Actualités :: En attendant le nouveau gouvernement : Les propositions pertinentes de Mme (...)
Juliette Bonkoungou

Exit l’élection présidentielle. En l’absence de tout recours de la part des candidats perdants, on s’attend à ce que le Conseil Constitutionnel valide d’ici le 28 courant au plus tard et à quelques corrections de chiffres près, la victoire du président Blaise Compaoré. Les Burkinabè auront alors les yeux rivés sur sa première décision importante, la formation du nouveau gouvernement.

En attendant, les perspectives politiques font déjà l’objet de réflexions nourries. Celles de madame Juliette Bonkoungou, ambassadeur du Burkina Faso au Canada, publiées par la presse au lendemain du scrutin présidentiel mettent en lumière des propositions originales pour un meilleur enracinement du processus démocratique.

Pour qui connaît Mme Bonkoungou, son péché mignon, c’est d’être prolixe. A l’oral mais surtout à l’écrit, elle fait montre d’une verve soutenue dans une rigueur de pensée qui n’étonne pas pour un magistrat qui rêve de la robe d’avocat. Le risque d’une si grande exubérance du verbe c’est de mettre le lecteur à rude épreuve pour aller jusqu’au bout de sa pensée. Le risque est d’autant plus grand que le lecteur est habitué à ce genre de logorrhée dans la presse où déclarations, point de vue, droit de réponse, démentis et autres, peuplent les colonnes des journaux chaque jour.

On en arrive à ne plus accorder l’importance à certains écrits qui cependant tranchent par leur pertinence et la hauteur de point de vue de leurs auteurs. Sont de ceux-là l’ambassadeur Juliette Bonkoungou qui ne prend pas sa plume pour ne rien dire. Son dernier écrit le prouve amplement.

Idées forces d’une réflexion prospective

Mme Bonkoungou a pris le risque de s’exposer aux critiques d’une opposition encore sous le choc de sa cuisante défaite mais aussi celle provenant de certains milieux du pouvoir qui ne verront pas forcément d’un bon œil des idées à l’encontre d’une démocratie très centralisée dans le CDP. C’est connu, le gigantisme du parti majoritaire a favorisé des courants tendanciels. Ils ne s’expriment pas en antagonisme ouvert mais ne sont pas absents dans les débats sur les orientations majeures du parti.

Dans le cas d’espèce, à peine sorti de la présidentielle la perspective d’un changement de gouvernement et les élections municipales agitent l’état-major du CDP. La convocation d’une session extraordinaire du bureau politique, outre le bilan sur l’élection présidentielle ne devrait pas passer sous silence la stratégie à mettre en place pour les élections communales. La presse s’en est fait l’écho avant même la tenue de ces assises.

C’est du reste à ce propos que Mme Bonkoungou a comme qui dirait "mis le pied dans le plat" avec des propositions majeures dans les perspectives politiques du Burkina.

Primo, elle appelle à une relance du dialogue politique à la faveur du climat de sérénité qui a entouré toute la campagne pour la présidentielle. Ce dialogue politique peut induire un partage du pouvoir au niveau de l’exécutif. Sans le dire ouvertement, elle laisse sous-entendre que c’est l’une des conditions pour une paix sociale durable. Dans la perspective de ce dialogue politique elle réintroduit le débat sur le statut de chef de file de l’opposition. Pour elle, "il apparaît très important dans ce domaine de compléter le statut de chef de file de l’opposition en rendant effective, en sus de sa prise en compte dans les institutions, sa consultation obligatoire sur les grandes questions d’intérêt national".

Secondo, toujours dans les perspectives politiques, elle propose de favoriser une synergie d’alternance et de renouvellement du personnel politique. Comment y parvenir ? En créant les conditions d’un regroupement des partis politiques et en brisant le monopole des partis sur le processus de candidature aux mandats d’élus locaux.

Pour ce faire, elle milite pour des candidatures indépendantes d’où une nécessaire réforme du mode de scrutin pour les municipalités et les législatives. Pour Mme Bonkoungou, "les élections locales obéissent davantage à des objectifs de développement local qu’à des stratégies de positionnement politique". L’argument est juste si l’on veut davantage de conditions pour plus de participation et donc plus d’inclusion de citoyens dans la mise en œuvre du développement local.

Tertio, la plus sensible des propositions de Mme Bonkoungou c’est le report des élections municipales pour les coupler avec les législatives. Quand on sait que celles-ci ont déjà été repoussées de 3 mois environ, cette idée fera des gorges chaudes. Pourtant selon la logique argumentaire de Mme Bonkoungou, ce report est "un mal" nécessaire pour permettre la révision de la loi électorale et pourquoi pas, corriger les défauts du fichier électoral. On retiendra également au nombre des propositions audacieuses, la proposition du scrutin majoritaire à un tour pour les élections législatives. L’avantage d’un tel mode de scrutin serait de mettre fin à l’éparpillement des partis sur l’échiquier politique national pour permettre a contrario, l’émergence de grandes tendances ou famille politico-idéologique.

Quid de l’économie et du social ?

Pour être complète, Mme l’ambassadeur n’est pas restée muette sur les perspectives de développement socio-économique du Burkina. S’inspirant certainement du programme du président réélu, le progrès continu pour une société d’espérance, sa réflexion met l’accent sur la lutte contre la pauvreté. Pour Mme Bonkoungou, les performances macro-économiques du Burkina ces 15 dernières années n’ont pas encore eu leur effet sur le panier de la ménagère.

Elle suggère donc au gouvernement "l’accélération de la croissance économique ainsi qu’une meilleure redistribution des fruits de la croissance". Le Burkina doit avoir à l’esprit les Objectifs du Millénaire pour le développement. Comment ? En mettant un accent particulier sur l’éducation, la santé, l’emploi, bref, tous les secteurs sociaux qui souffrent encore si terriblement d’un manque de politique à la fois volontariste et réaliste.

C’est à ce prix que le Burkina peut espérer un développement intégral qui place le citoyen, sa participation et son épanouissement au cœur de tout le processus.

La réflexion prospective de Mme Bonkoungou trouvera-t-elle un écho favorable auprès des décideurs ?

En attendant, elle a le mérite de relancer le débat politique sur des questions sensibles qu’il faut avoir le courage de poser et y répondre tôt ou tard.

Djibril TOURE

L’Hebdo

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