Actualités :: Justice : Quand un juge réclame justice, à qui doit-il s’adresser ou à qui (...)

Je viens de lire dans la presse une déclaration du bien-aimé syndicat des juges, le SAMAB, qui me laisse perplexe, vraiment très perplexe. Leur déclaration s’articule sur 3 points :
1-Justice pour le juge Nébié
2-Dénonciation de l’immixtion du politique dans l’arrestation des anciens dignitaires du régime Compaoré
3-Haro sur le gendarme Issa Paré qui avait dénoncé la libération de délinquants arrêtés et déférés par leurs soins.

Je remarque sur ce point qu’ils ont pris du retard à l’allumage, la SBM et le Procureur s’étant déjà prononcé sur la question. Il ne faut pas charger davantage le « baudet » samo. Cette affaire a eu au moins le mérite de noter le manque de communication du parquet qui n’aurait pas dû attendre cette saillie du gendarme pour communiquer sur certains dossiers. Et qu’on ne travaille pas à faire faire taire, museler ou caporaliser les OPJ, policiers et gendarmes, qui font un travail formidable en communiquant sur les arrestations et les démantèlements de réseaux de malfaiteurs.

Je note que, dans sa déclaration relativement aux deux premiers points, le SAMAB veut une chose et son contraire. En mooré on dit "Ponkma li f ra sis m yé !" (soulève-moi mais ne me touche pas).

Sur le fait que le ou les ministres affirment que les arrestations vont se poursuivre, ce n’est que de bonne guerre. Tout gouvernement communique sur des questions judiciaires et sa volonté d’élucider des affaires, fussent-ils des affaires impliquant des opposants, en l’occurrence l’ex-majorité. En France comme ailleurs, sur des dossiers brulants, quand l’exécutif est questionné, il répond en marquant une fermeté dans la poursuite des faits délictueux ou criminels. Et s’il est de la volonté du gouvernement de travailler à élucider ces affaires, il ne peut que dire que le travail engagé par la justice va se poursuivre, sans que cela ne porte atteinte au principe de présomption d’innocence des personnes interpellées. A chacun son travail, et que les juges s’occupent de bien faire le leur en faisant en sorte que les prévenus bénéficient d’un procès équitable.

Pour l’affaire du juge Nébié, nous sommes tous pour que la lumière soit faite sur cette affaire. Mais on est tenté de se poser la question : qui doit faire la lumière sur cette affaire ? Est-ce les juges, le gouvernement ou qui d’autre ? Sur ce point le SAMAB accuse le gouvernement de NÉGLIGENCE, excusez du peu : « (...) les assassins courent toujours et aucune volonté politique ne semble s’afficher fermement pour booster la recherche de la vérité alors même que les autres dossiers emblématiques de crime ont bénéficié d’actions diverses. [...] l’attitude des pouvoirs publics laisse perplexe sur leur manque de volonté d’élucider ce crime savamment planifié et exécuté de manière inhumaine. » Et c’est là que ça me pose un problème car les mots ont un sens.

Là-dessus j’ai quelques questions pour le SAMAB : Qu’est-ce que la volonté politique vient faire dans un dossier judiciaire quand on tient tant comme le SAMAB à une séparation stricte des pouvoirs et à la non immixtion du politique dans les affaires judiciaires ? Que signifie booster la recherche de la vérité dans la bouche d’un juge et comment un gouvernement devrait-il le faire concrètement sans sortir de son rôle ? Enfin, quel est l’intérêt de la transition à ce que l’affaire Nébié ne soit pas élucidée ?

On ne peut pas dénoncer l’immixtion du politique dans le judiciaire et vouloir que le politique booste un dossier judiciaire. Qu’on me dise d’ailleurs l’acte concret que doit prendre le gouvernement pour faire avancer le dossier Nébié. Dans le dossier Thomas Sankara et ses compagnons, on savait qu’il fallait un ordre de poursuite que le ministre de la défense refusait jusque-là de délivrer. Dans le dossier Norbert Zongo on sait qu’il a fallu un acte pour ré-ouvrir le dossier qui avait été classé sans suite. Que faut-il concrètement dans le cas Nébié et que les magistrats eux-mêmes ne puissent pas faire et qui nécessite l’intervention du politique ? Des moyens ? Et quels moyens : humains, financiers ? Mais il faut le dire clairement si c’est le cas.

Pour ma part, je demeure convaincu que si les magistrats eux-mêmes ont la ferme volonté de faire la lumière sur cette affaire, ils peuvent le faire d’autant plus que le régime Compaoré qui était suspecté n’est plus là (j’ose croire comme d’autres...). Pour avoir entendu le SG du SAMAB, juge Antoine Kaboré sur Oméga FM à plusieurs reprises, je doute qu’il ait applaudi des deux mains les actes politiques pris pour faire avancer les dossiers dits emblématiques. Beaucoup ont dénoncé l’acte du Conseil des ministres du 4 mars 2015 au cours duquel un décret portant autorisation d’exhumation et d’expertises des restes du Président Thomas Isidore Noël SANKARA avait été pris. Et à juste titre, même Me Farama, conseil de la famille s’en était offusqué.

Est-ce cela que le SAMAB range au titre des actes diverses pris dans les dossiers emblématiques ? Le SAMAB souhaite-t-il les mêmes actes dans le cas Nébié ? Je pense qu’il faut faire preuve de cohérence dans les prises de position publique, au risque de paraître des postures politiques qui entacheraient l’honorabilité du juge. On ne peut pas, à la prise de ces décrets, crier à l’immixtion du politique dans le judiciaire et réclamer aujourd’hui que des actes politiques permettent d’avancer le dossier du juge Nébié. Le citoyen lamda peut faire une telle lecture et parler de sélectivité dans l’avancement des dossiers, mais le juge ou son syndicat ne peut naviguer ainsi entre plusieurs postures au gré du vent.

Enfin, le SAMAB est convaincu que le crime a été savamment planifié et exécuté. Là encore, on sent que les ressentiments l’emportent, un peu trop, sur la lucidité qui doit caractériser une organisation de cette trempe. Dire d’un crime qu’il a été savamment planifié et exécuté signifie qu’il existe des indices clairs, interpellant le simple bon sens, et qui pourraient permettre à un juge, de ne pas se douter qu’il s’agit d’un crime crapuleux, peut-être politique, et qui peut être facilement élucidé avec une dose de bonne volonté.

Une simple question : Qu’attendent donc les juges pour rendre justice à leur camarade Nébié ? Au nom de l’indépendance de la justice, je vous supplie de vous assumer !

@Sidpawalemda

Médias en ligne du Burkina : Dr Cyriaque Paré passe le (...)
Gestion du foncier : Digitaliser pour plus de (...)
Burkina/Innovations technologiques : Les pays africains (...)
Burkina/Innovations technologiques : Ouagadougou (...)
Burkina/Médias : « Les femmes journalistes commencent à (...)
Burkina : La direction générale de Savane Médias annonce (...)
Plongée immersive dans l’univers High-Tech : Retour sur (...)
Journalisme en période de guerre : « Rechercher la vérité (...)
Burkina : « La liberté de la presse ne peut pas être (...)
Liberté de la presse : Le Burkina Faso obtient la note (...)
Liberté de la presse en 2024 : Le Burkina Faso perd 28 (...)
Burkina/Régulation des médias : « Nous n’allons pas abuser (...)
Semaine nationale de la culture : Entreprises, boostez (...)
Soirée cinématographique de l’ISTIC : Des étudiants en fin (...)
Fermeture de Savane Médias : Le blues des agents, en (...)
Burkina / Lutte contre la désinformation : Une (...)
Burkina/Médias : « Il y a beaucoup de femmes dans les (...)
Burkina : Le CSC suspend temporairement la diffusion de (...)
Semaine de l’intelligence artificielle et des (...)
Massaka SAS se lance à la conquête du monde
Fermeture du groupe Savane Médias par les impôts : Les (...)

Pages : 0 | 21 | 42 | 63 | 84 | 105 | 126 | 147 | 168 | ... | 5019


LeFaso.net
LeFaso.net © 2003-2023 LeFaso.net ne saurait être tenu responsable des contenus "articles" provenant des sites externes partenaires.
Droits de reproduction et de diffusion réservés