadline, à savoir le 21 novembre à midi, avait été fixé à chacun pour présenter le programme de campagne de son candidat afin que la rédaction puisse s’organiser en conséquence.

A l’heure dite, le point focal de Norbert Tiendrébéogo n’a pu présenter l’agenda électoral de ce dernier. C’est finalement en début de soirée la veille de l’ouverture des hostilités, que celui-ci est entré en possession de son programme. Des assemblées générales de proximité du 22 au 28 octobre dans le Kadiogo, voilà ce qui figurait en première ligne du programme. Cette partie ne contenant aucune précision (heures et lieux des rencontres non indiqués), le journaliste était obligé de l’appeler chaque fois pour avoir sa position.

En parcourant le reste du contenu du programme d’activités, on se rend compte qu’il n’a pas pu couvrir, comme beaucoup de ses pairs, toutes les 13 régions du Burkina. Le grand Sahel par exemple, sauf erreur de notre part, n’a pas vu passer le candidat de la coalition FFS/Convergence de l’espoir.

M. Tiendrébéogo, tout comme son acolyte, Jean Hubert Bazié, a toutefois fait une prestation acceptable lors de ses passages à la Télévision nationale du Burkina. La plus appréciée a été « Les 45 mn du candidat », nombre de téléspectateurs ont trouvé qu’il s’y est bien défendu face aux questions pointues des journalistes.

Norbert Michel Tiendrébéogo a donc, comme beaucoup d’autres de l’opposition qui ont pris part à cette compétition, battu une campagne quelque peu approximative. Résultat, la moisson n’a pas été fructueuse pour lui, car il s’est retrouvé en 7e position. Il n’a pu convaincre que 33 353 électeurs, ce qui lui a valu 1,61% des suffrages exprimés. Toutefois, Norbert Tiendrébéogo a été apprécié pour son "fair-play" à l’issue de la proclamation des résultats par la CENI, lors de laquelle il était d’ailleurs le seul des treize candidats à être présent. C’est ce qu’on appelle de l’élégance.

Blaise Compaoré : Une campagne au pas de course

En parcourant le programme des meetings du candidat Blaise Compaoré, remis par la Direction de campagne, l’on se rendait compte qu’il y avait un défi à relever pour l’enfant terrible de Ziniaré : parcourir les 45 provinces du Burkina. Dans chaque chef-lieu de province, devait se tenir un meeting.

Le lancement du périple a eu lieu à Bobo-Dioulasso le samedi 22 octobre 2005. La boucle a été bouclée avec le meeting de clôture au stade du 4-Août, le 11 novembre, soit 2 jours avant l’élection présidentielle. Quatre meetings ont été couverts par le journaliste point focal du candidat : ceux de Sapouy, Ziniaré, Boromo, Koudougou. Pour les deux premières rencontres, l’équipe de rédaction s’y est déplacée avec la fourgonnette de service. Quant aux deux autres, le journaliste s’y est rendu grâce aux bons soins de la Direction de campagne du candidat.

Les meetings se faisaient au pas de course et le scénario était pratiquement le même : arrivée du candidat à bord d’une Hummer, tour pour le bain de foule, succession des discours, dernier bain de foule, départ pour le meeting suivant et envolée de la montgolfière à partir de laquelle on jettait des bulletins à l’effigie du candidat.

Si d’autres organes de presse ont décidé de suivre le candidat par tous les moyens, L’Observateur a choisi certains lieux de meeting politiquement stratégiques, notamment par souci d’équilibre quant à la couverture de la campagne des autres candidats. Malheureusement, le constat est qu’après chaque meeting, il n’y avait pas le traditionnel entretien avec Blaise Compaoré, contrairement aux autres candidats qui ne se sont pas fait prier pour donner leurs impressions. Si fait qu’après un meeting, on avait l’impression que c’était le sauve-qui-peut.

En outre, après quelques meetings avec le candidat, on avait une impression de déjà-vu et le journaliste ne trouvait pas grand-chose à se mettre « sous la plume », à moins de verser dans les répétitions. Par contre, l’espace alloué par le Conseil constitutionnel a été bien occupé par le candidat, qui avait les ressources humaines pour cela. Par ailleurs, le programme de campagne du candidat était disponible dès le début de ses déplacements à travers les provinces. Ce plan de parcours sera respecté, évitant du même coup aux hommes de médias les rendez-vous manqués.

Il est vrai qu’avec un hélico il pouvait aller là où il voulait et l’impressionnante suite qu’il traînait dans son sillage lui facilitait bien la tâche. Quand on ajoute à cela les moyens financiers colossaux dont ils disposaient... il a sans doute eu moins de mérite que les autres.

Ram Ouédraogo : Moins performant qu’en 1998

Il faut tout de suite dire que le candidat Ram Ouédraogo fut le tout premier à nous faire parvenir aussi bien son programme de campagne que son projet de société. C’est en principe le lundi 24 octobre 2005 que nous devions embarquer avec le candidat pour Boromo, Founza et Diébougou. La veille du départ, M. Hermann Yabré (chargé de communication du candidat) nous informait que pour cause de décès du père du secrétaire général du parti, le voyage était ajourné.

C’était le début d’une série de rendez-vous manqués, et des étapes de Gaoua, Batié et Houndé, nous ne fûmes pas. Il a fallu attendre le 28 octobre 2005 pour croiser le candidat Ram Ouédraogo à l’arrondissement de Sig-Noghin lorsqu’il allait à la rencontre de ses militants. Au bout du compte, nous avons travaillé très peu avec le gentleman Ram, qu’on sait très policé, courtois et ayant de la suite dans les idées.

Le 13 novembre 2005, Ram Ouédraogo, comme tout bon citoyen, accomplissait son devoir en votant à la Patte d’oie. Seulement 2,04% des électeurs ont porté leur choix sur sa personne contrairement aux plus de 6% des votants lors de la présidentielle de 1998, où il était arrivé deuxième avant Frédéric Guirma et après Blaise Compaoré.

Mais on retient que le candidat Ram Ouédraogo sera allé à la rencontre de ses électeurs dans les contrées les plus reculées de notre pays. Et que celui qui se voulait un président de "paix et de non-violence pour un Burkina nouveau et prospère" devra encore attendre pour mettre en pratique l’écologie politique, dont il est le pionnier au Burkina.

Adama Ouédraogo dit Damiss

Kader Traoré

D. Evariste Ouédraogo

Abdou Karim Sawadogo

Agnan Kayorgo

Zowenmanogo Dieudonné Zoungrana

Kader Patrick Karantao

Cyr Payim Ouédraogo

Pierre Tapsoba

Issa K. Barry

Hamidou Ouédraogo

San Evariste Barro

Observateur Paalga

Burkina : Les magistrats du parquet désormais nommés par (...)
Burkina/Conduite de la transition : Les députés de l’ALT (...)
Burkina : L’ALT examinera une proposition de loi pour (...)
Conseil des ministres : La SONABHY, le BUMIGEB et le (...)
Affaire “Me Guy Hervé Kam” : L’Etat à l’épreuve de sa (...)
Burkina/Situation nationale : Les propositions de Me (...)
Burkina : Me Ambroise Farama dément les accusations (...)
Situation sécuritaire au Centre-Sud : La gouverneure (...)
Burkina : Le leader politique, Amadou Tall, appelle à (...)
Burkina/Projet de loi portant statut de la magistrature (...)
Burkina Faso : « Il n’y aura pas d’élections tant que le (...)
Gestion du fret : Le CBC reçoit les orientations du Chef (...)
Burkina : Quand les pouvoirs peinent à assurer la (...)
Burkina : Colonel Boukaré Zoungrana désormais ambassadeur (...)
Burkina Faso/MPSR2 : L’échéance de la Transition nécessite (...)
Burkina : 500 millions fcfa pour "une communication de (...)
Burkina : Le Parti Panafricain pour le Salut exhorte (...)
Investiture du Président Bassirou Faye : Voici les (...)
Investiture de Bassirou Diomaye Faye : Le Capitaine (...)
Sénégal : Le CDP félicite le nouveau Président Bassirou (...)
Mobilisation générale et de la mise en garde : Le (...)

Pages : 0 | 21 | 42 | 63 | 84 | 105 | 126 | 147 | 168 | ... | 12495


LeFaso.net
LeFaso.net © 2003-2023 LeFaso.net ne saurait être tenu responsable des contenus "articles" provenant des sites externes partenaires.
Droits de reproduction et de diffusion réservés