Actualités :: PR ALBERT OUEDRAOGO, PRESIDENT DU TOCSIN : "La question de l’identité se pose (...)
Pr Albert Ouédraogo

Le débat sur la question identitaire qui anime la scène française intéresse de près le sort des immigrés vivant dans ce pays. Le Pr Albert Ouédraogo donne, dans cette interview accordée le 20 novembre 2009, sa position en tant que président du Tocsin et coutumier des questions identitaires et de l’immigration. Pour lui, ce débat est inutile et peut receler des démons qui, de son avis, sont aussi au Burkina.

"Le Pays" : Il y a un débat posé présentement en France et qui porte sur la définition de l’identité française en rapport avec la migration. Quelle est votre position ?

Pr Albert Ouédraogo : Chaque fois qu’une nation, à un moment donné, cesse de regarder vers l’avant et commence à regarder vers le passé, c’est une nation qui a amorcé son déclin. A quelle fin veut-on instrumentaliser cette question de l’identité ? On n’a pas besoin de débat ni de colloque pour savoir qu’être Français c’est avoir la nationalité française et que cela ne tient pas à votre race, à votre taille, à votre religion ni à votre ethnie. Je trouve inutile de réfléchir sur l’identité nationale et je crains qu’il y ait des germes d’exclusion. On est en train de flirter et de surfer avec le démon du nationalisme.

Il y a donc des dangers liés à cette question d’identité ?

Je vois beaucoup de dangers d’exclusion. On va mettre l’accent sur des critères généraux et les particularismes seront des éléments qu’on supportera, que l’on tolérera. Et en cas de crise sociale et économique, ce qu’on tolérait va désormais faire l’objet d’un rejet. Et il y a des Français qui vont se retrouver marginalisés. Cette question va surtout alimenter le discours et les actes de l’extrême droite raciste et fasciste.

Peut-on établir un parallèle avec la Côte d’Ivoire ?

Les mêmes causes provoquent les mêmes effets. A l’époque, je n’ai pas manqué de dire à des collègues ivoiriens de l’Université de Cocody que c’était un danger. Il y a des expériences dont il faut savoir se prémunir. L’ivoirité a été le réceptacle de toutes les frustrations qu’une certaine Côte d’Ivoire a ressenti par rapport à l’ouverture du pays, à cette réalité historique de la Côte d’Ivoire qui est un pays de grande migration. Résultat, beaucoup d’Ivoiriens qui ne remplissaient pas les critères de l’ivoirité se sont retrouvés désormais en danger, parce que suspectés de ne pas être de bons, de vrais Ivoiriens. Ce syndrome explique pourquoi la Côte d’Ivoire est entrée dans une situation de troubles sociopolitiques. Et ce syndrome existe partout dans les pays d’Afrique.

Même au Burkina ?

Même au Burkina. Aucun peuple n’est au dessus de telles dérives. Au Burkina, il y a eu des moments de crises sociales où certaines personnes n’ont pas manqué de faire chasser des fonctionnaires de leur poste, disant qu’ils n’étaient pas ressortissants de telle localité. On met en cause dans ce cas-ci l’unité nationale. Sans oublier qu’il y a une fracture qui se fait jour au Burkina sur laquelle on ne fait pas très attention. Il s’agit de la question de la migration. Il y a une différence de traitement entre les Burkinabè nationaux et ceux nés dans la diaspora. Sur le plan administratif par exemple, c’est la croix et la bannière pour nos compatriotes du Ghana qui veulent se faire reconnaître au Burkina. A la frontière, les policiers se comportent avec les Burkinabè de la diaspora comme s’ils avaient affaire à des non-nationaux.

Concernant la délivrance des cartes d’identité, on leur exige des documents qu’on ne demande pas aux nationaux. Certains ont même décidé de ne plus établir la nouvelle carte d’identité au regard de ce qu’on exige d’eux, se disant sidérés qu’on puisse traiter les Burkinabè de façon inégale. Sur le plan culturel ensuite, on leur colle des étiquettes : "diaspo, kosweogo, paweogo". On ne fait pas toujours attention à certains faits et gestes. Il le faut pourtant pour ne pas un jour chercher un médiateur pour nous-mêmes ! Les questions d’identité sont donc très délicates. C’est une boîte de Pandore avec laquelle on ne doit pas jouer. Parce que si vous ouvrez la boîte, vous n’êtes pas sûrs de maîtriser le monstre qui va en sortir. C’est la raison pour laquelle il faut toujours garder cette boîte fermée.

Propos recueillis Abdou ZOURE

Le Pays

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