ActualitésDOSSIERS :: « Je suis un des acteurs du coup d’Etat du 4 août 1983 », clame le général (...)

Quel rôle le général Gilbert Diendéré a-t-il joué dans le coup d’Etat du 4 août 1983, jour où le capitaine Thomas Sankara est arrivé au pouvoir ? Pour sa dernière prise de parole au procès sur l’assassinat du président Sankara et de douze de ses compagnons, celui qu’on considérait comme le 5e homme de la révolution est revenu sur cet épisode de l’histoire du Burkina Faso, ex-Haute Volta.

Le 17 mai 1983, Thomas Sankara, alors Premier ministre, est mis aux arrêts. Dans le très contreversé livre « Ma part de vérité », le commandant Jean Baptiste Ouédraogo dément avoir ordonné cette arrestation même s’il trouvait que le charismatique capitaine parlait « trop ».

« Son arrestation a été préparée et concoctée en dehors de moi. J’ai été totalement tenu à l’écart parce que je n’étais pas pour son arrestation. J’ai reconnu qu’il y avait effectivement des problèmes au sein du mouvement. J’ai alors estimé qu’il fallait le recentrer politiquement au cours d’une assemblée générale extraordinaire. (…) Mais le groupe de Yorian Somé avait horreur du communisme. C’est donc eux qui ont préparé le coup du 17 mai avec Jean-Claude Kamboulé et le commandant de la Gendarmerie de l’époque, le Colonel Ouattara. »

Placé en résidence surveillée, Thomas Sankara a été exfiltré discrètement pour être envoyé à Pô par des éléments du centre national d’entraînement commando (CNEC), selon le général Gilbert Diendéré (lieutenant au moment des faits, NDLR). Ce dernier a confié au tribunal militaire avoir participé à cette exfiltration, mais préfère entretenir le mystère sur le mode opératoire utilisé à l’époque.

A Pô, il a été décidé que ce serait Thomas Sankara le nouveau président après le renversement du régime du comité de salut du peuple (CSP). Boukari Lingani, lui, prendrait les rênes de l’armée. « Blaise Compaoré, lui, a décidé de rester et de garder la maison », a indiqué le général Diendéré, en faisant allusion au CNEC.

Pourtant, au cours du procès, l’ancien aide de camp de Thomas Sankara, Moussa Diallo, a raconté que Vincent Sigué lui avait fait des confidences sur un échange qu’il a eu avec Blaise Compaoré à Pô, quelques semaines avant le coup d’État. « Une fois que nous serons au pouvoir, il ne faut pas que Thomas soit président. Il est déjà fiché communiste, pro-Kadhafi… Ce n’est pas bon pour nous et pour la réussite de la révolution. Il faut que ce soit moi le président. Thomas en restera un leader charismatique, mais pas au premier plan ». Ce seraient là les mots de Blaise Compaoré à Vincent Sigué. Mais Gilbert Diendéré dit n’avoir pas eu vent de cet épisode.

Le 4 août en début d’après midi, Jean Baptiste Ouédraogo rencontre le colonel Tamini, le chef d’état-major des armées et proche de Thomas Sankara qui lui demande d’intervenir en médiateur pour apaiser les tensions au regard des informations peu rassurantes venant de Pô.

« Il (Marcel Tamini) a proposé qu’une rencontre soit organisée entre Thomas et moi au siège du chef d’Etat-Major. J’ai accepté le principe, mais j’ai souhaité que ce soit chez moi. C’est ainsi que nous nous sommes retrouvés vers 19h à mon domicile. Il y avait Thomas, Henri Zongo, Kassoum Ouédraogo, Kouamé Lougué, Marcel Tamini et moi. C’est Tamini qui a situé l’objet de la rencontre. La parole a été donnée à Thomas. Et c’est là qu’il m’a dit que le 17 mai, ce que j’ai fait n’était pas bien. Il a dit que j’aurais dû le soutenir plus, même si moi aussi j’étais mis en minorité. Mais il a dit qu’il demeurait patriote et qu’il était favorable à ce qu’une solution politique soit trouvée à la sortie de crise. (…) J’ai dit que s’il y avait un problème politique, il fallait qu’on y trouve une solution. S’il est militaire aussi, il en fallait de même. Et j’ai ajouté que j’étais prêt à accepter n’importe quelle solution, pourvu qu’on ne s’affronte pas, qu’on ne s’entretue pas. Même s’il fallait que je me démette afin qu’on puisse mettre en place un gouvernement d’union nationale, présidé par celui que l’armée aura choisi. C’est là que Thomas a dit que si c’était ainsi, on pouvait s’entendre », peut-on lire dans « Ma part de vérité ».

Dans la soirée, alors que le convoi s’ébranle sur Ouagadougou, les hommes du CNEC rencontrent à une cinquantaine de kilomètres de Ouagadougou un homme en mobylette qui se présente comme un messager de Thomas Sankara. « Sankara a dit à son messager de nous demander de retourner à Pô, car il avait trouvé un terrain d’entente avec le président Jean Baptiste Ouédraogo. Nous avons dit au messager de dire à Sankara que nous ne pouvons plus faire demi-tour, car si on rebrousse chemin, ce serait mieux que l’on continue au Ghana sinon on serait attaqué. L’envoyé n’a pas eu le temps d’aller rendre compte. Après avoir entendu les coups de feu, je crois que Thomas Sankara a compris que nous étions là », se souvient le général Diendéré.

Une fois à Ouagadougou, les éléments du CNEC ont occupé les différentes positions stratégiques. « C’est moi qui ai occupé la radio nationale. Et quand Sankara est arrivé pour son discours, j’ai pris le micro et j’ai dit ‘’Peuple de Haute-Volta, le capitaine Thomas Sankara te parle’’. Il m’a dit de répéter et je l’ai fait. Juste pour pour vous dire que je suis un des acteurs du coup d’Etat du 4 août 1983 », a conclu Gilbert Diendéré.

HFB
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