Actualités :: Manifestations de militaires à Ouaga : Prêts express pour personnes (...)

« Je voudrais, en ma qualité de chef d’état-major général des armées, présenter, au nom du commandement et de l’ensemble des personnels des armées, notre compassion et nos excuses les plus sincères et les plus profondes à tous les habitants de la ville de Ouagadougou et aux commerçants en particulier, pour tous les désagréments subis au cours de cette nuit. » C’est en ces termes et sur un ton ferme mais solennel, que le général de division Dominique Djindjéré s’est adressé aux personnes qui ont fait le déplacement à la salle de conférences du Conseil burkinabè des chargeurs (CBC), hier jeudi 24 mars 2011. Sur initiative de la hiérarchie militaire, une rencontre a été organisée avec les commerçants après les évènements de la nuit du mardi 22 au mercredi 23 mars dernier.

Occasion pour les membres du gouvernement, présents, d’informer les personnes vandalisées de la mise en place d’un « processus d’indemnisation et de dédommagement des préjudices subis par les personnes physiques et morales » qui prévoit, entre autres, des prêts express pour permettre une reprise rapide de leurs activités.

« Allo ! Tu es où ? Je suis au CBC à la rencontre du premier ministre avec les commerçants. Tu ferais mieux de venir. » Vêtu d’un maillot de Manchester United, un commerçant, la trentaine, le visage traversé de cicatrices, communique avec un compère, assis sous le climatiseur à gauche de la salle de conférences du Conseil burkinabè des chargeurs (CBC), ce jeudi 24 mars 2011.

Il est l’un des premiers à y avoir pris place avant 10h. Petit à petit, la salle se remplit. Bon nombre de commerçants n’ont pas voulu se faire conter la rencontre initiée par la hiérarchie militaire après la chaude nuit du mardi 22 au mercredi 23. 11h moins, des hauts gradés pénètrent dans la salle et prennent place aux premiers rangs. « Tchié ! Ils sont tous là ! », s’exclame quelqu’un. Le moins que l’on puisse dire est que la crème des officiers est effectivement présente.

Au nombre d’eux : le général Brice Bayala, chef d’état-major adjoint des armées ; le colonel-major Kodjo Lougué, chef d’état-major de l’armée de terre ; le colonel-major Gilbert Djindjéré, chef d’état-major particulier de la Présidence du Faso ; le colonel-major Honoré Nabéré Traoré, commandant du Groupement central des armées ; le colonel Martin Zongo, chef d’état-major de la Gendarmerie ; le colonel-major Abraham Traoré, chef d’état-major de l’Armée de l’air ; le colonel Silas Kéïta, commandant de la Brigade nationale des sapeurs-pompiers. 11h, les officiels prennent place au présidium drapé aux couleurs nationales.

Ce sont : les ministres Jérôme Bougouma de l’Administration territoriale et de la Décentralisation (MATD), Auguste Denise Barry de la Sécurité (MS), le chef d’état-major général des armées (CEMGA), le général Dominique Djindjéré, le gouverneur de la région du Centre, Boureima Bougouma, et le maire Simon Compaoré. Après une introduction du ministre Jérôme Bougouma, c’est au tour du chef d’état-major général des armées de prendre la parole pour présenter les excuses du commandement (lire encadré).

Le MATD explique ensuite le « processus d’indemnisation et de dédommagement des préjudices subis par les personnes physiques et morales », instauré par le gouvernement : « Beaucoup de commerçants ont tout perdu après ces malheureux évènements. Le Premier ministre a donné des instructions pour qu’on fasse l’évaluation des dégâts et des pertes. C’est une évaluation qui doit se faire après constat d’huissier, de gendarmes, etc. Mais cette évaluation, qui va servir à connaître le montant des dégâts, peut prendre du temps.

C’est pourquoi dans l’immédiat, il a donné des instructions pour que les institutions du ministère de la Jeunesse et de l’Emploi, qui s’occupent du secteur informel, à savoir le Fonds d’appui à la promotion de l’emploi (FAPE) et le Fonds d’appui au secteur informel (FASI), s’organisent pour octroyer des prêts rapides à ces opérateurs économiques pour qu’ils puissent reprendre leurs activités en attendant que l’on termine l’examen des dossiers d’indemnisation ». Applaudissements. Pendant qu’il parle, des cris et des coups de sifflets se font entendre dehors. « Militaires, voleurs ! », peut-on entendre depuis la salle. Jérôme Bougouma enjoint alors de faire entrer des représentants des manifestants dans la salle.

A la porte du CBC, la foule en majorité jeune n’en démord pas, brandissant pancartes et branchages. Un petit groupe de « négociateurs » conduit par le président de la Fédération des associations de commerçants de marchés et yaars, Hamidou Compaoré, vient à leur rencontre pour leur demander de désigner 10 représentants qui se joindront à la rencontre. La désignation de ces missi dominici pose problème. Les protestations fusent. Finalement, les 10 délégués sont trouvés.

Retour dans la salle pendant que le ministre Auguste Denise Barry invite les uns et les autres à avoir un comportement citoyen « quelles que soient les circonstances ». L’inénarrable Ambroise Tapsoba, l’animateur de la rencontre, est chargé de faire un résumé en mooré pour les nouveaux arrivants. Micro en mains, Simon Compaoré s’adresse ensuite à l’assistance : « J’ai eu des larmes aux yeux devant ce que j’ai vu hier en faisant le tour. Vos malheurs sont nos malheurs. C’est pourquoi je me réjouis avec vous de l’initiative du gouvernement mais aussi de la hiérarchie militaire.

Apportez la bonne nouvelle à ceux qui n’ont pas pu faire le déplacement aujourd’hui et prions pour ne plus vivre ce genre d’évènements. » Débutent les échanges sur la mise en œuvre du processus. « Un comité d’indemnisation sera rapidement mis en place au sein duquel vous serez représentés », souligne le MATD. « Dans combien de temps exactement ce processus va-t-il se mettre en branle ? Si vous mettez 10 ans pour nous aider, ce sera fatal pour nous ! », s’inquiète quelqu’un. « Rassurez-vous, nous n’allons pas mettre 10 ans.

Aussitôt que nous aurons vos évaluations, le processus va être enclenché. Je sais que vous avez peur que nous soyons venus pour vous flatter et disparaître. Ce n’est pas le cas. Nous allons transmettre toutes vos doléances au Premier ministre, notamment sur la diligence dans le processus et il donnera des instructions nécessaires », répond M. Bougouma. Le temps semble la principale préoccupation des commerçants. Un délai d’une semaine est proposé par certains. Pour les autres, une semaine, c’est trop long.

Les gérants de stations-service réclament la parole. Elle échoit à l’un d’eux, Moussa Bara, qui s’inquiète que leurs dossiers d’indemnisation ne subissent le même sort qu’en 2006. Cette année-là, après des évènements similaires, ils auraient soumis leurs dossiers au gouvernement mais n’auraient eu aucune suite jusque-là. Une peur qui taraude les gérants pour qui l’approvisionnement reste le problème majeur : « Le carburant, il faut le payer cash avant d’être livré. Il nous faut rapidement des fonds pour rouler.

Si d’ici 3 à 4 jours rien n’est fait, les stations ne seront pas approvisionnés et si les stations ne sont pas approvisionnés, vous connaissez les conséquences. » Et le ministre Bougouma de rappeler que le FASI contribuera à satisfaire les besoins urgents des personnes vandalisées. Les doigts se multiplient dans la salle, chacun voulant s’exprimer. La séance est levée à midi moins, par un rendez-vous fixé à 16h au MATD avec une délégation restreinte pour continuer les échanges.

Occasion pour le général de division Dominique Djindjéré d’expliquer à la presse le sens de la démarche du commandement : « C’était le minimum que nous puissions faire en attendant que le gouvernement mette en marche les dispositions préconisées et pour lesquelles nous nous réjouissons pour nos parents commerçants. Nous les assurons de notre ferme volonté de nous employer pour que l’ambiance de paix et de sécurité prévale toujours dans notre pays. »

Mais qu’est-ce qui est fait au niveau du commandement pour qu’une telle descente n’ait plus lieu ? Réponse du chef d’état-major général des armées : « Dans un premier temps, il est difficile de faire la lumière sur la situation mais nous savons que les condamnés sont les acteurs les plus connus et nous sommes donc passés par eux pour faire passer un message en direction de leurs frères d’armes, promotionnaires ou camarades qui ont tenu à manifester.

Nous sommes déterminés à faire tout ce qui est de notre possible pour éviter de telles situations à l’avenir mais ce n’est qu’avec la compréhension, la sensibilisation et surtout l’intégration de meilleures valeurs éthiques par tous les personnels des armées. » Satisfecit chez le président de la Fédération des associations de commerçants de marchés et yaars qui se réjouit aussi bien de la démarche de la hiérarchie militaire que du processus initié par le gouvernement : « Ça va beaucoup nous aider et les gens vont pouvoir recommencer leurs activités. »

Après une après-midi mouvementée avec des échauffourées entre commerçants et militaires (lire page 12), voici « la délégation restreinte » des personnes vandalisées au MATD face au ministre Bougouma accompagné de son homologue de l’Industrie, du Commerce, de la Promotion de l’Initiative privée et de l’Artisanat, Arthur P. Kafando. La diligence dans l’aide et les prêts express sont au centre des débats. « La responsabilité de la puissance publique est engagée et le gouvernement va assumer sa responsabilité.

Il y a des procédures à suivre et le gouvernement veillera à ce que ce soit rapide », tranchera Jérôme Bougouma. Séance tenante, il appelle le ministre de la Jeunesse et de l’Emploi au téléphone (il amplifie le volume) pour fixer une date de rencontre afin de discuter des prêts. Le rendez-vous est pris pour le lundi 28 mars prochain à 10h. Il a aussi appelé à l’apaisement après les échauffourées de l’après-midi : « Le commandement a déjà prévu des dispositions. Il faut que chacun fasse confiance à l’Etat pour trouver les solutions afin de nous faire passer ce cap difficile. »

Hyacinthe Sanou


Les excuses du commandement

Le mardi 22 mars 2011, un verdict de justice à l’encontre de cinq (05) frères d’armes du Groupement central des armées (GCA) et de l’armée de terre (AT) a provoqué la colère des militaires des FAN. Ces derniers trouvant ledit verdict très sévère et injuste, au regard des motifs d’inculpation de leurs camarades, sont descendus dans la ville de Ouagadougou dans le courant de la nuit avec des armes et des munitions. La descente en ville a occasionné des tirs nourris tout au long de la nuit ayant provoqué quelques blessés par balles perdues et de multiples actes de vandalisme et de pillages perpétrés par certaines personnes sur divers commerces appartenant à des privés.

L’intervention du commandement a permis de circonscrire cet incident qu’il déplore et condamne. Je voudrais, en ma qualité de chef d’état-major général des armées, présenter, au nom du commandement et de l’ensemble des personnels des armées, notre compassion et nos excuses les plus sincères et les plus profondes à tous les habitants de la ville de Ouagadougou et aux commerçants en particulier pour tous les désagréments subis au cours de cette nuit.

D’ores et déjà, nous nous réjouissons des dispositions déjà envisagées par le gouvernement. Nous appelons tout un chacun à la compréhension, au calme et à la sérénité. Nous vous assurons que le commandement s’emploiera de son mieux pour une considération de la situation de paix et de sécurité dans notre cher pays. Je vous remercie.

Ouagadougou, le 24 mars 2011

Le Général de Division Dominique Djindjéré,
Commandeur de l’ordre national

L’Observateur Paalga

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