Actualités :: Sauvegarde de sites historiques : Les ruines de Loropéni au patrimoine (...)

Les 21 membres du Comité du patrimoine mondial de l’UNESCO ont décidé, vendredi 26 juin 2009, à Séville en Espagne, d’inscrire les ruines de Loropéni sur la liste du patrimoine mondial de l’humanité. Ils ont reconnu la valeur universelle, l’authenticité et l’originalité de ce bien culturel situé au Sud-Ouest du Burkina, dans la commune rurale de Loropéni. Une première dans l’histoire de notre pays saluée par la communauté des nations.

Et pourtant que d’angoisses, d’anxieté et de nuits sans sommeil pour les principaux acteurs de cette inscription. « Hier, je n’ai pas fermé l’oeil de la nuit. A 4 h du matin, heure de Séville, j’étais debout. Je ne pouvais plus tenir sur place. C’était comme à la veille de mon Bac », rapporte un des membres du comité scientifique du dossier Loropéni, le Pr Gomgnimbou. Il n’est certainement pas le seul. Il indique que d’autres ont aussi veillé et prié.
Vendredi, des membres de la délégation ont visiblement jeûné... Et puis, au fur et à mesure que le temps passe, une certaine frénésie gagne toute la délégation et quand le dossier du Cap-Vert passe de justesse, on s’interroge sur les éventuels couacs qui pourraient subsister malgré tout dans le dossier en dépit du ‘‘ok’’ de l’ICOMOS, l’instance technique du comité chargé de l’éclairer sur la valeur scientifique des sites à inscrire tant et si bien que lorsque la Côte d’Ivoire était en difficulté, les nôtres souffraient le martyr puisque juste après, c’était notre tour.

Et puis, comme pour faire durer le suspense, le comité suspend pour aller dejeûner. Ses membres étaient divisés entre renvoi et différé du dossier d’inscription de Grand-Bassam. On s’encourage mais l’émotion est perceptible... Le gouverneur du Sud-Ouest, Pascal K. Sawadogo et le Pr Jean-Baptiste Kiéthéga qui tentaient de nous faire la conversation finissent par retourner en salle pour attendre la reprise des travaux près d’une heure. Ce qui est fait autour de 15h 30. Le comité revient sur le dossier ivoirien et finit par voter entre renvoi et différé.

Le renvoi signifie aller chercher des informations complémentaires et le différé veut dire reprise du dossier à zéro. Loropéni avait connu un renvoi à sa première tentative en 2006 à Vulnius. On comprend donc l’inquiétude des nôtres car il suffit parfois d’un rien pour qu’un dossier qu’on croyait béton s’effondre. Les Ivoiriens s’en tirent bien avec un renvoi. Les membres africains et leurs alliés ont pesé de tout leur poids afin que cette décision soit.

Pour en revenir au Cap-Vert qui a inscrit également son premier site, la première cité construite par les Européens en Afrique et le premier site de départ des esclaves vers l’Amérique, il y avait une affaire de loi specifique protégeant chaque monument du site à prendre par l’Etat du Cap-Vert qui était demandée en complément par l’UNESCO et qui devait arriver dans un délai de trois mois. La complexité de la requête et les contingences du terrain firent que la réponse du Cap-Vert arriva avec trois jours de retard. Et pour cela, le comité fut divisé et le Cap-Vert qui avait pourtant un bon dossier faillit repartir bredouille. Bref, on peut dire que Cap-Verdiens et Ivoiriens s’en tirent bien. Les Ivoiriens ont trois ans pour revenir avec un dossier renforcé. Le Comité leur ayant conseillé de prendre exemple chez leur voisin, les Burkinabè.

Alors que l’on s’attendait à l’examen du dossier de Loropéni après celui de Bassam, le Comité observe une suspension pour adopter la décision du Cap-Vert. Dans la délégation burkinabè, avec qui nous communiquions par texto puisque la presse est tenue loin de la salle des débats, c’est le silence et c’est à notre tour d’être inquieté.

Puis, les choses rentrent dans l’ordre quelques petites minutes après, des minutes qui parurent des siècles. C’est enfin le tour de Loropéni. Le texto est plus que jamais sollicité. On prie Dieu pour que la liaison ne se coupe pas .. Plusieurs interventions sont annoncées. Les cœurs battent la chamade mais, ... elles visent surtout à nous féliciter. Une seule question est posée. Celle de savoir pourquoi, nous n’avons pas retenu plus de critères pour inscrire le site de Loropéni. Réponse du Pr Kiéthéga : ‘‘ Nous n’avions besoin que d’un critère. Nous nous sommes arrêté à deux...’’

Les félicitations reprennent et la présidente est obligée de les interrrompre pour demander au comité de prendre une décision. Ce qui est fait à l’unanimité à la grande joie de toute la salle. Il était 16h 57, heure locale, 14h 57, heure de Ouagadougou. Tout le processus aura à peine duré une trentaine de minutes. La moyenne de temps mis par dossier étant de deux heures à cette session. Sauf erreur, c’est le seul dossier à être examiné dans ce délai et à l’unanimité... du moins à cette session. L’information est vite envoyée au pays.

La liaison avec la salle est coupée mais la mission était accomplie. L’équipe de presse se déporte alors vers l’entrée de la salle des travaux pour négocier une entrée exceptionnelle pour immortaliser ces moments de joie et cette chaîne mondiale qui encourage la délégation burkinabè. Peine perdue, la sécurité reste de marbre.

Le Pr Gomgnimbou qui ne tenait plus en place, a préferé nous rejoindre dehors. C’est lui qui nous parlera de la grosse impression que notre dossier a produite et de l’élan de reconnaissance de la communauté internationale à notre endroit. Pendant que nous attendions la sortie des héros, nous aussi avons droit à de chaudes félicitations. La délégation qui était visible grâce à son habillement (presque tous étaient en Faso dan fani) était fort sollicitée pour donner des informations sur le site ou pour des séances photo.
Le ministre de la Culture, du Tourisme et de la Communication, Filippe Savadogo et notre ambassadeur à l’UNESCO, Luc Adolphe Tiao mettront plus d’une heure pour sortir de la salle. Auparavant, le ministre Savadogo a pris brièvement la parole dans la salle pour exprimer au comité la satisfaction du Burkina pour la qualité du travail accompli lors de la session. Il lui a ensuite transmis les chaleureuses salutations du Président du Faso, du Premier ministre et de l’ensemble du peuple burkinabè.

« En ratifiant la Convention conernant la protection du patrimoine mondial, culturel et naturel en 1987, le Burkina Faso traduisait son engagement aux côtés de l’UNESCO et des autres pays signataires de la convention, pour la noble mission qui est de conserver l’héritage du passé que nous avons le devoir de transmettre aux générations futures. L’inscription de Loropéni nous donne une légitime fierté d’appartenir à une même communauté de destin. La reconnaissance de ce site comme bien d’importance universelle signifie qu’il n’appartient plus uniquement au Burkina Faso mais à tous les peuples du monde auxquels sa protection incombe désormais », a dit Filippe Savadogo.

Il a enfin salué la solidarité dont le Burkina a bénéficié tout au long de la préparation de son dossier de la part du comité de l’UNESCO à travers le centre du patrimoine mondial, de la Norvège, du Royaume des Pays-Bas, du World Monuments Watch, du Fonds pour le patrimoine africain, de l’ONG CRAterre, ainsi que de toutes les personnes physiques et morales qui ont soutenu financièrement, techniquement et matériellement le dossier.

« Avec l’inscription des ruines de Loropéni, nous sommes conscients de l’ampleur de la tâche qui nous attend et nous oeuvrerons donc à respecter toutes les conditions pour mériter cette inscription sur la liste du patrimoine », a conclu Filippe Savadogo.

La fête a été prolongée par un cocktail au cours duquel, le Burkina a redit sa gratitude à la communauté internationale. Une occasion pour le departement chargé de la Culture de projeter des documents vidéo sur Loropéni, de distribuer des DVD, des catalogues et des affiches tout en faisant danser les membres du comité aux rythmes du Burkina.

Victorien A. Sawadogo , Envoyé spécial à Séville

Sidwaya

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