La liste des témoins des évènements du 15 octobre 1987 s’égrene devant le tribunal militaire avec le passage, ce jeudi 18 novembre 2021, après Pr Basile Guissou, de Domba Jean-Marc Palm, actuel président du Haut Conseil du dialogue social, membre du GCB (Groupe communiste burkinabè) à l’époque des faits.
Pour sa filiation avec un des accusés, Jean-Pierre Palm, son petit-frère, le témoin n’a pas été soumis aux dispositions de l’article 314 du code de procédure pénale, c’est-à-dire la prestation de serment. Domba Jean-Marc Palm est directement passé à sa déposition. Une partie qui va durer moins de cinq minutes.
En effet, dit-il, cette soirée de 15 octobre 87 l’a trouvé à Bobo-Dioulasso. Il enseignait dans la capitale économique (sise à 389 km à l’ouest de la capitale politique, Ouagadougou). L’enseignant-chercheur à la retraite dit qu’il dormait, lorsqu’un de ses collègues, un certain Somé, est venu le réveiller pour dire que ça chauffait à Ouagadougou. Il se lève pour se rendre chez un ami, du nom d’Ahmed Yago. Là, ils vont écouter la radio pour s’informer...
Cet exposé du témoin est suivi d’une série de questions à lui adressées par le président du tribunal. De ses réponses, on retient que Domba Jean-Marc Palm et Thomas Sankara sont "plus ou moins" promotionnaires du Lycée Ouezzin Coulibaly (Bobo-Dioulasso). "Mais il est plus âgé que moi d’une année", précise M. Palm.
Ce dernier était membre du CNR (Conseil national de la Révolution, organe de direction de la Révolution démocratique et populaire) à travers son groupe politique, GCB. Il précise au passage ici que, contrairement à ce que laisse croire une certaine opinion, il n’en était pas le président. L’organisation, le GCB, était dirigée par un directoire de cinq ou six personnes. C’est ainsi qu’il se retrouvait parfois à diriger les instances, si ce n’est Zampaligré ou Issa Dominique Konaté.
Lorsque le président du tribunal lui demande de raconter un peu le fonctionnement du CNR, surtout en ses difficultés, Domba Jean-Marc Palm fait d’abord savoir qu’ils (lui et son groupe) ne l’ont rejoint que quasiment en début 1986.
Les difficultés qu’il a ensuite soulevées se résument aux méthodes de travail de Thomas Sankara (qu’il n’appréciait pas) et la tentative de ce dernier de fédérer tous les groupes en un parti unique. "Le GCB n’était pas d’accord. Nous n’étions pas les seuls à ne pas être d’accord, mais je parle de mon groupe", déclare le témoin.
"Si ce n’est un secret, peut-on savoir pourquoi vous n’étiez pas d’accord ?", creuse le président du tribunal.
"Nous craignions que les organisations ne soient fagocitées", justifie M. Palm. Il précise, à la relance du juge, que l’idée de fédérer les groupes est née vers fin 1986.
Selon Domba Jean-Marc Palm, le débat sur la fédération ne s’est plus poursuivi sous le CNR. Il reviendra après, quand Blaise Compaoré a voulu fonder l’ODP/MT (Organisation pour la démocratie populaire/Mouvement du travail, créée en 1989, ndlr).
La démarche posait problème et le groupe a également refusé, dit-il. Cependant, précise-t-il que le GCB a continué avec le Front populaire (remplaçant de la révolution, ndlr).
Dans sa réponse aux questions, M. Domba a fait une parenthèse pour relever... : "Contrairement à ce que des gens disent, au CNR, il y avait des discussions. Thomas Sankara acceptait la discussion. Ça, il faut le reconnaître. Après, il faisait la synthèse".
Me Anta Guissé des parties civiles a voulu savoir par exemple, si le témoin a cherché à comprendre auprès de Blaise Compaoré, ce qui s’était passé le 15 octobre 1987.
" Excusez-moi, Me, vous me voyez poser la question à Blaise Compaoré ? Je ne suis pas fou hein !", lâche celui-là qui a été nommé ministre des relations exterieures, dès fin octobre 1987.
Il justifie cette posture par le fait que Blaise Compaoré avait le dernier mot en ce moment.
Si vous ne savez pas ce qui s’est passé, alors que vous êtes ministre en charge de la coopération, quelle version officielle des évènements allez-vous donner (pendant les visites à l’extérieur) ?, titille Me Kissé.
Sur cette question, Domba Jean-Marc Palm apprend qu’il s’agissait pour lui d’expliquer que le 15 octobre est une situation qui a eu un dénouement forcé (une crise mal gérée). Il ajoute que toutes les affaires relatives à la vie nationale n’étaient pas gérées par son département ; la présidence ayant, parallèlement, ses missions. "A ma toute première mission, en mi-décembre 87, en France, il y avait Gabriel Tamini (de la présidence) avec moi. Je le considérais comme un camarade qu’on m’avait collé", décrit-il.
Domba Jean-Marc Palm a, en outre, confié que les déviations de la révolution dont il était question, n’ont jamais été débattues au sein du CNR. Tout comme l’orientation générale du pays.
O.L.
Lefaso.net
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