“L’idée était originale, pour ne pas géniale, et le produit, on ne peut plus utile : sur son calendrier 2009, la Manufacture des Arts Graphiques (MAG) a en effet placé les photos des grands chefs du Burkina avec leur nom de guerre (voir illustration).
Original parce que, sauf erreur ou omission, on ne se souvient pas avoir déjà vu toutes ces têtes couronnées sur un même support ; utile dans la mesure où ça permet de mettre un visage derrière chaque autorité, ce qui n’est pas toujours évident.
On voit ainsi le Moogh Naaba Baongo côtoyer le Naaba Saaga, roi de Tenkodogo ; le Kupiendiéli du royaume du Gulmu et son parent à plaisanterie, le Naaba Kiiba du Yatenga, M’Pa Yacouba Sanon, le chef de canton de Bobo-Dioulasso au-dessus de son esclave (ou de son maître, c’est selon), l’Emir Nassourou Abdoulaye Dicko du Liptako ; ou encore le Naaba Sonré, Dima de Boussouma ; chacun flanqué de sa garde rapprochée ou, si vous préférez, de ses ministres.
Un précieux document donc que ce calendrier pour les enseignants, les étudiants et les élèves, les journalistes et même le grand public. Hélas, le coup eût été imparable si, tout en haut à gauche de l’affiche, ne figurait en médaillon une photo du président Blaise Compaoré.
Que vient faire donc le chef de l’Etat sur un calendrier dédié, pensons-nous, à la chefferie traditionnelle même si ces concepteurs ne l’ont pas expressément dit ? Est-ce pour allier tradition et modernité et mettre en exergue la nécessaire complémentarité les deux pôles de pouvoir ?
En tout cas, cette présence plutôt incongrue ressemble à un cheveu dans la soupe ou à un mélange des genres et pourrait, à coup sûr, être diversement interprétée.
Dans un pays où on fustige souvent la conception nabale du pouvoir qu’aurait les puissants du moment et où le palais présidentiel de Kosyam est surmonté de gros bonnets de chef traditionnel, cette petite lucarne de Blaise fait un peu tache noire sur une belle œuvre qui s’en serait bien passé.
Vraisemblablement, la MAG, pour reprendre son slogan fétiche, n’a pas fait preuve, ici, de « performance au quotidien ». L’objectif était pourtant louable.
Téegawendé Cédric Yanogo
L’observateur
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